Un rapport conjoint de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), de la Banque européenne d’investissement (BEI), ainsi que du Groupe de la Banque mondiale a fait ressortir que la croissance et le développement des entreprises du secteur privé dans la région MENA dont la Tunisie, sont freinés par quatre sujets de préoccupation particuliers dont l’instabilité politique, la corruption, le manque de fiabilité de l’approvisionnement en électricité et l’accès insatisfaisant aux financements. Ce constat est le résultat d’une enquête menée sur plus de 6000 entreprises privées du secteur des technologies et services localisée au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA).
Selon cette enquête récemment rendu publique, l’instabilité politique induite par les printemps arabes, les tensions sociales non résolues et les conflits dans la région au sens large, ressortent comme la principale préoccupation des cadres et dirigeants des entreprises en en Tunisie mais aussi en Égypte, au Liban, , en Cisjordanie et à Gaza ainsi qu’en République du Yémen. « Dans la plupart de ces économies, l’instabilité politique semble avoir des répercussions négatives sur la croissance des entreprises et de la productivité ».
S’agissant de la corruption, l’enquête montre que les niveaux jugés élevés sont associés à une croissance plus faible des ventes et de l’emploi ainsi qu’ à une baisse de la productivité de la main d ’œuvre : « La corruption constitue une préoccupation majeure pour les cadres et dirigeants des entreprises. Il s’avère également que la corruption fait obstacle aux interactions des entreprises avec les pouvoirs publics et les empêche ainsi d’exploiter pleinement les possibilités qui se présentent. En outre, l’inquiétude entourant la corruption semble aller au-delà des affaires de petite corruption, ce qui suggère l’existence de problèmes plus graves dans les économies concernées (captation de l’État par des groupes d’intérêt ou des élites, corruption dans les hautes sphères, ou même sous-dénonciation par peur de représailles, par exemple) ».
Le manque de fiabilité dans l’approvisionnement électrique est aussi une entrave importante pour les entreprises de plusieurs économies. Selon ce document, le manque de fiabilité de l’approvisionnement en électricité reste un problème important en Égypte, au Liban, en Cisjordanie et à Gaza et en République du Yémen, malgré les efforts déployés par certains États pour régler ce problème. « Un approvisionnement irrégulier en électricité représente une perte importante de chiffre d’affaires pour de nombreuses entreprises et est associé à une baisse des niveaux de productivité ».
« De nombreux pays ont choisi, comme solution de secours, de subventionner l’énergie lorsque leurs régimes de protection sociale s’avèrent inappropriés ou inefficaces. Mais cela est coûteux, et l’altération des prix qui en résulte a induit des incitations systématiques à évoluer vers des technologies à plus forte intensité capitalistique, parallèlement à un manque d’incitations à investir dans des infrastructures essentielles, tout en ouvrant la voie à des intérêts particuliers. Dans le cadre du programme de réforme engagé ces dernières années, plusieurs institutions internationales, dont le FMI et la Banque mondiale, ont appelé à une refonte complète des subventions pour évoluer vers un secteur de l’énergie plus efficace », note le rapport.
Toujours selon l’enquête, le secteur financier des économies couvertes par l’étude MENA est dominé par un secteur bancaire relativement étendu, avec des ratios prêts/PIB supérieurs aux économies comparables. Cependant, les prêts bancaires sont fortement concentrés, puisqu’ils ne vont qu’à un nombre limité de grandes entreprises, et la majeure partie des entreprises n’a donc que peu, voire pas d’accès au crédit.
L’utilisation des fonds internes pour le financement des opérations et des investissements varie fortement d’une économie à l’autre de la région. Le recours au crédit bancaire ainsi qu’au crédit-fournisseur et au crédit à la consommation est conforme à la pratique dans les économies comparables. Le capital-investissement joue un rôle négligeable dans la région, alors que d’autres sources de financement, dont la micro-finance, ne sont significatives
qu’en Tunisie et en Cisjordanie et à Gaza.