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La guerre en Ukraine: Les céréales et les engrais se conjuguent pour alimenter la crise en Tunisie

Les effets dévastateurs de l’invasion russe ne se limite pas à l’Ukraine et à l’ensembles des pays européens , chacun à son échelle,  mais ils sont en train d’abîmer et pour longtemps, redoute-on, la situation économique et sociale de maints pays arabes et africains dont l’alimentation, basée  sur les céréales, est tributaire dans une large mesure , de la Russie et de l’Ukraine.

La Tunisie en fait partie  où l’inquiétude enfle  concernant la disponibilité du pain, l’aliment de base de sa population. En bloquant la plupart des exportations de céréales et d’engrais en provenance de la mer Noire, le déclenchement des hostilités a pris de court le pays de 12 millions d’habitants et a alimenté une flambée spectaculaire des prix mondiaux des produits de base.

Il s’y ajoute un autre écueil : la  Russie et son allié le Belarus fournissent environ un tiers des engrais azotés utilisés par les agriculteurs européens et plus de 22 % de ce qui est épandu sur les cultures américaines, selon l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires de Washington. La Russie et le Belarus produisent également des volumes importants de potassium pour le Brésil, l’Afrique centrale et la Chine.

La flambée des prix des denrées alimentaires et des engrais cette année fera basculer au moins 40 millions de personnes dans l’extrême pauvreté, vivant avec l’équivalent de 1,90 dollar par jour, selon le Center for Global Development, une organisation à but non lucratif.

La Tunisie est l’un des pays les plus vulnérables, car elle dépend de l’Ukraine et de la Russie pour 56 % de ses importations annuelles de blé au cours des cinq dernières années, selon une analyse des données des Nations unies réalisée par Joseph Glauber, chargé de recherche principal à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires de Washington.

La perturbation du commerce agricole mondial due à la guerre a ajouté aux problèmes  financiers  de longue date de la Tunisie, creusant un cratère dans son  budget et menaçant la stabilité politique d’une rare démocratie arabe, souligne le célèbre grand reporter spécialisé dans l’économie mondiale David J. Lynch, dans une analyse parue sur les colonnes du Washington Post.

« Il y aura bientôt une révolution », a déclaré Youssef Cherif, directeur du Columbia Global Center à Tunis, une antenne de l’université Columbia de New York orientée vers la recherche, cité dans cet article. « Toutes les conditions préalables sont réunies (…) et je ne pense pas que le peuple puisse supporter longtemps cette situation », ajoute-t-il.

Le gouvernement insiste sur le fait qu’il dispose de stocks de blé suffisants pour tenir jusqu’à la récolte locale, en juin. Mais le dernier navire en provenance d’Ukraine a accosté en Tunisie trois jours avant le déclenchement des hostilités, le 24 février, et les boulangeries ont déjà du mal à s’approvisionner suffisamment.

Faute de blé ou de farine, les boulangeries de Tunis et d’ailleurs manquent souvent de pain en milieu de journée, et ils  ne sont pas habitués à faire la queue jusqu’à 100 personnes, ce qui est désormais fréquent.

Les engrais aussi

Les sociétés d’engrais comme Carthage Horticulture sont à court de produits chimiques en provenance de Russie, nécessaires pour maximiser le rendement des cultures nationales. L’entreprise n’en a pas reçu depuis six semaines. Le gouvernement fait la promotion d’une solution d’ammoniac liquide en provenance d’Espagne comme alternative, mais elle est deux fois plus chère.

Si, plus tard dans l’année, les agriculteurs tunisiens ne peuvent pas obtenir ou se procurer suffisamment d’engrais, la récolte de blé de l’année prochaine pourrait être insuffisante. Le gouvernement serait alors en concurrence avec d’autres acheteurs désespérés pour importer encore plus de céréales à un moment où l’offre mondiale risque d’être limitée et les prix élevé. Ces perspectives désastreuses ont amené de nombreux analystes à mettre en garde contre le risque de troubles sociaux.

« En Tunisie, la paix sociale est liée à ce que l’on a dans le ventre. Imaginez qu’il n’y ait pas de pain », a déclaré Faouzi Zayani, membre du conseil exécutif den l’organisation agricole  Synagri, cité dans l’article de David Lynch. Celui-ci rappelle, en plus, que la Tunisie dépend également des producteurs de pétrole étrangers pour près de la moitié de ses besoins. Les prix à trois chiffres du pétrole se répercutent donc sur l’économie, contribuant à accroître l’inflation des prix à la consommation.

Outre l’augmentation du coût des produits de base, la guerre nuit aux exportations de la Tunisie vers l’Europe et nuit à son activité touristique. Les touristes russes, qui venaient par milliers profiter des plages méditerranéennes du pays, restent chez eux, tandis que « les célèbres ruines romaines de Dougga ont vu récemment plus de moutons paître que de clients ».

La guerre fait grimper le coût des denrées alimentaires, du carburant et des engrais que la Tunisie importe, ce qui place  son gouvernement  face à un dilemme. Les prix du blé se sont établis à environ 30 % au-dessus des niveaux d’avant-guerre. Les prix des engrais russes ont commencé à augmenter à la fin de l’année dernière et sont maintenant plus de trois fois supérieurs à leur moyenne à long terme. Et les prix du pétrole, qui dépassent les 100 dollars le baril, sont bien au-delà  des 75 dollars que les conjoncturistes du  budget tunisien ont prévus pour cette année.

Le  PDG  de  l’Office tunisien  des céréales, qui est responsable des importations de blé et d’orge, a déclaré que les stocks du pays étaient suffisants pour les trois mois précédant la récolte nationale.

Alors que des rapports indiquent que le gouvernement a eu du mal à payer une partie du blé importé, il  a reconnu que certains paiements ont été effectués en retard. Mais il a minimisé l’importance de ces retards, affirmant qu’ils n’ont duré que 10 jours et n’ont affecté qu’une poignée de navires.

Aucun navire n’est retourné à son port d’origine sans avoir été déchargé, a-t-il déclaré, rejetant les rumeurs selon lesquelles certains navires seraient rentrés chez eux les mains vides. « Personne ne peut nier que la situation financière en Tunisie est difficile », a-t-il déclaré. « Il y a toujours des gens qui essaient de tirer un avantage politique de ce qui se passe ».

En effet, la capitale résonne des rumeurs selon lesquelles le gouvernement a jonglé avec ses comptes pour suivre le rythme des importations plus coûteuses, conclut le Washington Post sous la siganture de David Lynch.

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