AccueilLa UNEUn vote de confiance à l’issue indiscernable!

Un vote de confiance à l’issue indiscernable!

C’est assurément la première fois dans les annales parlementaires de la Tunisie pré et postrévolutionnaire qu’un gouvernement se trouve si peu assuré d’un vote de confiance. Celui formé par Habib Jemli, choisi par le mouvement Ennahdha, premier parti vainqueur des élections législatives, peine à arracher l’aval d’une ARP (Assemblée des représentants du peuple) dont la majorité ne lui semble pas acquise. Un hémicycle tiraillé entre le parti de Rached Ghannouchi et quelques alliés glanés çà et là, d’une part, et tous ceux qui sont décidés à arrêter net son poulain, de l’autre, dont le verdict pèsera de tout son poids sur l’avenir proche du pays alors que les défis de différents ordres mais d’égale gravité se conjuguent pour le maintenir perclus dans la crise.

Une revue d’effectifs, si aléatoire soit-elle, permet d’esquisser une tendance où les députés « Jemli-compatibles » ne tiennent pas la corde, ne pouvant compter que sur les 54 élus d’Ennahdha, auxquels s’ajoutent ceux difficilement comptabilisés de la Coalition Al-Karama, et quelques députés réfractaires qui pourraient venir à la rescousse sans pour autant pouvoir postuler à la barre des 109 voix . En tout cas, des conciliabules et des marchandages ont lieu à une cadence accélérée pour réunir ces suffrages. Sauf que, si ce plein est fait, le gouvernement ainsi concocté va devoir tenir face aux coups de boutoir d’une opposition remobilisée et unie dans une franche hostilité envers un attelage gouvernemental dont elle n’a pas une haute opinion, tout en n’étant pas  peu suspecte de lui planter des banderilles à chaque opportunité.

Un gouvernement estampillé « apartisan » !

On en a vu un avant-goût, ce vendredi, alors que le chef du gouvernement désigné et tout l’aréopage choisi par ses soins, compétent, honnête, apartisan, venus solliciter le feu vert d’un parlement dont des légions sont remontées contre la façon dont ce gouvernement a été constitué et plus encore contre l’empreinte qu’il porte des suites des « ingérences » d’Ennahdha. En témoigne le long récital de leurs catilinaires, le plus souvent virulentes, infligées davantage aux personnes choisies qu’aux orientations et au programme du gouvernement, faut-il le faire remarquer.

Pourtant, le chef du gouvernement désigné s’est égosillé à vanter «  l’intégrité, la compétence, la propreté de la main et la capacité de gestion et de réalisation [des membres de son équipe] dans l’unité, loin des considérations partisanes qui ne cadrent pas avec la conjoncture du pays ». Un gouvernement qui est «  le fruit d’un long et difficile marathon de concertations avec les principaux acteurs politiques et sociaux, et qui a exprimé son enthousiasme d’assumer pleinement sa responsabilité nationale et d’atteindre les objectifs escomptés ».

Habib Jemli  ne cache pas qu’il tire un point d’honneur de la création d’une charte d’honneur fixant les responsabilités des membres du gouvernement. Il a parlé dans ce sens d’une nouvelle démarche basée sur l’évaluation, le contrôle et la redevabilité de chaque membre du gouvernement, laquelle démarche, sera généralisée à toutes les institutions pour baliser le terrain à un « Etat de gouvernance politique responsable ». En vertu de la charte, chaque membre présente son programme détaillé au parlement, s’engage à le réaliser et dresse ensuite le bilan de son action.

« Nous n’avons d’autre choix que de réussir », a scandé le chef du gouvernement désigné, benoîtement rassuré par un pays qui «  recèle un important potentiel humain qui lui garantit les attributs de la réussite », a-t-il estimé, réitérant la détermination de la nouvelle équipe gouvernementale à œuvrer sans relâche pour réaliser la stabilité économique et sociale.

Hâter les réformes !

Face à une situation économique et financière difficile, il faut hâter les réformes dans un cadre protégeant les intérêts de la Tunisie et son peuple dont en premier, les catégories vulnérables, a-t-il préconisé, mettant en exergue le principe de la cohésion sociale. Jemli propose, dans ce sens, de renforcer l’intervention de l’Etat dans le domaine social. Il a suggéré la création d’un fonds social de lutte contre la pauvreté avec une contribution de l’Etat à hauteur de 200 millions de dinars. Il a soulevé le besoin pressant de réformer le système de la couverture sociale en assurant minimum d’intervention de l’Etat au profit des démunis. Jemli a aussi mis en avant la réforme du système de santé à travers notamment le renforcement de la santé de proximité, la médecine de famille et un meilleur déploiement des cadres médicaux dans les régions. Il a, également, souligné l’importance de la complémentarité entre les secteurs public et privé.

Dans le domaine économique, il a notamment évoqué le besoin de rétablir la confiance des investisseurs dans la Tunisie et du besoin de mettre en place un mécanisme qui permet au gouvernement d’approuver les grands projets d’investissement à travers des décrets gouvernementaux dans le but d’écourter les délais, insistant sur la nécessité d’améliorer la visibilité de la Tunisie auprès des investisseurs. Enfin, Habib Jemli suggère la création de centres de réflexion regroupant des experts dans différentes disciplines pour projeter la Tunisie 2050 et de les doter des moyens financiers nécessaires.

Le chef du gouvernement désigné sera-t-il entendu par un parlement divisé ? C’est le pari qui est le sien et celui du parti qui l’a missionné, en attendant que le verdict tombe à l’issue d’un marathon de plusieurs heures qui ne semble occuper, à défaut de les tenir en haleine, que quelques dizaines de personnes, celles qui meublent l’hémicycle du palais du Bardo. C’est tout dire !

Mohamed Lahmar

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