Wissem Heni, chef de projet à l’Institut de gouvernance des ressources naturelles (RGI) a appelé, dans une déclaration à Africanmanager, à accélérer la révision du code minier tout en se basant sur les résultats de la version 2017 du RGI, laquelle mesure la qualité de la gouvernance des ressources naturelles dans 81 pays et accorde un score faible au secteur minier en Tunisie avec 46/100, un score nettement inférieur à celui du secteur pétrolier tunisien (56/100).
Selon ses déclarations, le secteur des Mines demeure marginalisé et souffre depuis toujours de plusieurs insuffisances, faisant remarquer dans le même contexte que contrairement au secteur des hydrocarbures (pétrole et gaz) qui a connu depuis l’année 2014 une amélioration, le secteur des mines reste au ras des pâquerettes, et personne n’en parle, ni les autorités ni les médias, selon ses dires.
Il a imputé la mauvaise gestion et le manque de transparence dans le secteur des mines à l’absence de stratégie et de vision claire pour les prochaines années.
Le responsable a par ailleurs expliqué que dans le secteur des hydrocarbures les choses se sont améliorées suite à la publication des contrats pétroliers et le lancement d’un site web en la matière.
En effet, selon une étude récente réalisée par l’Institut en question, la différence entre la gouvernance des deux secteurs devient plus nette lorsqu’on voit leur classement ; le secteur miner était à la 48ème position sur un total de 89 tandis que le secteur des hydrocarbures était logé au 26ème rang sur 89. Les écarts de gouvernance entre les deux secteurs pour les différents éléments du RGI résident aussi bien dans toutes les composantes de la réalisation de la valeur (procédures d’attribution des titres, imposition, impact local et entreprises publiques) que pour celles liées à la gestion des revenus.
Ainsi, la réforme du système actuel prévue par le Code minier de manière prioritaire est la condition nécessaire à l’amélioration de la gouvernance dans le secteur minier tunisien. Le RGI a montré l’existence de certaines défaillances en matière de transparence et de redevabilité dans les aspects juridique et institutionnel du secteur minier, et il peut donc être une référence importante dans le processus de réforme du Code minier. À titre d’exemple, le RGI a accordé un score de 43/100 à la procédure d’octroi des titres miniers et, avec un tel score, la procédure est considérée comme médiocre en termes de gouvernance selon l’indice.
Le manque de transparence dans l’octroi des titres et des contrats miniers est un déficit majeur de gouvernance dans le secteur, comme identifié par le RGI.
Ainsi, le secteur minier tunisien est classé parmi les pires au monde en matière de transparence des règles d’octroi des titres miniers avec un score de 25/100.
Pour renforcer la transparence du secteur minier et du Code minier, l’étude souligne que le processus même d’amendement de ce code devrait aussi être un processus transparent, ouvert et inclusif. Il est important d’opter pour une approche participative dans la révision du Code à travers l’implication de la société civile et de soumettre le projet d’amendement à la consultation publique. Le NRGI entend participer au processus relatif à cet amendement à travers cette étude, laquelle met l’accent sur les volets de la transparence et de la gouvernance. Ces deux volets peuvent certainement contribuer à apaiser les tensions entre les parties prenantes, ce qui encouragera l’investissement dans le secteur minier, avec un climat propice et attractif basé sur des règles clairement définies.
Toujours selon l’étude, le système actuel d’octroi des permis comporte certaines insuffisances en matière de transparence. Ces lacunes proviennent de la complexité de la procédure, l’absence de règles claires d’interprétation, la consécration timide de la concurrence et l’opacité qui règne tout au long du processus.
L’étude a également évoqué la complexité de la procédure : étant donné que les procédures d’octroi des permis sont réparties entre plusieurs textes et qu’elles ne sont pas suffisamment détaillées, leur application et leur interprétation se basent sur la pratique habituelle.
Pour garantir l’instauration d’un contrôle parlementaire efficace, le NRGI appelle à faire référence à la nouvelle Constitution et notamment à l’article 13 dans l’article premier du Code minier, à modifier l’article 2 qui définit les titres miniers pour consacrer l’option choisie parmi celles susmentionnées relativement à l’interprétation de l’article 13 de la Constitution concernant les cahiers des charges.
S’agissant des recommandations, l’étude propose d’inclure dans le Code des mines des dispositions exigeant la publication des cahiers de charges et (le cas échéant) des contrats/conventions dans le journal officiel et sur le site Web du ministère. Ces dispositions serviront de base juridique des publications des contrats, dont le processus a été déjà initié par le ministère mais qui reste tributaire de la volonté politique des décideurs et non pas une obligation légale.
L’institut propose aussi d’ajouter dans l’article 12 la nécessité d’avoir l’avis conforme du CCM pour les conventions particulières ou contrats d’investissements, avant leur soumission au Parlement pour avis ou approbation.
Outre ces deux propositions, l’Institut indique également que pour assurer le développement durable et équitable du secteur, exiger un contrôle général sur le secteur et non pas seulement sur les contrats miniers, l’Assemblée nationale devra suivre les activités du secteur au-delà du processus d’octroi des concessions ou contrats. Cela pourrait se concrétiser par des audiences, l’envoi régulier de rapports tels que ceux susmentionnés, notamment sur l’avancement des projets, le statut des opérations en cours d’exploration et de production, et les problèmes de santé, de sécurité ou d’environnement.
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