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Tout va mieux, Monsieur le Président, et motus et bouche cousue sur Marrakech

Le Conseil d’Administration de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) s’est réuni le 18 octobre 2023 et a passé en revue les récents développements économiques et financiers et les perspectives de l’inflation.

Dans le communiqué de presse qui avait suivi, mercredi, cette réunion qui se tenait pourtant après la participation d’une forte délégation tunisienne aux réunions à Marrakech du FMI et de la Banque Mondiale, il est bon de remarquer que le Conseil s’est  borné à dire que Marouane El Abassi, qui est le Gouverneur pour la Tunisie au FMI et à la BM, « a eu plusieurs réunions et des entrevues avec de hauts responsables des institutions financières et des investisseurs étrangers ».

  • Le motus assourdissant du Gouverneur, et de tout le CA de la BCT

Un commentaire de 18 mots, qui semblaient avoir été ajoutés à la hâte, et qui détonnaient, en tout cas, par rapport à presque tous les anciens communiqués des CA de la BCT se terminant par l’annonce sur l’évolution du taux directeur.

Rien n’a ainsi été dit sur la teneur de ces réunions, et rien n’a été précisé non plus sur les interlocuteurs d’El Abbassi lors de ces entretiens, dits dans l’indéfini, tant pour les bailleurs de fonds que pour les institutions, comme pour éviter simplement de les nommer et  comme pour dire (Suivez leur regard !) que le FMI, c’est fini.

Le tout, alors que la Tunisie s’apprête (théoriquement, qui sait ! Saïed pourrait aussi dire non), à recevoir le FMI dans le cadre de l’article IV. Une mission qui n’a aucun lien avec un quelconque prêt, mais une sorte de revue annuelle à laquelle sont astreints tous les pays membres du FMI, et la Tunisie en est un. Les dernières consultations au titre de cet article remontent au 8 décembre 2020 et s’étaient achevées par un communiqué de presse sorti en janvier 2021.

Mais peut-être que la BCT a préféré tenir sa langue sur ce sujet, après ce qui est arrivé à Samir Saïed, un autre Gouverneur pour la Tunisie chez la BM et le FMI, et qui a été le seul à parler de cette mission à Marrakech avec plus ou moins de détails. Et on sait ce que cette déclaration à l’agence Tap a coûté au « dernier des Mohicans ». On apprécierait presque l’absence de Samir Saïed à la cérémonie de passation de son ancien ministère à Sihem Nemsia, comme une dernière salve d’honneur d’un ministre libre, et réellement indépendant, qui tire sa révérence en silence. 

  • Absence d’explication pour les réserves en devises

Le reste du communiqué qui avait sanctionné hier la réunion du Conseil d’administration (CA) de la Banque centrale tunisienne (BCT), c’est un défilé d’indicateurs de la situation économique qui résonnaient comme un écho aux déclarations de la désormais super-ministre de l’Economie et des finances, et du budget économique de Sihem Nemsia, décrivant une économie en reprise forcée.

Tout va pour le mieux, semblait presque dire le dernier communiqué d’une BCT qui sait qu’elle devra financer directement le budget, où le crédit FMI n’existait plus en source de financement du budget 2024.

S’agissant du secteur extérieur, le CA a noté « une réduction notable du déficit courant qui s’est établi à 3.461 MDT (ou 2,2% du PIB), à fin septembre 2023, contre un déficit de 10.387 MDT (ou 7,2% du PIB) une année auparavant ».

Selon les éminents économistes membres du CA de la BCT, « cette atténuation porte la marque de la poursuite de la réduction du déficit commercial (FOB-FOB) qui s’est élevé au terme du mois de septembre 2023 à 11,6 milliards de dinars contre 17 milliards à fin septembre 2022. Également, la balance des opérations courantes a profité de la bonne performance des recettes touristiques et des revenus du travail. Cette dynamique a favorisé une consolidation des réserves de change, qui se sont élevées à 26,6 milliards de dinars (ou 119 jours d’importation), au 16 octobre 2023 contre 22,9 milliards à fin 2022 ». 

Un secteur touristique, pourtant, que la nouvelle loi de finance 2024 d’un gouvernement qui fait feu de tout bois pour financer son budget, leste de nouvelles taxes qui pourraient impacter son pouvoir concurrentiel. Pas portés sur la communication, autre que laconique et administrative, les administrateurs de la BCT n’ont pas non plus  jugé nécessaire d’expliquer les chiffres en dents de scie des réserves en devises, passés de 107 jours le 5 septembre, à 120 jours le 7 octobre, pour revenir à 119 jours le jour de leur communiqué (18 octobre), puis 117 jours selon les chiffres publiés sur le site de la BCT (18 octobre), alors que la Tunisie recevait, puis renvoyait 60 M€.

  • Un tout va mieux avec réserve

Et le CA de la BCT d’ajouter concernant les prix à la consommation, que l’inflation a poursuivi sa tendance baissière amorcée depuis le mois de mars 2023, pour s’établir à 9 % (en glissement annuel). Selon lui, cette évolution reflète la poursuite de la détente graduelle du rythme de progression de l’inflation sous-jacente hors produits alimentaires frais et produits à prix administrés (8,8% après 8,9% en août). Et les mêmes économistes du CA de la BCT de dire que « les récentes projections de la Banque centrale tablent sur une poursuite de la décélération graduelle de l’inflation, en 2023 voire au-delà ». Ils n’avaient manifestement pas encore lu le projet de la loi de finance 2024, et leurs projections ne semblaient pas tenir compte de mesures, telles que la taxe carbone qui impactera le coût de l’essence et augmentera son inflation et celle du transport, où les coûts pour le citoyen possédant une voiture, augmenteront sous l’effet du fonds spécial des transports urbains.

Le bilan de cette réunion du CA, certifié par les rédacteurs du communiqué, contenait cependant quelques réserves, avec un « Néanmoins » en fin de paragraphe, comme pour nuancer leur optimisme béat. « Plusieurs facteurs de risques inflationnistes resteraient actifs et pourraient entraver le processus désinflationniste. Ils pourraient dériver, notamment, d’une hausse excessive des prix internationaux et de l’accentuation du stress hydrique », signaient les membres du CA. Et de souligner, comme un dernier sursaut de real-économisme, « qu’en dépit de la résilience dont a fait preuve l’économie tunisienne ces dernières années, il est nécessaire d’accélérer le processus de mise en place des réformes, seule voie vers une reprise d’une croissance saine, durable et inclusive capable de préserver les équilibres globaux de l’économie ». Et pour cela, la super-ministre de l’Economie, de la planification et des finances est là !

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