AccueilLa UNEQuelles « ardentes obligations » pour le gouvernement Fakhfakh ?

Quelles « ardentes obligations » pour le gouvernement Fakhfakh ?

Sans être dans le secret des dieux, il ne sera pas difficile de deviner de quoi va tourner l’argumentaire que le chef du gouvernement désigné, Elyès fakhfakh, va développer, mercredi, pour obtenir la confiance du parlement. Ce sera sans doute un plaidoyer pro domo qui justifierait le choix porté sur sa personne, mais surtout l’exposé d’un ensemble d’idées et d’orientations dont on ne pourra pas attendre des mesures claires, pertinentes et sentencieuses qui convaincraient les députés et à travers eux les Tunisiens que l’espoir n’est pas interdit de voir leur pays s’approcher du bout du tunnel.

Toutefois l’urgence lui commande d’esquisser au moins le cadre dans lequel il projette immanquablement de reconstruire l’économie chancelante du pays en essayant de dynamiser la croissance et de réduire la pauvreté à court terme tout en proposant des réformes audacieuses pour arrimer la Tunisie à l’économie mondiale, comme l’intention lui en est prêtée. Les diverses industries, notamment l’aéronautique, la chimie et le textile, les ressources naturelles clés, telles que les phosphates, le pétrole et le gaz, et le secteur touristique en plein essor pourraient être les secteurs dont on serait en droit d’attendre les premiers résultats tangibles.

Cependant, les experts, cités par The Arab Weekly, estiment que le prochain chef du gouvernement aura fort à faire pour mener à bien son programme, alors qu’il s’efforce de maintenir la cohésion d’un cabinet de coalition fragile qui comprend des partenaires aux visions économiques disparates. Le mouvement islamiste Ennahdha, par exemple, qui constitue une part importante du gouvernement proposé, soutient le libéralisme économique, tandis que le mouvement nationaliste Echaab préconise des politiques de dirigisme économique de l’État.

Finances publiques et FMI

Mais le défi immédiat du gouvernement sera de stabiliser les finances publiques et d’entretenir de bonnes relations avec le Fonds monétaire international (FMI) afin de maintenir l’ouverture des marchés financiers. Une approche dictée par les indicateurs économiques de la Tunisie sont mitigés. Si le déficit budgétaire a légèrement diminué et l’inflation s’est ralentie, le chômage, en particulier chez les jeunes, reste élevé et les emprunts à l’étranger continuent de miner le budget.

Les chiffres officiels montrent que le déficit budgétaire de la Tunisie s’est amélioré, passant de 4,6 % en 2018 à 3,9 % en 2019, mais le déficit des comptes courants – 10 % du PIB en 2019 – devrait rester à peu près le même cette année. L’inflation devrait ralentir, passant de 7,1 % en 2019 à 6,7 % cette année et 6,1 % en 2021, malgré la politique de resserrement monétaire de la Banque centrale de Tunisie depuis 2017, avec des taux d’intérêt en hausse. Le taux de chômage est un autre sujet de préoccupation, oscillant autour de 15 % en 2019 et atteignant 34 % pour les jeunes Tunisiens. Le PIB réel était au plus bas à 1 % en 2019 mais devrait rebondir à 2,1 % en 2020 et 2,6 % en 2021. Toutefois, la reprise pourrait être ralentie si une sécheresse imminente a des répercussions négatives sur l’agriculture et si les troubles sociaux dans la région de Gafsa, productrice de phosphates, réduisent la production.

Les dépenses publiques ont augmenté en flèche depuis 2011, la priorité étant donnée à la consommation plutôt qu’à l’investissement ou aux dépenses en capital. Ces dépenses ont été principalement financées par des emprunts étrangers, ce qui a entraîné l’accumulation de la dette du pays. Selon les économistes cités par la même source, il est urgent de s’attaquer au problème de la dette en raison des risques qu’elle comporte. Ils ont rappelé les chiffres indiquant que la dette publique a explosé, passant de 40 % du PIB en 2010 à 73 % l’année dernière. Alors que le déficit budgétaire s’est creusé, ceux de la balance des paiements ont augmenté, ont-ils dit, poussant le pays à dépendre encore plus de la dette extérieure.

Si ces tendances se poursuivent, le remboursement de la dette dépassera les dépenses d’investissement public, de services et de programmes sociaux, tandis que le risque de dévaluation de la monnaie et d’inflation galopante nuira aux conditions de vie déjà détériorées de nombreux Tunisiens.

Les contraintes majeures de Fakhfakh

D’après les experts, les marchés des capitaux étrangers pourraient pousser la Tunisie à prendre des mesures de réforme douloureuses, y compris des mesures de réduction budgétaire. Le niveau d’endettement de la Tunisie, associé à une politique monétaire expansionniste, n’a pas permis de stimuler de forts taux de croissance, même pendant la période 2017-19 où le pays jouissait d’une sécurité relativement stable. Ils font remarquer que la corruption généralisée et l’économie informelle non contrôlée ont nui au climat des affaires et ont mis en cause les efforts du gouvernement pour préserver le consensus politique au lieu de pousser à des réformes de grande envergure pour prolonger le problème.

En ce qui concerne l’avenir, les économistes ont déclaré que la nécessité de maintenir le consensus politique et l’aversion pour les réformes douloureuses sont des contraintes majeures pour le Fakhfakh, dans un contexte de lutte pour le pouvoir entre le président tunisien Kais Saied et le président du parlement Rached Ghannouchi, qui est également président d’Ennahdha.

L’économiste Ezzedine Belarbi a déclaré qu’une solution pourrait loger dans des révisions constitutionnelles qui permettraient à un nouveau système de gouvernement d’avoir plus d’autorité pour mettre en œuvre des initiatives et des réformes audacieuses. « Deux circonstances exceptionnelles pourraient déclencher l’accélération de la transition actuelle : la révision des principes de la constitution et la mise en œuvre de réformes structurelles qui nécessitent l’urgence de la stabilisation macroéconomique et la sauvegarde de bonnes relations avec le FMI et la Banque mondiale ainsi qu’avec d’autres partenaires financiers et techniques », a-t-il souligné déclaré Ezzedine.

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