AccueilLa UNETunisie : L'arme fatale, pour briser Ghannouchi

Tunisie : L’arme fatale, pour briser Ghannouchi

Si on était certain que le président de la République, Béji Caïd Essebsi, avait encore à 92 ans des envies d’en découdre en 2019, pour garder son fauteuil (pour quel projet, quelle ambition pour le pays ? Ça c’est un autre débat), alors on dirait sans l’ombre d’une hésitation que Bochra Belhaj Hmida lui a offert sa première arme pour la joute électorale de l’an prochain. Non pas que cette affaire, notamment la question de l’héritage, si elle va à son terme, lui garantirait automatiquement le retour des femmes qui avait été décisives en 2014, mais indéniablement la sortie du chef de l’Etat sème la panique dans le camp d’en face, Ennahdha et est porteuse des germes de la division. Cette incursion qui force les islamistes à se prononcer clairement sur la question, pour ou contre – pour le moment ils louvoient, mais ça ne pourra pas durer -, est sans doute la plus grande menace pour l’unité du mouvement que ce dernier ait connu ces dernières années, quoi qu’en disent des dirigeants qui tentent de faire bonne figure et émettent des signes d’absence totale de nervosité. D’ailleurs Rached Ghannouchi l’a bien compris et se refuse à répondre à l’invitation de BCE : Dévoiler publiquement les griefs de ses compagnons contre le travail de la Colibe (Commission des libertés individuelles et de l’égalité).

Le mariage de raison a du plomb dans l’aile

Jusqu’ici, à la faveur de la perche que lui avait tendue BCE en 2014 – pour monter la coalition -, Ennahdha a pu, avec un certain panache il faut le reconnaitre, passer entre les gouttes et éviter les pièges des grandes questions sociétales. Les islamistes n’ont jamais été pris en défaut sur les grands sujets de société où les gages de leur accord total avec les idéaux du progressisme et de la modernité étaient demandés. Ghannouchi et compagnie sont parvenus, à chaque fois que c’était nécessaire, d’opérer les replis tactiques qu’il fallait pour balayer les arguments de ceux qui se méfiant d’eux. C’est ce qui explique d’ailleurs que leur compagnonnage avec le président de la République se passe sans nuage jusqu’ici, à part peut-être l’épisode du projet de réconciliation économique et financière, où les islamistes avaient fini par faire des reculades, dans le sens du vent des levées de boucliers de l’opinion publique. Et bien il semble que ce mariage de raison commence à traverser des zones de turbulence…

Des fissures, des grosses

On a entendu dernièrement – on n’a pas rêvé ! – des leaders de premier plan tels que le député Mohamed et Ben Salem et Lotfi Zitoun s’étriper à cause du rapport explosif de la Colibe. Pas plus tard que ce week-end, l’ancien secrétaire général du mouvement et ancien chef de gouvernement Hamadi Jebali s’est fendu d’un post, sur sa page Facebook, pour défendre le sulfureux maire islamiste du Kram, Fathi Laayouni, qui refuse de marier les Tunisiennes avec des non musulmans. Jebali a fait ça alors qu’Ennahdha venait de se désolidariser de  Laayouni, avec des termes sans équivoque. L’ancien secrétaire général du mouvement, qui rappelle d’ailleurs souvent qu’il ne parle plus en son nom, a retrouvé sa liberté de parole et peut donc publiquement défendre ses idées, mais pas ses ex-amis, qui eux sont corsetés par la ligne du parti et s’astreignent à un silence qui est parfois une vraie torture, au nom de la sacro-sainte nécessité de ne pas briser l’entente cordiale avec Nidaa Tounes et de ne pas effrayer leurs électeurs les plus modérés et ceux qu’ils convoitent en 2019. Combien de temps encore avaleront-ils des couleuvres avant d’exploser, avant de se répandre, avant de soulager leur conscience ?

Jebali a certes, officiellement, largué ses potes mais depuis le temps qu’il fricote avec eux, il a fait des petits, enfanté de rejetons qui même s’ils ne se réclament pas de lui n’en épousent pas moins ses dogmes rigoristes qui l’avaient poussé à rêver tout haut d’un califat en Tunisie, un jour. Ces gens existent bel et bien au sein du mouvement, même minoritaires, aux côtés des disciples de Habib Ellouze et de Sadok Chourou, qu’on a priés d’aller voir ailleurs parce que trop « durs« , trop carrés, incapables d’arrondir les angles pour laisser glisser le projet politique de Ghannouchi. Ellouze et Chourou sont partis sans broncher, et on ne les entend plus depuis, mais leurs idées elles sont restées, tapies dans l’ombre, comme un Cheval de Troie qui un jour se cognera à la cuirasse que les théoriciens de l’islam politique ont fabriquée.

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