Mohamed Salah Ayari, conseiller fiscal et enseignant Universitaire a accordé à Africanmanager, une interview exclusive où il a dévoilé les grandes lignes du projet de la loi de finances 2019, les nouvelles orientations, les nouvelles mesures prévues dans le cadre de cette loi ainsi que l’ensemble des recommandations et propositions à prendre en considération à la lumière de la crise qui sévit dans le pays depuis plusieurs années. Interview:

Quelles sont les nouvelles orientations du P.L.F.2019 pour relancer l’économie ?

A priori et selon les déclarations du chef du gouvernement, la loi de finances pour l’année 2019 sera une loi de relance de l’économie.
Mais entre les promesses et la réalité, il y a toujours un fossé qu’il faut savoir anéantir.

Mais d’une façon générale, les mesures proposées peuvent être résumées comme suit :
– Instaurer un taux réduit de 10% en matière d’Impôt sur les sSociétés pour les secteurs productifs aussi bien selon le régime onshore que selon le régime offshore.
– Rétablir le dégrèvement fiscal physique qui concerne l’acquisition de nouveaux équipements ou les opérations d’extension dans les activités industrielles et touristiques afin de booster davantage l’investissement dans ces deux secteurs
Prévoir un nouveau mécanisme de financement pour les jeunes promoteurs afin de les encourager à réaliser leurs projets.
– Revoir l’imposition du secteur du bâtiment à la TVA au taux de 13% au titre des années 2018 et 2019 et au taux de 19% à partir de l’année 2020 dans le sens de l’allégement
– Mettre en application la mesure relative à l’instauration de la Banque des régions
– Revoir le mode de financement des PME avec la possibilité de les faire bénéficier du mécanisme de la bonification du taux d’intérêt

Est-ce qu’il y aura de nouvelles taxes par rapport à 2018 ?

Pour le moment, il serait très difficile de prévoir l’instauration de nouvelles taxes dans le code de la L.F.2019 par rapport à 2018.
Si le chef du gouvernement avait annoncé des mesures de relance de l’économie, il serait anodin d’envisager l’institution de nouvelles taxes qui vont à l’encontre de l’encouragement de l’investissement et à la création des nouveaux projets.

D’aucuns ertains soutiennent prétendent que le gouvernement aurait dû aller chercher de l’argent chez les fraudeurs et remettent sur le tapis la question de la réforme fiscale.Ne pensez-vous pas que la marge de manœuvre du gouvernement est très réduite, et qu’il a besoin de mobiliser des fonds dans l’immédiat et que la seule solution est finalement d’augmenter les impôts ?

Je demeure convaincu que la réforme fiscale dont les travaux ont été entamés depuis 2013 et ont été achevés en 2014, aurait dû être instaurée dans son ensemble depuis 2014.
La politique « de goutte à goutte » qui a été adoptée par les différents gouvernements successifs afin d’insérer quelques dispositions au niveau de chaque loi de finances n’a pas donné les résultats escomptés.
Mais aujourd’hui, et devant la pression sur les finances publiques  qui ne cesse de s’aggraver au fur et à mesure, le gouvernement se trouve entre l’enclume des salaires et des subventions d’une part, et le marteau du FMI qui exige la réalisation de certaines réformes douloureuses d’autre part.
Par conséquent, il est grand temps de mettre fin à la fuite en avant et d’envisager des solutions radicales afin d’arrêter cette hémorragie.
Le Programme Economique et Social  à l’horizon 2020 qui a été élaboré par le gouvernement et qui a été distribué à plusieurs partis politiques et aux organisations nationales peut être le prélude d’une vraie réforme structurelle qui touche tous les domaines, à condition de solliciter l’adhésion de toutes les forces vives du pays y compris les partis qui se trouvent dans l’opposition.

Pour sauver le pays, il faut que tout le monde s’y attelle et il faut accepter de faire des sacrifices pour des lendemains meilleurs.

Quelles sont les mesures qui peuvent être proposées afin d’améliorer le système fiscal actuel ?

Pour être précis, je dirais que la réforme fiscale a été entamée depuis 2013 et a été achevée fin 2014, tel que précisé ci-haut.
Par conséquent, le système fiscal tunisien ne peut être amélioré convenablement qu’à travers une vraie réforme fiscale profonde juste et équitable.
Mais et à titre indicatif, on peut proposer au niveau de la LF 2019 les mesures suivantes :

– La révision du régime forfaitaire d’impôt en matière de bénéfices industriels et commerciaux (BIC) afin d’amener environ 400.000 forfaitaires qui ne contribuent qu’à concurrence 28 MD par an, soit 70 D par an et par personne, à contribuer au paiement de l’impôt et ce, sans alourdir, outre mesure, leur charge contributive.

– Faire bénéficier les sociétés qui réalisent des investissements physiques du dégrèvement fiscal physique et ce, jusqu’à l’horizon 2020 afin de donner une certaine dynamique à l’économie nationale.

– L’allégement du taux de l’impôt sur les sociétés pour les PME afin de le réduire à 10%, à l’instar des sociétés exerçant les activités agricoles et de pêche, l’artisanat, l’exportation, ainsi que les sociétés installées les zones de développement régional.

– La suppression du plafond de 50% des bénéfices imposés au titre des provisions pour créances douteuses, pour dépréciation des stocks et pour dépréciation des titres, dans le but d’éviter le paiement de l’impôt sur des bénéfices fictifs qui n’ont pas été perçus réellement par les personnes concernées.

– Fixer une date butoir pour les services de contrôle fiscal lors de l’établissement de l’Arrêté de taxation d’office pour ne pas laisser le contribuable dans une situation perplexe en ce qui concerne la vérification fiscale dont il a fait l’objet, qui s’étale parfois à deux ou trois années.

Khadija Taboubi

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