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L’industrie du textile tisse sa transition écologique

Des décennies durant, l’industrie du textile et de l’habillement a pris rang de locomotive de l’économie tunisienne en termes d’exportation et de création d’emplois. Un « âge d’or » qui s’est poursuivi jusqu’ au démantèlement de l’Accord multifibres (AMF) en 2004. Mais cela a généré un coût sur lequel l’accent n’a pas été dûment mis. C’est la forte pression exercée par ce secteur sur l’environnement et le climat en raison de quantités importantes de rejets de fluides industriels déversés souvent dans la nature, polluant ainsi, les cours d’eau et le milieu marin et le sol, en particulier dans des régions côtières telle que Monastir, où sont concentrées les usines textiles.

Cette pression est exercée surtout sur les ressources en eau dans un pays classé en dessous du seuil de pauvreté en eau selon les critères de sécurité hydrique des Nations Unies, et compte tenu de la diminution des précipitations de 28% au cours des deux dernières décennies sous l’effet des changements climatiques.

En mai 2019, une étude du Forum des droits économiques et sociaux (FTDS) a accusé les textiliens d’être derrière la grave pollution et la dégradation de l’environnement du milieu récepteur dans les oueds et la mer, en particulier au niveau de la baie de Monastir, et de l’Oued Hamdoun et la Sebkha de Moknine (région de Monastir).

« L’utilisation d’eaux souterraines non contrôlées et d’eau potable dans le processus de délavage du  » jean  » par la dizaine d’entreprises de la région requièrent 550 000 mètres cubes d’eau par an, ce qui illustre encore l’exploitation excessive de l’eau dans cette région où les coupures d’eau sont fréquentes aussi bien pour la consommation des ménages que pour l’irrigation », constate la même étude, citée par TAP.

Selon des données recueillies par la Cour des Comptes, citées par le FTDS, 74% des entreprises industrielles en Tunisie, rejettent leurs eaux usées sans se conformer aux normes tunisiennes, et ce, en raison de l’application limitée des lois et normes contre les industries polluantes.

Vers une transformation écologique inévitable

Cette réalité pourrait changer. Car, depuis 2015, l’industrie du textile et de l’habillement en Tunisie tente de s’adapter à une nouvelle conjoncture mondiale où les normes de qualité environnementale sont de plus en plus exigées. Cette adaptation est initiée, dans le cadre d’un programme régional « Switchmad » et de sa filiale orientée vers le secteur textile en Tunisie, au Maroc et en Egypte « Med Test 1, 2 et 3 « .

L’objectif de ce programme, financé par l’Union européenne et mis en œuvre en coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), est d’aider le plus grand nombre d’entreprises actives dans le secteur, 100 entreprises au départ, à adopter le recyclage et la gestion des déchets textiles et vestimentaires, postindustriels et de pré-consommation et d’éliminer les produits chimiques éventuellement toxiques et partant créer des chaînes de valeur plus circulaires sont développées.

 » l’idée derrière ce projet, qui se poursuivra dans sa première phase jusqu’en 2023, est de faire de la valorisation et du recyclage des déchets textiles une solution commercialement viable, réalisant ainsi, profit économique et limitation des impacts du secteur sur l’environnement et création d’emplois « , assure le représentant du PNUD et coordinateur du programme « Switchmad » en Tunisie et au Maroc, « Antonio Tremarchi « . Cela nécessite, à son avis, l’établissement de relations commerciales appropriées entre les différents acteurs de la chaîne de valeur textile.

De nombreuses entreprises tunisiennes ou exportatrices en Tunisie se sont engagées dans une démarche de production durable dans le cadre du programme précitée. C’est le cas de l’une des grandes entreprises textiles tunisiennes « SITEX » a pu réduire, en 2019, le pourcentage de ses émissions de dioxyde de carbone de 17% et est parvenue à réaliser une économie de l’eau de 34%, une économie d’énergie de 14% et 3,2% d’économie de matières premières. D’autres n’ont pas été en reste comme « New AMICO », active dans le lavage, la teinture et le traitement de produits textiles entièrement exportés vers l’Europe, et « NOEL « , active dans le secteur du cuir et de la teinture.

Organiser la filière des recycleurs

L’expert, Mehdi Dhraief, chargé du programme « Switchmad » et « Med Test 3″ en Tunisie, a indiqué à TAP, qu’une  » idée de lancer une application en ligne, en Tunisie est à l’étude actuellement. Elle permettra une traçabilité des déchets textiles depuis leur sortie des usines, via les collecteurs, jusqu’aux destinataires « .

Le fait d’informer l’Agence nationale de gestion des déchets (ANGED) des quantités réelles, de leurs collecteurs et leurs récepteurs, facilite beaucoup, à son avis, le processus de contrôle et à empêcher l’élimination irresponsable (incinération à ciel ouvert des déchets) ou leur dépôt dans les décharges.  » Ca permet aussi de les récupérer et de les valoriser au lieu de gaspiller cette ressource « .

L’expert estime que la solution pour réussir une démarche d’économie circulaire dans le secteur textile réside dans le fait d’organiser les circuits de recyclage.

 » Il faut que la filière des recycleurs s’organise. On ne peut pas valoriser un flux de déchets non traçable. Il faut le cerner, évaluer les quantités et coordonner après, pour créer des opportunités d’exportation et d’emploi et en même temps préserver l’environnement « , a-t-il dit.

Et d’enchaîner « les stocks de matières premières en Tunisie ou dans d’autres pays ne sont pas éternels, et les cultures de coton, d’eau et d’énergie ne peuvent pas répondre durablement à la demande mondiale ».

TAP

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