Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) ainsi que plusieurs composantes de la société civile ont exprimé, lundi 26 novembre 2018, leur refus de la visite en Tunisie du Prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane, prévue le 27 novembre courant.
Lors d’une conférence de presse organisée, lundi, au siège du SNJT à Tunis, Soukaina Abdessamad, membre du bureau exécutif du syndicat, a critiqué la position de la Tunisie favorable à cette visite mais aussi ses positions concernant notamment le crime commis au sein du consulat saoudien en Turquie, en allusion à l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi ou les crimes de guerre au Yémen.
Abdessamad a, par ailleurs, annoncé que le syndicat a déposé une plainte auprès du procureur de la République pour dénoncer cette visite, ajoutant que le SNJT compte participer à tous les mouvements de protestation qui seront organisés contre cette visite, notamment celui programmé ce lundi soir et mardi matin devant le Théâtre municipal.
« Non à la visite du criminel de guerre et non au fait que la Tunisie soit une opportunité pour se laver du sang de ses forfaits contre le peuple yéménite et des violations aux droits de l’Homme« , a-t-elle souligné.
Elle a, cependant, précisé que le syndicat ne demande pas le boycott de la visite mais exige des journalistes qu’ils affrontent le prince héritier et l’intimident devant l’opinion publique internationale.
De son côté, Neila Zoghlami, membre de l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), a condamné l’accueil de la Tunisie « aux transgresseurs des droits de l’Homme, des journalistes et des enfants malgré l’adoption d’un ensemble de lois et de conventions internationales contre ces pratiques« .
Elle a, dans ce contexte, appelé toutes les composantes de la société civile à rejoindre les mouvements de protestation contre cette visite.
Pour sa part, Béchir Kédiri, de l’Association tunisienne des jeunes avocats (ATJA), a fait remarquer que les plaintes déposées par les différentes parties et organisations réclamant de poursuivre en justice Mohammed Ben Salmane « ne sont autres qu’une position symbolique pour rappeler que la loi tunisienne interdit de telles pratiques« .
La société civile exige que le gouvernement tunisien et le président de la République aient la même position que celle du peuple, a-t-il affirmé, soulignant la nécessité de trouver une solution pour annuler la visite du Prince héritier saoudien.
De son côté, le directeur exécutif de la Fédération des directeurs de journaux (FTDJ), Mohamed Laroussi Ben Saleh, a indiqué que depuis le déclenchement de l’affaire Jamal Khashoggi, l’ambassade de l’Arabie saoudite et le Centre culturel saoudien se sont désabonnés des journaux tunisiens. De ce fait, a-t-il dit, la Fédération des directeurs de journaux a décidé à son tour d’annuler tous les abonnements auprès des ambassades.
Au cours de la conférence de presse, l’accent a été mis sur la nécessité de révéler la vérité sur le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. Pour les participants à la rencontre de presse, cette visite porte préjudice à la Tunisie et coïncide avec la poursuite de l’offensive militaire conduite par l’Arabie saoudite au Yémen.
Les participants ont également critiqué la participation de la Tunisie à l’exercice militaire conjoint entre l’Armée de l’air de la Tunisie et de l’Arabie saoudite, soulignant la nécessité pour la Tunisie de se désolidariser avec la coalition sous le commandement de l’Arabie saoudite et de ne pas s’aligner inconditionnellement sur la position de ce pays hostile aux libertés et impliqué dans des actes de violations flagrantes aux droits humains.
Notons que le SNJT a reçu plus tôt dans la journée un message de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) dans lequel il soutient la réaction de la société civile et de l’opinion publique s’opposant à la visite attendue du Prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane, en Tunisie et dont lecture a été donnée au début de la conférence de presse.
Dans ce message, le comité exécutif de la FIJ a indiqué avoir mis l’accent, lors de sa réunion la semaine dernière, sur la nécessité de révéler la vérité sur ce crime et de punir tous les responsables aussi bien les commanditaires que les exécutants.
Des rassemblements sont prévus ce soir et demain devant le théâtre municipal de la capitale pour dénoncer la visite du Prince héritier saoudien en Tunisie.
Ont participé à la conférence de presse, le SNJT, l’ATFD, l’AFTURD, la FTDJ, I Watch, FTDES, la LTDH, l’Union des diplômés chômeurs (UDS), le Réseau Doustourna, l’Association Vigilance pour la démocratie et l’Etat civique, l’UGET, le CTLP, l’OCTT et l’association tunisienne des jeunes avocats (ATJA).
TAP
Les journalistes tunisiens savent ce qu’est la vraie résistance contre l’obscurantisme. Leur mobilisation contre le prince héritier saoudien vaut tous les discours de politiques qui ne condamnent pas des agissements pourtant… largement condamnables. Beaucoup de journalistes qui vivent dans le luxe et le confort des pays tempérés n’ont pas la moelle des journalistes tunisiens. J’espère que MBS se souviendra longtemps de son passage en Tunisie pour des raisons qui lui déplaisent.