Ressource des plus prometteuses, au plan économique, les déchets des métaux ferreux (ferrailles) et non ferreux (aluminium, cuivre, plomb, zinc, étain, laiton…), viennent d’être encadrés, en Tunisie, par de nouvelles dispositions dans le cadre de la loi de finances pour 2023.
L’article 35 de cette loi stipule l’extension de l’application de la taxe perçue sur les exportations de la ferraille et des déchets des métaux non ferreux aux entreprises industrielles totalement exportatrices, parallèlement aux entreprises opérant dans le domaine sous le régime du droit général qui y sont soumises
L’exposé des motifs a expliqué cette mesure par le souci de promouvoir davantage autant la valorisation de cette ressource représenté par les déchets des métaux et leur recyclage que les investissements locaux et étrangers dans la filière.
En effet, cette taxe destinée à alimenter la Caisse générale de compensation, ne s’appliquait pas aux déchets et rebuts générés par les entreprises industrielles totalement exportatrices.
Aussi, pour éviter la fuite de ferraille du marché local vers les déchets des entreprises totalement exportatrices d’une part et dans le but d’inciter les investisseurs étrangers et locaux à accroitre les investissements dans l’installation d’unités et d’équipements pour le recyclage et la valorisation des déchets générés par les entreprises totalement exportatrices, en les transformant en matières premières secondaires ou en produits semi finis et finis, il a été décidé d’étendre l’application de la dite taxe aux déchets générés par les entreprises industrielles totalement exportatrices, parallèlement à leurs homologues opérant sous le régime du droit général.
Toutefois, reste exemptée la réutilisation des déchets générés par les entreprises totalement exportatrices pour leur propre compte.
La filière de collecte, recyclage et valorisation des déchets des métaux ferreux et non ferreux est très ancienne en Tunisie, tandis que le volume de cette ressource a augmenté considérablement avec le développement de l’industrie tunisienne et la modernisation des modes de vie des tunisiens.
Dans une annonce publiée sur un site spécialisé, une société tunisienne spécialisée dans la collecte et l’exportation des déchets des métaux non ferreux, particulièrement l’aluminium, assure être capable de fournir à ses clients potentiels à travers le monde entre 200 et 400 tonnes de déchets par mois, soit environ 4000 tonnes par an.
Or, il existe de nombreuses entreprises opérant en Tunisie dans la filière de la collecte, du recyclage et de la valorisation des déchets des métaux ferreux et non ferreux, et beaucoup d’entre elles possèdent leurs propres sites sur l’Internet où elles présentent leurs produits et leurs activités. On peut en avoir une idée en consultant les sites d’annonces spécialisées, tels que Europages ou encore EspaceAgros.
Cette filière, très vieille et aussi ancienne que les humaines, sous toutes les formes, est aujourd’hui un des piliers de ce qu’on appelle « l’économie circulaire », c’est-à-dire une économie basée sur la réutilisation et la réintroduction des déchets industriels et autres , dans les processus de production et de consommation, après avoir été recyclés et valorisés.
Il s’agit de passer d’un modèle linéaire (extraire, fabriquer, jeter) à un modèle plus sobre et respectueux des ressources naturelles qui évite au maximum leur gaspillage.
Centre d’excellence
Cependant, dans de meilleures conditions, le gain peut être doublé. Ainsi, l’aluminium, un métal non ferreux, est recyclable à 100%.
L’aluminium secondaire, issu du recyclage, appelé aussi aluminium vert, permet de réaliser des économies d’énergie pouvant atteindre 90% de la production par rapport à l’aluminium primaire. Justement, la demande d’aluminium est croissante. Les matériaux classiques tels que l’acier sont remplacés par l’aluminium dans le but de réduire le poids et par la même la consommation d’énergie.
Les économistes du monde entier sont aujourd’hui unanimes autour de l’importance de la filière de transformation et valorisation des déchets appelée à devenir dans les prochaines années une industrie majeure productrice de matières premières issues de ce recyclage.
Justement, la Tunisie importe la plupart des matières premières dont elle a besoin, fer, et métaux non ferreux, de sorte que le recyclage des déchets des métaux avait toujours retenu l’attention des pouvoirs publics et des professionnels, afin de compenser par ce moyen l’indigence en matières premières vierges, par opposition aux matières premières secondaires produites par la filière de recyclage.
De nombreux rapports et des études très intéressantes dans ce sens ont été réalisés depuis plus de 40 ans.
Cependant, les experts ont noté qu’aucune feuille de route nationale n’a été mise en œuvre à cet effet, jusqu’à présent, contrairement aux pays développés et européens plus spécialement tels la France, dotés de plans nationaux de développement dans ce domaine.
Ils mettent l’accent sur la nécessité de consentir des efforts supplémentaires tous azimuts en faveur de la filière en Tunisie où, disent-ils, hormis les professionnels et les autorités concernées, les gens ignorent l’enjeu industriel hautement important des déchets des métaux et ont tendance à confiner le recyclage et la valorisation aux déchets ménagers et au plastique, ou encore à du bricolage.
Pourtant, la notion d’économie circulaire revient souvent, de nos jours, dans les discours des responsables.
Ainsi, la filière est source d’innovation technologique et de recherche pour le développement. En France, une des priorités dans ce domaine est la robotisation des centres de tri.
Outre le renforcement de l’indépendance nationale concernant l’approvisionnement en matières premières vierges, La Tunisie peut devenir un centre d’excellence dans cette filière en développant des capacités productives performantes.
Selon les rapports internationaux, la filière, grande génératrice d’emplois locaux, est, néanmoins, confrontée à de multiples défis techniques et technologiques : le développement du recyclage chimique, la robotisation des activités avec l’introduction de l’Intelligence Artificielle et l’utilisation de l’outil numérique, outre la question des prix des matières secondaires produites et plusieurs autres questions.
Aussi, les experts préconisent l’engagement de davantage de mesures d’encadrement, selon une vision futuriste globale, propres à reconvertir la filière de collecte, de recyclage et de valorisation des déchets des métaux, en Tunisie, une industrie performante, compétitive, génératrice d’emplois et respectueuse du cadre de vie.
S.B.H