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Tunisie : Le «livre noir» des entreprises publiques. Un gouffre financier de 2,5 Milliards DT

Du 4 au 6 octobre courant, une mission du FMI séjournait à Tunis. Parmi les points évoqués avec le gouvernement tunisien figure «améliorer la gouvernance et la surveillance des entreprises publiques déficitaires et moderniser la fonction publique demeurent des réformes structurelles cruciales pour réduire les risques budgétaires et rendre l’ensemble de l’économie plus compétitive». C’est dire, et c’est peu de le dire dans la mesure où la Tunisie n’aurait pas dû attendre le FMI pour le faire, l’importance de ce sujet pour un gouvernement dont la tâche initiale est de remettre de l’ordre dans l’économie du pays.

  • Que dit le rapport du gouvernement ?

Selon un rapport gouvernemental en date du 15 mai 2017, les entreprises publiques (EP) en Tunisie étaient au nombre de 104 en 2014, travaillant dans 21 secteurs de production et de services. Elles dégageaient, en 2010, des bénéfices d’un total d’un peu plus de 1,176 Milliard DT. Six années plus tard, en 2015, elles affichaient un déficit de presque 1,1 Milliard DT. A la fin de la même année, et on suppose que cela a beaucoup augmenté depuis, le cumul des pertes des EP, de 2012 à 2015, a dépassé les 2,5 Milliards DT.

Les causes, ledit rapport les a identifiées. D’abord des problèmes au niveau de la gouvernance, ce qui ne semblait pas être le cas avant. Manque de vision stratégique claire ensuite, alors ce ne semblait pas être le cas avant. Faible productivité, ce qui n’était pas le cas avant, puisqu’elles dégageaient des bénéfices. 41 EP ont enregistré une perte de 1,881 Milliard DT, depuis leur création et jusqu’à 2010. Ces pertes ont ensuite augmenté de 214,9 % entre 2010 et 2015. Les fonds propres de 29 de ces EP sont négatifs (-2.730 MDT contre 447,8 DT en capital).

  • Qui a payé les 5,8 Milliards DT ?

Les EP, c’est aussi des troubles et mouvements sociaux, grâce désormais à un droit de grève protégé par la Constitution et non balisé par aucune condition. Les EP, c’est encore des actifs non valorisés, des coûts de production élevés, des problèmes de pièces de rechange et des problèmes de maintenance de la flotte. C’est aussi des procédures complexes de gestion des transactions publiques, grâce notamment à la peur d’être accusés de «Fassed» qui serre les tripes des dirigeants de ces entreprises. Problèmes aussi au niveau de la structure de l’entreprise. Ajoutez-y les fortes dépenses, notamment salariales, par rapport à la faible production et le peu de productivité. Entre 2012 et 2015, ces EP ont servi un cumul de salaires de 16,4 Milliards DT, pour un résultat hautement déficitaire.

La masse salariale des EP était de 2,580 Milliards DT en 2010. Cinq ans plus tard, c’est 3,713 Milliards DT. Une hausse de 43,9 %. Les salaires des employés des EP ont augmenté de 50 % entre 2010 et 2013.

Pour faire face, soutenir l’insoutenable et verser de l’eau dans le désert, l’Etat ne dispose que du seul moyen de la prime d’exploitation, puisée dans le budget de l’Etat. 5,851 Milliards DT ont ainsi été injectés dans les caisses des EP, en hausse de 124,3 % par rapport à 2010.

  • L’Etat veut que les privés financent les EP !

Dans son document, le gouvernement de Youssef Chahed propose une panoplie de mesures pour une restructuration, sociale, financière et de gouvernance, des EP. A aucun moment ledit document n’a parlé de plan social, de licenciement ou quelque autre mesure du genre. Il évoque par contre une meilleure stratégie de l’Etat actionnaire, la création d’une agence pour la gestion des participations de l’Etat, une gouvernance qui sépare la gestion du contrôle et la nomination de gestionnaires sur appel à manifestation d’intérêt et choix sur dossier. Mais aussi un cadre RSE, un cadre législatif qui permet d’attirer les compétences à l’instar du secteur privé, la présentation de Business plans et la mise en place d’une ligne de financement qui permette l’équilibre financier à l’horizon 2018, ce qui est trop court à notre sens.

Plus important, le gouvernement Chahed évoque aussi, dans ce document, un certain nombre de mesures financières, l’argent étant le nerf de la guerre. Il propose d’abord la création de ce qu’il appelle un «Fonds de restitution» de 1.000 MDT. Ce fond, toujours selon le gouvernement Chahed, devra être financé en partenariat avec le secteur privé, qui devra y injecter 500 MDT. Le reste sera injecté par la CDC (Caisse des dépôts et consignation), ou autres, comme les Sicar. Le secteur privé pourra ainsi participer dans le capital des EP qui bénéficieront du Fonds de restitution, à hauteur de 49 %. Il sera donc actionnaire d’entreprises qui resteront entre les mains de l’Etat, après accord de la Carep (Commission de privatisation). Les EP seront ainsi partiellement privatisées. C’est en gros ce que propose Youssef Chahed. Reste à savoir si l’UGTT, qui a déjà levé son véto contre toute restructuration des EP sans son avis, accepte cela !

 

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