La société AlKimia, où le groupe Chimique Tunisien (Entreprise publique) est le principal actionnaire avec 39,1 % aux côtés des groupes Doghri et Driss (Hichem notamment), a réalisé au 30.6.2023 un chiffre d’affaires de 61 561 217 DT contre 82 768 516 DT au 30.06.2022. A la même date, la société, qui a une dépendance organique avec l’entreprise publique qui contrôle le secteur des engrais, signait une perte sèche de plus de 15,322 MDT, en hausse de plus de 2,162 MDT par rapport au déficit de la même période de 2022. Un déficit, qui n’est plus qu’à quelques MDT du capital (19,472 MDT) d’une entreprise dont les capitaux propres avant affectation étaient négatifs de plus de 132 MDT à la mi- exercice 2023.
A fin 2023, la production d’AlKimia a baissé de 9.600 tonnes. Son chiffre d’affaires total, qui était de 164,319 MDT à la fin de l’exercice 2022, n’est plus que de 107,9 MDT. Et il ne serait pas exclu que le résultat pour tout l’exercice 2023 suive la même tendance.
- Les affaires, sans scrupules, du Groupe Chimique Tunisien
Pour la 1ère moitié exercice 2023, le management d’AlKimia explique l’augmentation du déficit, « par des arrêts prolongés par manque d’acide phosphorique et par les prix trop chers de l’ammoniac facturé par le Groupe Chimique Tunisien et nécessaire pour la production de MAPc ». L’actionnaire majoritaire ne fait manifestement pas montre d’états d’âme en affaires, quitte à mettre en danger l’investissement de l’argent du contribuable !
La production de la société Al-Kimia a beaucoup baissé au 30 Juin 2023. « Cette baisse de production est due principalement au manque d’acide phosphorique, ayant provoqué l’arrêt de nos usines », explique le management de l’entreprise.
Une instabilité des livraisons de l’acide phosphorique, dont souffre la société depuis plus de huit ans, et qui a été à l’origine de l’abandon du STPP par la plupart de ses importants clients et de son remplacement par d’autres produits de substitution ayant des prix moins chers et plus stables.
« En effet, le ralentissement de la production au premier semestre 2023 a non seulement assené le coup fatal à notre présence sur le Marché Mondial du STPP, de plus en plus restreint et de plus en plus compétitif, mais a également aggravé les difficultés financières de la Société et a mis à mal sa trésorerie, trésorerie qui est devenue l’unique moyen pour assurer la couverture bancaire des achats, auprès du Groupe Chimique Tunisien, des deux principales matières premières, l’acide phosphorique et l’ammoniac », déplore encore le management d’Al-Kimia.
- Le GCT public pénalise, par ses prix, l’actionnaire privé
Cependant, et même si les prix des matières premières, l’acide phosphorique et le carbonate de sodium notamment, ont enregistré des baisses durant ce premier semestre, le niveau atteint reste assez élevé et les coûts de production restent importants et ne permettent pas de faire revenir les clients d’Al-Kimia, qui sont encore hésitants, ne sachant pas si la baisse va perdurer ou pas.
Quant à l’Unité de production de MAP cristallisé soluble, mise en service le 1er juin 2021, elle n’a produit au premier semestre 2023 que 1.746 tonnes pour une capacité nominale de 25 mille tonnes par an, et ce en raison de la politique de prix pénalisante pratiquée par le Groupe Chimique Tunisien (CGT) pour la fourniture de l’ammoniac et de l’acide phosphorique. Une mise à mort irresponsable, et une sorte de fratricide entrepreneurial d’un pourtant exemplaire PPP (partenariat public-privé) par une entreprise publique qui ne se soucie manifestement que très peu de l’avenir de son investissement !
« En effet, les prix pratiqués par le Groupe Chimique Tunisien rendent non compétitif le MAPc fabriqué par la Société Chimique Al-Kimia. C’est la raison pour laquelle l’Unité de MAP soluble a été à l’arrêt pour plus de cinq mois durant le premier semestre 2023 », note le management d’Al-Kimia qui ne franchit pourtant pas le Rubicon de l’accusation.
La mise en œuvre de la première étape du Plan de restructuration de la Société a commencé à la suite de la décision de son Assemblée Générale Extraordinaire d’augmenter le capital de l’entreprise de 20 000 000 DT. Les souscriptions et le versement du premier quart relatif à cette augmentation ont été réalisés par les principaux actionnaires. Le retard pris par la réalisation de cette augmentation est dû aux longues procédures administratives, auxquelles le Groupe Chimique Tunisien est astreint pour la mise en œuvre de sa participation à ladite augmentation de Capital, permettant ainsi de la clôturer.
Mais peut-être que le GCP, dont le dernier bilan disponible sur son archaïque site Internet pour l’exercice de … 2014, appelle « Net Profit », ou bénéfice net, le chiffre de 9 MDT précédé d’un tiret pour signaler un déficit, semble plus concerné par son propre sort que de celui de ses partenaires !
Une augmentation de capital de 20 MDT a été décidée en 1ère étape d’un plan de restructuration plus large. Les souscriptions et le versement du premier quart relatif à cette augmentation ont été réalisés par les principaux actionnaires. Et c’est l’entreprise publique et 1er actionnaire Groupe Chimique, qui retarde cette levée de fonds salvatrice. Un retard, que le management explique par les longues procédures administratives, auxquelles le GCT est astreint. Un management qui met cependant les points sur les i, et déplore que « à ce jour, Al-Kimia rencontre toujours de grandes difficultés pour s’approvisionner en acide phosphorique, en quantité suffisante auprès du Groupe Chimique Tunisien qui, selon sa stratégie, donne la priorité à l’export, mettant ainsi en difficultés les entreprises locales qui revalorisent cette matière première en fabriquant d’autres produits finis destinés à l’export ». Et vive le PPP !