AccueilLa UNEQui sont les spéculateurs? Les chiffres en donnent une idée claire

Qui sont les spéculateurs? Les chiffres en donnent une idée claire

Depuis plusieurs mois, un vent de panique souffle partout dans le pays, où des citoyens se ruaient vers les rayons des magasins pour se procurer une ration d’huile, de pâtes, ou de sucre, craignant le réveil du spectre de la faim qu’ils ont découvert à travers les livres d’histoire.

Les industriels, et autres professionnels (cafetiers, pâtissiers …) ne sont pas épargnés de cette pénurie qui a ramené leur stock de matières premières à zéro, sans pouvoir le reconstituer, et se trouvent astreints à arrêter la production ou carrément à fermer boutique. Une usine de boissons ferme ses portes et ses employés font manifestation dans les rues. Une autre, d’un produit agroalimentaire, diminue sa production, et la pénurie se fait visible  sur les étals  des grands et petits magasins. Cela, sans compter la crise du lait qui se profile à l’horizon.

Dans l’histoire contemporaine de la Tunisie, une telle situation n’a jamais été vécue, même dans les périodes les plus difficiles de révoltes, d’insurrections populaires ou de coups d’Etat. Depuis la deuxième guerre mondiale pendant laquelle les produits alimentaires étaient soumis au rationnement, le Tunisien n’a connu ni famine, ni pénurie.

  • Officiellement, la pénurie, c’est les autres

Il est vrai que cette pénurie qui a frappé plusieurs pays, faisant planer une crise alimentaire, a pour causes, selon des avis judicieux et unanimement exprimés, le dérèglement climatique, la guerre russo-ukrainienne et les perturbations du transport international. Une autre cause « tuniso-tunisienne » est constamment avancée comme étant la principale raison de la pénurie : c’est « la spéculation illégale, œuvre des scélérats, des truands et des contrebandiers ». Ceux-ci sont également accusés d’être à l’origine de la flambée des prix des produits et denrées de base qui continuent à afficher des augmentations, parfois, à deux chiffres.

Ni l’état des lieux, ni les structurelles opérationnelles de l’approvisionnement (des offices de l’Etat qui ont le monopole de l’importation), ni enfin les chiffres ne corroborent cette thèse manifestement biscornue, imputant à d’autres la pénurie ou à des manœuvres spéculatives de contrebandiers et de malfaiteurs.

Au niveau des chiffres (qui parlent d’eux- mêmes), force est de relever un important déficit d’approvisionnement durant les sept premiers mois de 2022, par rapport à 2021, comme il est indiqué dans le tableau suivant dont tous les chiffres sont puisés dans les statistiques et données fournies par l’Institut National de la Statistique (INS).

Il convient tout d’abord de préciser le caractère approximatif de cette analyse qui a supposé que les approvisionnements se font de manière quasi linéaire et que l’équivalent des quantités achetées à fin Juillet 2021 (pour les besoins de la comparaison par rapport à juillet 2022) correspond aux 7/12 des approvisionnements de l’année 2021. L’analyse restera, cependant, au moins indicative. A préciser également que tous les montants figurant dans le précédent tableau sont exprimés en milliers de tonnes.

  • Par le chiffre, c’est autre chose

A travers ces résultats, il est permis de relever, malgré les limites de la méthode adoptée, un déficit d’approvisionnement pour l’échantillon retenu, et au titre des sept premiers mois de 2022 par rapport à la même période de 2021, de :

  • 456 mille tonnes pour les céréales, soit 24% des importations au 31 juillet 2021 ;

7 mille tonnes pour les produits de la minoterie, soit 33% des importations au 31 juillet 2021 ;

  • 365 mille tonnes pour les houilles, pétroles et dérivés, soit 10,5% des importations au 31 juillet 2021.
  • Les chiffres de l’INS ne sont pas assez détaillés pour le sucre ou le café, sinon on aurait pu trouver les mêmes baisses, bien que les écarts ne soient pas significatifs.

La baisse des approvisionnements par rapport à l’année 2021 est d’autant plus percutante et significative que, durant cette année, l’activité économique ainsi que la consommation en général, ont décéléré en raison du confinement instauré dans plusieurs régions et pendant plusieurs périodes.

Comme nous l’avions déjà dit, par le chiffre, la conclusion est donc que la pénurie est d’abord et avant tout le fait d’une politique délibérée de limitation de l’importation de certaines denrées. Une politique, dont la ministre de l’Industrie Naila Gounji pour le cas des carburants, a dévoilé les vraies raisons (ar).

A préciser enfin que lorsque les vraies raisons de la pénurie et de l’augmentation, non maîtrisée, des prix sont soigneusement repérées, les solutions adéquates et appropriées pourraient être trouvées et mises en place. C’est ainsi par exemple qu’en France une loi a été récemment votée  « portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat ». Au Maroc, des instructions ont été données aux stations-service pour rationner les opérations de lavage de voitures par mesure d’économie d’eau, et la France prépare la même stratégie chez elle pour le gaz, comme le disait hier la 1ère ministre, qui insistait alors sur la nécessaire communication pour sensibilisation que son gouvernement prépare aussi.

Najla Bouden avait récemment rencontré Elisabeth Borne, mais on ne sait pas si elles ont parlé de ce sujet.

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