« Le redressement de la croissance économique, amorcé au début de 2016, devrait se poursuivre dans les trimestres à venir quoiqu’à un rythme plus lent qu’attendu quelques mois plus tôt. Les récentes prévisions à moyen terme ont revu à la baisse la croissance du PIB, aux prix constants de l’année 2010, pour la période 2016-2017 ». C’est ce qui ressort d’une note récente publiée par la Banque centrale de Tunisie (BCT) intitulée « Évolutions monétaires et conjoncturelles et » perspectives à moyen terme.
Ainsi, les prévisions de la BCT tablent sur une croissance annuelle de l’ordre de 1,8% en 2016 et 3% en 2017, contre 2% et 3,5% estimées en avril dernier. La révision à la baisse résulte des performances, en deçà des attentes, de plusieurs secteurs d’activité durant le premier semestre 2016, ainsi que de l’apparition de nouveaux risques baissiers à plus long terme.
Toujours selon la BCT, la trajectoire de croissance future serait fragilisée par la dégradation des perspectives de certains secteurs d’activité. En premier lieu, la poursuite de la régression de la production du secteur de l’énergie rend peu probable l’inversion de cette tendance baissière à l’horizon de prévision, étant donné l’importance du déclin naturel au niveau des principaux champs pétroliers. Ce secteur devrait continuer à amputer la croissance annuelle du PIB de 0,2-0,5% en moyenne. Ensuite, la persistance des troubles sociaux dans les zones de production, en particulier, dans le bassin minier et l’absence de solutions efficaces, permettant de surmonter les difficultés, pourraient freiner la reprise de la production à son rythme d’avant 2011. De surcroît, la trajectoire de croissance de l’activité touristique a été revue de nouveau à la baisse, vu les réalisations récentes en dessous des attentes, et les retombées potentiellement importantes de la multiplication des attentats terroristes et le climat d’insécurité qui règne sur l’ensemble de la région.
Par ailleurs, les perspectives de la production des industries off-shore ont été maintenues globalement inchangées pour le reste de l’année 2016, et revues légèrement à la baisse pour 2017, compte tenu des retombées potentiellement négatives du ‘’Brexit’’ sur les principaux partenaires de la Tunisie de la Zone Euro. « La révision à la baisse de la croissance du PIB hors agriculture, pour les années 2016 et 2017, et le maintien du potentiel de la croissance globalement inchangé (2,5% en 2016 et 2,6% en 2017), ont creusé l’écart de production négatif (différence entre la production potentielle et la production effective), comparativement à la précédente prévision. En termes annuels, l’écart de production devrait s’établir autour de -2,9% cette année et -2,6% en 2017, après -2,7% en 2015 », explique la BCT.
S’agissant de la croissance pour les prochaines années, la BCT a indiqué que les perspectives devraient s’améliorer lentement mais resteraient sujettes à divers aléas, qui seraient globalement asymétriques vers le bas. » Les incertitudes qui font craindre une croissance plus faible qu’attendu sont multiples. Sur le plan extérieur, les menaces que constituent les tensions géopolitiques sont particulièrement élevées, en particulier en l’absence de signes de rétablissement. Les conflits en cours, en Libye, et leurs répercussions sur la stabilité sécuritaire et économique du pays pourraient sensiblement affecter les perspectives retenues par le scénario central. Un ralentissement plus marqué de la demande étrangère, pourrait aussi peser sur la dynamique des exportations. Les répercussions négatives du Brexit sur nos principaux partenaires de la Zone Euro devraient être ressenties au niveau des industries exportatrices en 2017 et au-delà. En effet, si ces pays perdraient leurs parts de marché au Royaume-Uni, leur demande des produits tunisiens notamment des IME et THC, risquerait d’être sérieusement affectée », souligne la Banque centrale.
Sur le plan interne, les risques concernent, pour l’essentiel, le prolongement de la crise politique, la persistance de troubles sécuritaires et de l’instabilité sociale dans les zones d’extraction et de production, ce qui pourrait freiner le rétablissement de la production et de l’investissement à l’horizon de prévision. Également, les retards accusés pour la mise en place des réformes nécessaires (Code d’investissement, etc.) pourraient affecter négativement le climat des affaires.
De plus, l’arbitrage consommation-épargne pourrait impacter le rythme de progression de la demande de consommation. Par ailleurs, la persistance du déficit de liquidité bancaire à des niveaux historiquement élevés et la hausse des prêts non performants pourraient réduire la capacité du système bancaire à mobiliser les ressources nécessaires pour le financement de l’économie. « De surcroît, l’accentuation du déséquilibre budgétaire, l’accumulation importante de la dette publique, notamment depuis 2011, et l’arrivée à échéance de certains emprunts devraient peser sur la capacité de l’État à poursuivre une politique contra-cyclique sur l’horizon de prévision », ajoute la BCT.