AccueilLa UNETunis : «Tais-toi quand tu parles» de ce que vous ne connaissez...

Tunis : «Tais-toi quand tu parles» de ce que vous ne connaissez pas Monsieur le chef du gouvernement !

Mercredi 6 janvier, le chef du gouvernement tunisien célébrait le 55è anniversaire de la l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP). Il en profite, certainement en clin d’œil à son chef de cabinet qui a été son PDG, pour faire remarquer que son geste est «un signe de reconnaissance à la place de choix qu’occupe la TAP».

  • Essid chasse en dehors de ses terres

Père fouettard à l’égard d’une presse tunisienne qui ne l’a pas toujours ménagé, Essid se mue en un donneur de leçons à une presse qu’il n’a que très rarement affrontée, sauf par le biais d’une poignée de journalistes choisis parmi les fidèles. Il souligne d’abord, comme pour mettre les choses dans un cadre de responsabilisation, «l’importance du rôle et de la responsabilité qu’assument les médias -au cours de cette période transitoire de l’histoire de la Tunisie dans l’éclairage de l’opinion publique et l’élucidation des vérités et des données, loin des rumeurs nuisant à la scène médiatique tout entière». Un ange passe, les ailes pleines de menaces, dirait l’écrivain de romans policiers Gérard de Villiers.

Quittant ses habits d’ingénieur agricole (cf. son CV), il endosse ceux de l’universitaire qu’il n’a jamais été, pour conseiller aux journalistes de «s’enquérir de la source dans la recherche de l’information et sur le devoir de la traiter avec précaution s’agissant notamment du domaine sécuritaire et dans la couverture des opérations entreprises par les différentes unités sécuritaires et militaires dans leur lutte contre le terrorisme ». Il leur rappelle même que  «les médias ont fait l’objet de nombreuses critiques quant à leur couverture des faits terroristes » et les exhorte à «prendre conscience de l’importance de l’information et de son traitement pour éclairer l’opinion publique et servir l’intérêt général».

  • Réponse du berger à la bergère

Journaliste moi-même depuis 1980 (Ouiiii, je suis un Zelm si vous voulez!) et ne me satisfaisant pas de la réponse du syndicat (SNJT), je vais me permettre de répondre au chef du gouvernement. D’abord, pour lui proposer de «nettoyer à commencer devant sa porte». Chercher de l’information par les voies officielle est une véritable galère  en Tunisie, malgré la constitutionnalisation de l’accès à l’information. Je vais même le défier en demandant qu’il nous donne lui-même tous les détails sur le fonds géré par la CNSS au profit du gouvernement depuis 1975 et de nous fournir le détail des dépenses de ce fonds. On pourrait aussi lui demander d’ordonner la publication de la totalité des rapports de la Cour des Comptes, celle de la Cour de répression financière et au moins le dernier rapport des équipes du CGF (Contrôle général des finances) au ministère des finances. On verra alors si «le professeur» nous laissera accéder à ces informations !

Quant aux informations publiées par les collègues journalistes sur les affaires policières ou de terrorisme en cours, je me permettrais de dire une nouvelle fois au chef du gouvernement et ancien responsable du ministère de l’Intérieur, de nettoyer devant sa porte. Si c’est information ont été publiées, c’est qu’il y a d’abord quelqu’un qui les a données à cette presse dont l’essence du travail est de rechercher l’information et de la publier. La lui donner directement, aurait pu permettre de mieux la cadrer et de l’encadrer lui-même. La lui cacher, c’est comme lui fermer la porte qui le poussera à entrer par la fenêtre. Alors, Monsieur le chef du gouvernement, fermer d’abord bien vos portes et fenêtres avant d’accuser les journalistes de publier ce qui leur est caché !

  • Avez-vous connaissance de ce que l’Etat possède en matière de médias ?

Et toujours dans le domaine de l’accès à l’information, je vous cite cette réponse d’un ancien attaché de presse à un journaliste d’une radio publique : «Qui êtes-vous, d’abord » lui dit-il avant qu’on ne le retrouve plus tard parlant au micro d’une radio privée !

Quant à essayer de responsabiliser les Médias, il n’y a qu’à voir les sanctions prises contre certains d’entre eux et les dizaines sinon les centaines de plaintes déposées contre d’autres et presque jamais instruites contre les vrais «non-professionnels» !

Le SNJT disait dans sa réponse, à juste titre, que «Les gouvernements qui se sont succédé après la révolution, le gouvernement actuel en particulier, n’accordent aucun intérêt aux médias et n’ont entrepris  aucune initiative en direction de sa réforme, malgré les  sollicitations persistantes du syndicat ».

  • Allez voir ailleurs, Monsieur le chef du gouvernement!

J’ajouterais à l’intention du chef du gouvernement qui disait que les médias publics n’assurent pas le rôle qui leur est assigné en cette étape transitoire. Il a ajouté avoir  l’impression que les journalistes du secteur public «vivent sur une autre planète et non en Tunisie», phrase par ailleurs non reprise par le communiqué officiel publié sur la page fb de la Primature, que c’est plutôt vous, Monsieur le chef du gouvernement, qui vivez sur une autre planète. Savez-vous, par exemple, qui règne réellement à la Wataniya ? Savez-vous que vous avez un directeur général des Radios, un directeur de la Radio nationale et des Directeurs des Radios régionales qui exercent depuis plus d’une année sans qu’ils aient perçu les indemnités auxquelles ils ont droit ès qualités  ? Savez-vous que la radio publique, celle qui est financée par l’argent du contribuable, n’est plus écoutée au-delà  du Cap bon à cause de la faiblesse des ondes de diffusion alors que d’autres radios privées sont captées sur la bande FM sur tout le territoire de la République ? Vos médias radiophoniques  publics ont le taux d’écoute les plus bas et cela les rend inintéressants pour les annonceurs, même publics. Connaissez-vous réellement les situations financières des journaux, pourtant publics, comme La Presse ou Assahafa et les conditions de travail et de vie de leurs journalistes ? Savez-vous que les journaux d’Assabah sont aussi des journaux publics ? Qu’avez-vous fait, depuis le début de votre mandat, pour toute cette presse publique ?

Vous demandiez , Monsieur le chef du gouvernement, aux journalistes de prendre exemple sur la scène internationale. Pourquoi ne le faites pas vous-même ? Vous apprendrez alors que c’est un groupe de 5 TV, 24 antennes régionales. Vous apprendrez aussi que France 24 est publique, que RFI ou France info le sont tout autant et sous la tutelle direct du Quai  d’Orsay. Des radios et des TV qui servent l’Etat qui ne les regarde pas comme les dernières de son patrimoine public.

Non,  vous ne le savez pas ou vous l’avez oublié, puisque vous ne vous rappelez de ces médias publics que lors d’interviews conduites par des journalistes qui ne sont pas de ces médias ou par des journalistes choisis par vos conseillers ! Non, Monsieur le chef du gouvernement, vous ne connaissez rien aux médias publics ! Alors évitez de parler de ce que vous ignorez et laissez les médias publics «se démerder » et vivoter comme ils peuvent.

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -