AccueilLa UNETunis-Syphax Airlines : Les dessous d’une introduction en bourse.

Tunis-Syphax Airlines : Les dessous d’une introduction en bourse.

Le marché financier tunisien se prépare à l’introduction sur le marché alternatif de la bourse de Tunis, de 45,45% du capital de la société Syphax Airlines, après augmentation au prix de 10 dinars l’action. Cette opération se fera par le moyen d’une Offre à Prix Ferme de 1 250 000 actions représentant 50% du total des actions à émettre en numéraire, centralisée auprès de la Bourse des Valeurs Mobilières de Tunis, un Placement Garanti (conformément aux dispositions de l’article 56 nouveau du Règlement Général de la Bourse) auprès d’investisseurs étrangers locaux avertis agissant pour compte propre de 50 % du total des actions à émettre en numéraire. Le Placement Garanti sera réalisé aux mêmes conditions de prix que l’Offre à Prix Ferme. Les souscripteurs à ce placement s’engagent à ne pas céder 75% de leurs titres en Bourse pendant une période d’une année, à partir de la date de la première cotation. Nul doute que cette nouvelle introduction, apportera plus de profondeur au marché de la bourse et servira les petits épargnants à la recherche d’opportunités d’investir.

– Une société déficitaire et qui le restera pour les 3 prochaines années, et c’est normal.

L’entreprise du groupe de Mohamed Frikha est le dernier-né des opérateurs tunisiens dans le domaine du transport aérien et n’a qu’une année d’âge. Pour le 1er semestre 2012, Syphax Airlines a réalisé un chiffre d’affaires de 3,2 MDT et un déficit de 9,4 MDT. «Le chiffre d’affaires réalisé en 2012, provenant de l’activité Régulier, a dépassé les prévisions initiales de 9,4%, et ce suite à l’augmentation de la fréquence sur la ligne Tunis/Charles de Gaulle. De même, pour le chiffre d’affaires provenant de l’activité Charter, les réalisations ont dépassé les prévisions de 10,7% dues aux vols additionnels », pouvait-on lire dans le prospectus de cette introduction, publié sur le site du CMF.

On pouvait aussi y lire, que «les dépenses assistance commerciale de 2012 ont aussi dépassé les prévisions de 2012 de 19,6 %, cette hausse résulte de l’impact des charges Handling dans les aéroports Tunis-Carthage et Charles De Gaulle, suite à l’activation du quotidien Tunis/Paris et de la croissance de l’activité de la société. Les dépenses Catering de 2012 ont dépassé les prévisions de 2012 de 11,4 %, l’assistance et redevances aéroportuaires de 2012 ont dépassé les prévisions de 2012 respectivement de 23,7 % et 28,2%. Compte tenu du niveau d’activité, des charges d’exploitation ci-dessus mentionnées et de la phase de démarrage de la compagnie, Syphax Airlines dégagerait, durant les exercices 2012 et 2013, des résultats d’exploitation négatifs avec une nette amélioration d’une année à l’autre. A partir de 2014, le résultat d’exploitation deviendrait positif et continuerait à évoluer favorablement pour se stabiliser à près de 7,9% des revenus, à partir de 2015 avec près de 45 millions de dinars en 2016». On y ajoutera cette remarque de l’unique commissaire aux comptes (CC), que «suite aux pertes enregistrées au 30 juin 2012, les fonds propres de Syphax Airlines sont devenus en-deçà de la moitié du capital ». Mais aussi cette remarque que, «la situation fiscale de la société, mérite (ndlr : drôle de locution pour un CC) d’être régularisée. En effet, les impôts et taxes exigibles devraient être déclarés à temps» !

En théorie, et selon l’article 36 du RGB qui exige au moins deux années d’existence, l’entreprise n’aurait pas droit à la bourse. Le conseil d’administration de la BVMT lui accordera une dérogation, sans pour autant en expliquer les raisons. Nous avons pour ce faire contacté la BVMT, elle n’a pu nous fournir aucune explication !

– Où sont tous les avions déclarés par Mohamed Frikha ?

Entreprise de transport aérien, le business plan sur la base duquel l’entreprise du groupe Telnet se propose de faire sa levée de capitaux en bourse, s’appuie bien évidemment sur le développement de son activité à l’international. Le prospectus contient, d’ailleurs, une très belle image, montrant Syphax envahir (comme Tunisair !) le marché africain et les marchés asiatique et américain. Un ambitieux plan qui suppose des investissements assez lourds. Concernant ces investissements, le prospectus n’en dit pourtant que ces sept lignes : «La compagnie Syphax a prévu de réaliser des investissements corporels, incorporels et financiers pour un budget total de 89,152 MDT sur la période 2012-2017. En 2013, la compagnie a prévu d’investir dans l’achat d’un avion (ndlr : Le Falcon de Sakher El Materi pour 7,8 MUSD), l’aménagement de son Hangar, pour un montant global de 13,160 MDT, et la construction de son siège social pour 1,5 MDT. Plus de 34,162 millions de dinars seraient investis en 2014 pour la construction d’un hangar de maintenance dernière génération. Pour les investissements en immobilisations financières, ils seront de l’ordre de 32,526 MDT sous forme de deposits pour les avions loués et exploités sur la période 2012-2017». On se demande, alors, où sont passées les intentions d’investissements en avions notamment, déclarés par Mohamed Frikha, en janvier dernier au journal Le Temps et où il annonçait pour 2013, 2 A320 et 1 A330 ?

L’erreur de l’entreprise où le CA global dépasse les 100 % de son contenu !

C’est peut-être une erreur d’écriture, qui n’a pas été relevée même par les fins limiers du CMF qui ont obligation de passer le document du prospectus au crible fin tout comme la société d’intermédiation qui a fait et validé le prospectus, mais on remarque, selon le tableau ci-dessous, que la structure du chiffre d’affaires proposé, dépasse les 100 % de son total. En calculant les différentes recettes, on aboutit à un total de … 101,67 % !

– Un DG à 100.000 DT, ancien membre du CA de Tunisair et ancien ministre du transport !

Ces remarques ne sont malheureusement pas les seuls points noirs. Un point important reste la direction de Syphax Airlines qui ne semble pas respecter les lois en vigueur. La loi n° 98-33 du 23 mai 1998 modifiant et complétant quelques articles du code pénal, est claire. Il interdit aux fonctionnaires publics, même lorsqu’ils ont été mis en retraite, de diriger des entreprises privées exerçant dans le même secteur d’activité, avant l’expiration d’un délai de cinq ans depuis la cessation définitive de leurs fonctions. En face, il est stipulé, dans une publication officielle de la compagnie aérienne Syphax Airlines et relative à son introduction en bourse, que Salem Miladi est «administrateur délégué chargé de la direction générale». Miladi a été ministre du transport. Il y était entré en date du 1er juillet 2011 et en était sorti en décembre 2011 à la date d l’entrée en exercice du gouvernement de Hammadi Jbali. Il est aussi indiqué, dans le dernier communiqué de Syphax Airlines, que cette société a été constituée, le 27 septembre 2011, et que «Le 10 septembre 2011, le conseil national de l’aviation civile s’est réuni. Trois jours plus tard, le ministre du Transport a délivré l’accord de principe pour la création de la compagnie qui a eu lieu le 27 septembre 2011».

Il est donc clair et vérifiable que l’autorisation pour la création de la compagnie Syphax, sur la base du dossier présenté au ministère, a été signée par Salem Miladi qui en est devenu quelques mois plus tard le directeur général. Il est aussi, un fait, qu’à partir du mois de septembre et jusqu’à décembre 2011, Syphax était assujettie au contrôle du ministre du transport qu’était Salem Miladi.

A propos de cette remarque concernant la DG de Syphax, nous avons contacté la direction de la BVMT qui nous a dit qu’elle n’est pas habilitée à la relever. Le CMF, quant à lui, nous répond qu’il va «demander à Syphax de nommer un autre DG !».

Il est tout aussi important de signaler que, bien avant lui, un autre ancien ministre du transport avait travaillé chez une autre compagnie privée tunisienne. Bien plus important et bien que l’actuel ministre du transport le sache sciemment, d’anciens hauts cadres de son ministère travaillent actuellement chez la compagnie turque Tav Tunisie. D’autres hauts cadres de l’OACA aussi, mais cela ne semble déranger personne. Alors pourquoi pas Miladi, d’autant qu’il pourrait rendre d’éminents services à Syphax dans sa lutte face au reste de la flotte tunisienne.

Pour la petite histoire, enfin, «le conseil d’administration (de Syphax) a approuvé l’attribution d’une rémunération annuelle nette de 180 000 DT à Mohamed Frikha en sa qualité de PDG, et ce à compter du 1er janvier 2012. En outre, M. Frikha a droit à une couverture sociale ( régime indépendant), à une assurance groupe conformément aux procédures internes en vigueur, au remboursement de ses frais de représentation, de déplacement, de téléphone et de tous frais engagés pour le compte de la société. Le même CA a approuvé l’attribution d’une rémunération annuelle nette de 100 000 DT à Salem Miladi en sa qualité d’administrateur délégué chargé de la direction générale de la société, et ce à compter du 2 juillet 2012. On remarquera la date d’entrée en fonction de Miladi est du 5.10.2012. Il est donc payé, 3 mois avant son entrée en fonction.

M.B.K

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