AccueilLa UNEVaccin ou non-vaccin ? La réponse est politique, et l’impact est économique

Vaccin ou non-vaccin ? La réponse est politique, et l’impact est économique

Comme son prédécesseur, Hichem Mechichi entame la première année de son véritable plein exercice sous le joug de la pandémie du Coronavirus. Bizarrement, la courbe des contaminations était intervenue, quelques jours après sa montée au pouvoir. Comme lui, après moult tergiversations, il commence par plonger le pays et son économie dans le confinement, en en relevant progressivement le niveau.

Mais contrairement à son prédécesseur Elyes fakhfakh, l’actuel chef de gouvernement tunisien ne semble prévoir aucune mesure d’accompagnement économique et financière, pour éviter que succombe définitivement ce qui restait des entreprises économiques qui avaient survécu à la première vague du Covid-19. Cela, d’autant plus que nombre des mesures du gouvernement Fakhfakh peinent toujours à trouver bonne, due et totale application.

On ne sait pas comment ce dernier aurait réagi s’il y avait, comme désormais, vaccin. Ce qui semble être en tout cas juste à dire, c’est que l’actuel gouvernement suit la méthode Coué de son prédécesseur, à saupoudrer ses décisions de lutte contre la pandémie, sans conviction aucune de passer au niveau supérieur, celui de considérer le vaccin comme la priorité des priorités, car l’enjeu est désormais la faillite, entreprises et donc Etat compris.

–          La responsabilité première est celle de la population

La première vérité est que la Tunisie n’aurait pas eu à faire face à ce dilemme de la vaccination, si les Tunisiens s’étaient vraiment astreints à respecter les fameux gestes barrières, et l’inconscience de leur comportement social face au danger de la seconde vague. La 2ème est qu’à l’image du gouvernement Fakhfakh pour la première vague du Covid-19 et notamment pour les masques et les aides sociales, celui de Mechichi a aussi mal géré la deuxième vague. Mal géré ce qui restait de l’argent du Covid-19 qui devait être dépensé pour mieux équiper le système sanitaire tunisien en lits Covid notamment à la seconde. Ces promesses, à ce propos, n’ont été que peu tenues. Mal géré la question des tests, tant pour la stratégie de dépistage, les chiffres des contaminés, que pour la mise à disposition de tests moins chers que le PCR (210 DT, ou 64 euros, contre seulement 54 en France). Mal géré l’application des mesures contre les rétifs à l’application des gestes barrières, et où le laxisme était de rigueur et n’a surtout pas épargné les officiels, les multiples actions de protestations sociales, et les attroupements à la recherche du gaz domestique. Et mal géré, aussi et non enfin (comme par ailleurs toute sa communication) la communication sur la pandémie.

–          Coût de la non-vaccination, ou même du retard : 1 Milliard DT/mois !

Le mandat de Mechichi avait coïncidé avec l’envolée des chiffres des contaminés à partir du 15 septembre. Son gouvernement, ainsi que le comité scientifique qui le conseille, ont pourtant continué à traiter la question comme l’avait fait son prédécesseur. Et alors que beaucoup de pays se bousculaient au portillon, depuis octobre et novembre derniers, pour les précommandes de vaccins, le gouvernement tunisien n’avait commencé à en parler qu’à la fin décembre dernier.

L’économiste Afif Chelbi, a pourtant dernièrement estimé, en extrapolant une étude faite dans ce sens par le conseil d’analyses économiques français, que « un mois de retard dans la vaccination coûte à la Tunisie plus de 1 milliard de dinars ». Or, on ne sait toujours pas, officiellement et de manière définitive, à quel moment la Tunisie sera livrée, et donc combien de mois  elle perdra. On ne sait même pas si la Tunisie a réellement fait commande, puisqu’elle veut se faire financer par la Banque Mondiale, et peut-être par une nouvelle ligne FMI. La date de livraison, dite au gré des déclarations officielles tunisiennes, pour la fin du 1er trimestre ou la fin du second trimestre 2021, restera tributaire aussi de son classement sur la (ou les) liste d’attente des laboratoires internationaux.

–          Coût de la vaccination : peanuts par rapport aux pertes, disent les chiffres

Pour Chelbi, « si on perd le 1er semestre, on perd toute la croissance attendue pour 2021 ». L’année dernière, on avait fait presque -10 %. Pour l’année prochaine, on risque de faire-10 % de croissance aussi, ce qui nous ramène au chiffre avancé par Afif Chelbi. Et si la Tunisie n’est pas, au plus vite, labélisée « Covid-safe », c’est d’abord toute l’activité du tourisme qui trinquera encore, la production et les exportations ensuite.

Ailleurs, le grand public a appris, certes, par un malheureux Tweet du ministre belge Eva De Bleeker, que « le prix à l’unité varie de 1,78 euro pour le vaccin du groupe suédo-britannique AstraZeneca, à 18 dollars US (soit 14,70 euros) pour celui de l’américain Moderna, en passant par celui de Pfizer/BioNTech qui coûte 12 euros », selon ce qu’en rapportait le 19 décembre 2020 déjà, le journal français 20 Minutes.

Extrapolant, à notre tour, et en prenant la plus haute fourchette de prix de 14,7 euro la dose, vacciner la moitié de la population tunisienne coûterait 578,412 MDT pour les deux doses, dont celle du rappel. D’autres sources financières, plus optimistes, évoquent le chiffre de cent à 200 MDT. Et même à 580 MDT de coût d’achat du vaccin, on reste loin, très loin du1 Milliard DT de pertes pour l’économie tunisienne, en cas de non-vaccination.

La décision, hautement politique et d’impact fortement économique dans les deux cas, tarde à être clairement exprimée et mise en exercice. Peut-être que le gouvernement a peur de manquer d’argent pour ses obligations sociales. Mais beaucoup, et ils savent ce qu’ils disent, pensent que la BCT pourrait cette fois, sans rechigner, faire les avances nécessaires à l’achat du vaccin, et que les bailleurs de fonds n’y verraient aucun mal !

–          La Tunisie a-t-elle les moyens de la vaccination, et quel vaccin ?

De source très bien informée en Tunisie, on nous assure que « le coût de la vaccination en Tunisie n’est pas un problème ». Au 13 janvier 2021, le Compte courant du Trésor public en Tunisie disposait de 2,497 Milliards DT. Au 15 du même mois, les avoirs nets en devises s’élevaient à 22,817 Milliards DT (160 jours d’importation).

Or, il semble clair que le gouvernement Mechichi et ses conseillers ne font pas ce genre de calcul. Celui qui considère que la plus grande urgence pour la Tunisie en matière d’investissement, est celle d’investir dans la vaccination, seule capable d’éviter à la Tunisie une catastrophe économique, et partant, sociale.

Pour l’instant, ce dont nous sommes sûrs, c’est que le gouvernement chercherait à financer la vaccination, lorsqu’elle sera possible, par l’extérieur. « Nous sommes en discussion avec le gouvernement sur la possibilité de financer environ 100 millions de dollars pour l’acquisition de vaccins. Rien de décidé et de finalisé à ce stade. Mais nous avançons, j’espère rapidement, vers un accord », a déclaré Ferid Belhaj, vice-président du Groupe de la Banque mondiale pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord, pour Africanmanager. Et Belhaj de nous préciser enfin que « le vaccin [Ndlr : à financer] doit être validé par l’OMS, et les autorités de régulation sanitaire de différents pays ».

–          Quel vaccin pour la Tunisie ?

Le 14 janvier 2021, Yves Souteyrand, représentant résident de l’OMS en Tunisie, déclarait sur une radio locale que « pour le moment, il y a un seul vaccin qui a été mis sur la liste d’utilisation d’urgence de l’OMS, qui est le vaccin Pfizer/BioNTech. Certainement, d’autres vaccins seront validés, mais il faut travailler encore plus pour savoir et s’assurer des conditions dans lesquelles les essais ont été réalisés, sur le risque des effets secondaires, sur l’efficacité de ces vaccins… Ces mesures, souvent compliquées mais importantes, prennent du temps ».

Nous savons aussi que la Tunisie discute aussi avec les Russes, pour accéder au vaccin Spoutnik. « Sputnik V est actuellement parmi les 10 premiers vaccins proches de la fin des essais cliniques et du lancement de la production en masse candidats sur liste de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) », pouvait-on lire sur le site même de Spoutnik.

Interrogé par Africanmanager sur l’état des lieux des discussions avec les Russes, pour le vaccin, l’ambassadeur de Tunisie à Moscou Tarak Ben Salem nous a indiqué que « une discussion par visioconférence a eu lieu entre experts des deux bords. Notre comité scientifique devrait édifier nos décideurs politiques. Une fois la décision prise au niveau politique, les diplomates agiront pour faire accélérer les démarches nécessaires à l’acheminement, du vaccin, dans les meilleurs délais possibles. C’est vrai que le temps presse. Mais nous sommes prêts ».

Et lorsque nous lui demandons s’il est exact que les Russes n’auraient pas voulu donner aux Tunisiens le dossier du vaccin nécessaire à sa validation pour l’importation, il répond que « je ne suis pas au courant de cette éventuelle mésintelligence ». Pour l’instant donc, et selon nos informations, seul Pfizer a pu avoir une autorisation de commercialisation exceptionnelle et provisoire et pour une durée d’une année sur le marché tunisien

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