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Est-ce qu’on peut encore appeler ça une banque ?!

Ce qu’on découvre en lisant les remarques des commissaires aux comptes (CC) sur le bilan de la BFPME (Banque de financement des pme) pour l’exercice 2021, est pour le moins inquiétant pour le devenir de cette banque créée du temps de Z.A.B.A, et pour l’avenir de tous les participants et déposants dans cette banque.

Banque Centrale et ministère des Finances ont certainement lu ces états financiers, et ne semblent pas bouger le petit doigt, soit pour la passer en commission de résolution, soit pour essayer de la redresser en y injectant du cash après y avoir fait le coup de l’accordéon.

Nous avons fait lire ces états financiers par un autre CC. Et à la vue de l’ensemble de ses ratios détériorés, on se demande même si on peut toujours appeler cette entreprise publique une banque, et qu’est-ce qu’on pourrait encore découvrir dans le bilan 2022 qui n’a pas encore été publié ?

  • Un cumul de pertes de 108, 058 MDT, et des capitaux propres négatifs de 11,006 MDT

Pour un capital social de 100 MDT, la BFPME accuse des pertes cumulées totalisant à la clôture de l’exercice 2021 un montant de 108, 059 MDT, (placés en rubrique résultats reportés comme on cacherait la poussière sous le lit) pour simuler une chambre propre et bien rangée, et un résultat déficitaire de l’exercice de 5, 877 MDT. Des chiffres qui ont engendré une situation nette comptable négative de l’ordre de 11, 006 MDT. « En application des dispositions de l’article 388 du code des sociétés commerciales, l’Assemblée Générale Extraordinaire, qui n’a pas prononcé la dissolution dans l’année qui suit la constatation des pertes, est tenue de réduire ou d’augmenter le capital d’un montant égal au moins à celui des pertes », estiment les CC de la BFPME qui prêcheraient presque dans le désert.

A cela s’ajoute le fait que le total des produits d’exploitation (10,5 MDT) soit inférieur aux seules charges du personnel (10,9 MDT). C’est comme si cette « banque » travaillait juste pour payer les salaires, en puisant même dans les fonds propres pour compléter la somme à dépenser pour ce faire !

Après trois exercices de quasi-stabilité des capitaux propres de la Banque à des niveaux de 6 MDT en 2017-2018 et 7,2 MDT en 2019, ces derniers ont observé pour la première fois une baisse importante à partir de 2020 pour passer à -5,1 MDT au 31 décembre 2020 et à -11 MDT au 31/12/2021 suite à un résultat déficitaire de 5,8 MDT réalisé en 2021. « J’ai fait de vieux os dans l’expertise et je n’ai jamais vu ça, même dans des pays africains. Il est inadmissible qu’une vraie banque ait des fonds propres négatifs », commente pour nous un autre commissaire aux comptes qui a requis l’anonymat.

  • La solvabilité de cette banque est en jeu

Et les CC d’alerter grave que « la situation de la Banque empire davantage, et nous vous informons qu’à la date de rédaction du présent rapport, la situation financière est devenue très critique et menace sérieusement la solvabilité de la Banque et sa capacité à honorer ses engagements financiers ».

Et en effet, les Fonds Propres Nets de la Banque totalisent, au 31 décembre 2021, un montant négatif de 13, 841 MDT. Ainsi, le ratio de solvabilité de la banque au 31 décembre 2021 est de -1.56% alors que le minimum requis, tel que défini par l’article 9 de la circulaire aux banques n° 2018-06 relative aux normes d’adéquation des fonds propres, est de 10%. Aussi, le ratio Tier I au 31 décembre 2021 est de -1.56% alors que le minimum requis, tel que défini par le même article, est de 7%. Et lorsqu’on parle solvabilité, on ne peut oublier les 14 MDT en dépôts et avoirs de la clientèle !

  • Toujours plus de crédits classés, et très peu provisionnés

« La Banque enregistre une augmentation des créances classées (+0.96%) en 2021 pour atteindre 83.52% contre 82.56% en 2020 ». A croire qu’elle n’aurait pas de service de recouvrement, ou que ce dernier ne fonctionnerait pas. Atone, la banque « enregistre un ratio de couverture des actifs classés par les provisions et agios réservés de seulement 53 74% contre 42 42% pour 2020 ». Elle continue pourtant à donner toujours plus de crédits. « A fin 2021, les engagements de la Banque totalisent la somme de 449, 661.489 MDT (dont 6, 787.136 MDT hors bilan), contre 428, 245.007 MDT (dont 7, 470.307 MDT hors bilan) pour la même période en 2020, enregistrant ainsi un accroissement de 5% ».

Les spécialistes disent qu’en comptabilité, le hors-bilan désigne habituellement un engagement, une garantie ou une activité de financement ne figurant pas au bilan de l’entreprise, que ce soit à l’actif ou au passif, parce qu’il ne répond pas aux principes de comptabilisation.

On pourrait opposer que tous ces engagements sont certainement couverts par des garanties, comme le voudrait le président de la République qui en a fait dernièrement ramdam public à la BNA. Or, « le rapport d’inventaire des garanties reçues par la banque, (…), fait état de plusieurs défaillances touchant à la gestion et à l’évaluation des garanties reçues. Les résultats de cet inventaire n’ont pas été actualisés et rapprochés avec les garanties inscrites au niveau de l’état des engagements ».

  • Une banque dans l’irrespect des règles de la place

Mis à part ces ratios détériorés, les commissaires aux comptes ont pointé du doigt des insuffisances à la pelle, comme si cette banque, où pas moins de 4 grosses entreprises publiques sont actionnaires, pouvait faire ce qu’elle veut, et défier toutes les règles de la place. C’est ainsi que « la banque ne dispose pas d’une comptabilité des engagements hors bilan, et ce contrairement à la norme comptable n°24 relative aux engagements et revenus y afférents dans les établissements bancaires. La Banque n’a pas procédé à l’inventaire physique de ses immobilisations corporelles et incorporelles à la date du 31 décembre 2021. Cette situation est contraire aux dispositions de l’article 17 de la loi n° 96-112 du 30 décembre 1996 relative au système comptable des entreprises », remarquent les commissaires aux comptes de la banque publique. Ils attirent aussi l’attention sur « l’absence d’un bilan pour chaque fonds géré pour compte ». Des fonds généralement étrangers qu’elle gère pour le compte de l’Etat tunisien.

On avait déjà remarqué que l’actuel bilan a été publié  un an après de celui de 2020 comme certaines entreprises pourtant cotées en bourse comme Tunisair, et voici que les CC confirment aussi que « la Banque n’a pas respecté les dispositions de l’article 6 de la circulaire aux banques et aux établissements financiers n°2017-06 « Reporting comptable, prudentiel et statistique à la BCT » qui prévoit l’arrêté d’états financiers intermédiaires au 30 juin et leurs déclarations à la BCT, accompagnés du rapport des commissaires aux comptes, au plus tard fin août de chaque année ».

Et comble du désordre dans cette banque qui gère des fonds, publics et étrangers, « nous avons identifié des défaillances importantes du dispositif de contrôle interne liées essentiellement à l’inefficacité des structures de contrôle permanent et périodique et à l’insuffisance des moyens humains, des outils de suivi et des méthodes d’analyse des risques encourus », assurent ses CC. Mais tout cela ne semble déranger ni l’Etat par le biais du ministère des Finances et de la BCT, ni les actionnaires publics de cette institution financière.

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