AccueilLa UNETunisie : Houcine Dimassi lance un avis de tempête sur l'économie

Tunisie : Houcine Dimassi lance un avis de tempête sur l’économie

Dans son interview accordée à Africanmanger, l’expert économique et ancien ministre des Finances Houcine Dimassi a lancé un avis de tempête sur la situation économique du pays, affirmant que le contexte actuel est plus que catastrophique. Les chiffres officiels indiquent un taux de croissance du PIB durant le premier semestre de 2016 de l’ordre de 1%. Certes, c’ est mieux que rien, mais il demeure très faible. En plus, le taux de croissance des activités productives-inductrices, réellement créatrices de richesses, à savoir l’agriculture, les industries, le bâtiment et le tourisme, se situe à un niveau carrément négatif (-0.2%). Le plus beau dans cette histoire c’est qu’on produit moins et on espère consommer plus. Il en va ainsi avec des partis démagogues et des syndicats populistes anarchistes, dit Dimassi.

La stagnation, voire la régression, de la production tunisienne résulte de facteurs exogènes tels la crise économique en Europe, les turbulences multidimensionnelles en Libye et l’épuisement de certaines ressources naturelles, surtout celles de l’énergie. Mais elle résulte aussi de plusieurs facteurs endogènes : grèves anarchiques, sit-in fréquents, absentéisme sans raison, rendements dérisoires, terrorisme et désordre… Les trois cas typiques résumant ces fléaux sont les phosphates et dérivés, le tourisme et les énergies.

Un déficit étouffant et une spéculation impunie

Dimassi a dans le même contexte indiqué que le fléchissement de la production détraque tout le reste de l’économie. « Depuis 2012, on enregistre un déficit de notre balance commerciale variant entre 11 et 13 milliards de dinars, découlant en partie d’un effondrement de nos exportations. Ajouté au tarissement manifeste des recettes du tourisme et des transferts des émigrés, cet énorme déficit commercial a beaucoup contribué à la détérioration de nos réserves en devises. Sur ce plan, l’on semble tenir le coup que grâce aux emprunts extérieurs ! De même, depuis 2011, année mémorable de la révolte, les finances publiques n’ont pu se débarrasser de leur gangrène : un déficit étouffant variant selon les années entre 3 et 7% ». Selon lui, le budget de 2016 prévoit 3.9% actualisé 6.1%. Selon le projet de budget de 2017, ce déficit atteindra un niveau ingérable de 8.9%. De son coté, l’inflation continue de ronger tous les équilibres macro-économiques, puisque, elle aussi,  n’a cessé d’osciller entre 3 et 6%. L’injection de l’argent dans une économie mourante, sous forme de salaires et de crédits, aggravée par la spéculation impunie, explique la persistance de cette anomalie. « Le bouquet de tout ça est évidement l’effondrement sans précédent du dinar. Surtout lorsque la Banque Centrale joue le rôle passif d’un spectateur », a-t-il précisé.

Interrogé sur le sort du nouveau gouvernement qui devrait être mis en place dans les prochains jours, l’ancien ministre des Finances a fait remarquer qu’un gouvernement d’unité nationale tel que proposé par le président de la République serait encore pire que celui d’Essid. Selon lui, le gouvernement actuel a échoué pour plusieurs raisons, dont notamment l’absence de programme, l’incohérence des pseudo-actions, et surtout la flagrante soumission aux désirs démagogiques des partis et syndicats ouvriers. La mosaïque d’un gouvernement d’unité nationale ne pourrait que rendre encore plus ravageurs ces abcès.

Un gouvernement de sauvetage….

Il a toutefois estimé que l’unique salut pour notre pays, pouvant l’aider un tant soit peu à se dégager de cet engrenage, réside dans un gouvernement de sauvetage totalement autonome par rapport aux partis et syndicats. Et d’expliquer à ce propos que ce gouvernement devrait être doté d’un programme de réformes précis et circonscrit, réformes parfois douloureuses mais absolument nécessaires. « Unique, ce choix est pourtant quasi impossible à concrétiser. Le régime politique parlementaire, actuellement en vigueur dans notre pays, ne favorise que les gouvernements fragmentés, stériles et impuissants, qui aggravent les problèmes au lieu de les résoudre. Ainsi semble être la désolante destinée de notre pays : sautiller sur le sable mouvant qui finira un de ces jours par nous engloutir tous », a-t-il dit.

Le drame….

Évoquant l’endettement, Houcine Dimassi a tenu à préciser que durant la période post-révolte; 2011-2016, l’encours de la dette publique s’est gonflé d’environ 25 milliards de dinars. Ainsi en 6 ans il a carrément doublé, phénomène jamais observé auparavent. Le drame c’est que cette dette additionnelle a servi non à renforcer le budget d’équipement mais à soutenir la consommation (salaires et compensation) ou à rembourser les dettes antérieures. Le drame au carré c’est que les sources en devises servant à rembourser la dette extérieure se tarissent à vue d’œil. Le drame au cube c’est que nos banques rentières vivotent non par les intérêts sur les crédits à l’investissement mais plutôt par les intérêts sur les bons de trésor émis par l’État. Donc pour les aider à spéculer, La Banque Centrale alimente les banques d’affaires à coups de milliards de dinars. Dans ce « stambali », certains politiciens et syndicalistes de trois sous osent encore dire que tout va bien, ou presque.

Il a sous un autre angle indiqué que la Tunisie risque de ne pas rembourser ses dettes auprès de l’extérieur. En effet, en s’enfonçant de plus en plus dans l’endettement pour consommer, rembourser la dette antérieure ou s’armer, le pays est progressivement dans l’incapacité d’honorer ses engagements extérieurs par ses propres moyens. En l’absence d’une amélioration de la production et des exportations, il n’est guère possible d’être fiable en matière d’endettement. Sauf bien sûr un miracle espéré par un bon nombre de Tunisiens.

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