AccueilLa UNEL'accord avec le FMI objet d'une polémique intergouvernementale, non déclarée ?

L’accord avec le FMI objet d’une polémique intergouvernementale, non déclarée ?

La Tunisie a eu le SLA (Staff Level Agreement) du FMI. Elle présentait alors cette « réussite », comme étant le sésame qui lui ouvrirait les portes des marchés financiers, à moindre coût et des IDE. On n’entend cependant, nulle part, bruit d’une quelconque préparation pour un road-show pour y aller. Officieusement, une source gouvernementale dit à Africanmanager que la Tunisie compte plutôt sur l’aide financière bilatérale. On nous parlait alors d’une aide saoudienne, et d’une autre européenne, dans les starting-blocks. Mais toujours rien, et aucun déplacement ministériel tunisien à l’étranger pour en donner quelque lueur d’espoir.

–          Contexte politique d’une urgence économique à pas de tortue

Et on entendrait presque un « Silence, on tourne » du côté de Carthage-Présidence qui résonne sur fond de bruit feutré d’une législative, presqu’inutile, pour réinstaller une ARP qui sera presque aphone devant les pouvoirs de l’Exécutif, et la division du législatif en deux chambres, dont l’une ne sera pas élue  au suffrage universel.

Et du coup, toute la vie et les perspectives économiques et financières du pays se retrouvent prises en otage entre les dents de l’agenda politique du chef de tout l’Etat. Et le plan de réformes de Najla Bouden commençant à montrer ses premières dents, notamment à travers les augmentations successives des prix de l’énergie et le traitement de la question des subventions, il fallait à l’Exécutif réagir pour mettre de l’eau dans le vin de Bouden, modérer les effets de ses réformes pour faire passer la colère d’une population courtisée pour des élections qui n’avaient attiré que peu de candidats comparativement aux 15.652 de 2014.

–          Un pas en avant, deux pas en arrière

Alors que la délégation tunisienne terminait à Washington ses discussions avec le FMI, et annonçait fièrement avoir décroché le fameux SLA (Staff Level Agreement) pour un prochain crédit de 1,9 Milliards USD, la DG du FMI indiquait sur Sky News que le gouvernement tunisien avait lui-même proposé un recours à la privatisation de certaines entreprises publiques.

On avait alors, officieusement, considéré que Kristalina Georgieva avait juste mal compris et mal interprété les intentions tunisiennes, et on corrigeait officiellement que ce ne sera qu’une simple restructuration au cas par cas. Et c’est ensuite, le 9 novembre 2022, en recevant la cheffe du gouvernement, que le chef de tout l’Etat précisait que « il n’y aura pas de cession d’entreprises et établissements publics, comme certains le prétendent ». Le chapitre des entreprises publiques, un des éléments clés du LSA donné par le FMI à la Tunisie et son programme de réformes, semble ainsi définitivement clos.

Et le silence de la cheffe du gouvernement tunisien à propos de ce dossier clé semble le confirmer, laissant la ministre des Finances et cheffe de file du groupe de négociation répondre chaque fois à toute question de presse à ce propos, pour tempérer les ardeurs du principal bailleur de fonds à ce propos et éviter de jeter de l’huile sur le feu avec l’UGTT.

« Il est essentiel que le gouvernement décrive plus en détail chacune des mesures de son plan de réformes, et qu’il en débatte avec l’ensemble des parties prenantes », martelait depuis juin dernier Jihad Azour du FMI. Ce ne sera jamais fait, et tous les plans de communication de Najla Bouden pour tenir ses engagements avec le bailleur de fonds resteront lettre morte par la volonté du chef de tout l’Etat tunisien, qui préfère donner la priorité à son agenda politique.

–          Nemsia et Zahi croisent le fer sur la question des subventions

Sur l’autre volet des réformes à faire par la Tunisie, sur la base de l’accord conclu avec le FMI, celui de la compensation qui mine le budget, c’est le ministre tunisien des affaires sociales Malek Zahi qui monte au front.

Dans une interview publiée par le journal « Achourouk » du lundi 21 novembre 2022, le ministre réputé proche de Kais Saïed, indiquait que « la levée des subventions n’a pas été décidée » et que « la question est toujours à l’étude et en discussion ». Et comme pour renvoyer cette question aux calendes grecques, Zahi a estimé que « la question de la levée des subventions nécessite un large dialogue sociétal, avec la participation du gouvernement, des organisations professionnelles nationales et de la société civile, pour trouver une solution commune qui sera présentée plus tard au président de la République ».

Défendant manifestement, selon notre analyse, l’approche de Kais Saïed de la primauté de l’agenda politique sur l’accord avec le FMI, le ministre des Affaires sociales se retrouvera quatre jours plus tard (le 24 novembre 2022), en porte-à-faux avec sa collègue des finances Sihem Nemsia qui donnait sur la Wataniya les détails chiffrés de la question de la levée des subventions, une journée après que sa collègue de l’énergie a annoncé une 5ème hausse des prix des carburants, toujours dans le cadre du programme de Najla Bouden de lever progressivement les subventions. Force est ainsi de conclure, selon notre analyse, qu’il y aura polémique à ce sujet, et peut-être même bataille larvée entre deux ailes de l’Exécutif tunisien sur l’opportunité d’appliquer maintenant le plan de réformes convenu entre gouvernement et FMI.

Finissons par préciser, pour éviter d’être traînés devant la justice en vertu du décret 54 de Kais Saïed qui considérait à Djerba que la liberté de presse dépend de la liberté de pensée, que ce que nous publions ici est un article d’opinion, fait sur la base d’une analyse de plus d’une déclaration officielle. Ne vous y trompez pas ; Madame la ministre de la Justice, ce n’est donc là qu’une liberté d’opinion !

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3 Commentaires

  1. La comparaison du journaliste Boumiza à propos des candidats aux législatives de 2022 (1200 environ) avec celle de 2014 (15 625) est complètement biaisée car pendant cette période, les partis opportunistes et corrompus existaient activement, ce qui donne bien entendu un nombre supérieur à celle de 2022 dont une grande partie des organisations politiques ne souhaitent pas participer à ces élections ou exclues implicitement (cas de Ennahdha, Al Karama,…). Pour ce qui concerne le FMI, le gouvernement doit obligatoirement engager rapidement le dialogue sociétal pour trouver enfin une solution commune à la levée des subventions. Les parties prenantes au dialogue sociétal assument entièrement leur responsabilité à la réussite de ce dialogue et aux accords définitifs conclus dans un PV signé par tout le monde. Ceci constitue le point crucial pour l’obtention du crédit FMI et pour engager rapidement sans perdre du temps les réformes pénibles mais indispensables.

    • A fares l’inconnu. Votre réponse est biaisée par votre propre assertion de « un nombre supérieur à celle de 2022 dont une grande partie des organisations politiques ne souhaitent pas participer à ces élections ou exclues implicitement »

  2. A mon humble avis, s’il y a divergences entre les membres du gouvernement (Finance et sociale), le Président KS devrait assurer la coordination entre les différentes approches du gouvernement pour avoir la même politique de réformes par toute l’équipe ministérielle et ce en l’absence d’actions de correction de la part de la Cheffe du Gouvernement. Par ailleurs, certaines entreprises publiques sont dans un état comateux, il serait difficile de les sauver pour plusieurs raisons, la seule solution préconisée est de les privatiser par la vente. Le personnel pourrait être formé dans d’autres secteurs afin de sauver l’emploi.

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