Il est des moments où la découverte de certaines réalisations de «l’ancienne Tunisie» en Afrique est un véritable baume au cœur. Chaque fois à la recherche d’un véhicule financier pouvant accompagner l’investissement tunisien et les exportateurs tunisiens sur l’Afrique, on oublie que la Tunisie en dispose depuis de longues années, à travers l’une des plus importantes banques publiques de la place, la STB (Société Tunisienne de Banque). Elle était présente au Sénégal à travers la BST (Banque tuniso-sénégalaise) et avait, malheureusement, cédé cette importante participation à la concurrence marocaine. La STB a pourtant gardé sa participation chez la nigérienne Sonibank, où le Tunisien Abdallah Ben Messaoud est DGA.
La Sonibank a été créée en août 1990, dans le cadre d’un partenariat Nigéro-Tunisien avec la banque tunisienne STB qui y détient 25% sur un capital de 12 milliards FCFA (53,4 MDT). Elle «occupe aujourd’hui la première place sur le marché bancaire nigérien et présente une situation financière saine dégageant des résultats en croissance d’une année à une autre, comme l’attestent ses bilans et états financiers», pouvait-on lire sur le site internet de la banque. Ce dernier n’est pas mis à jour, mais on y apprend qu’en 2014, le résultat net de cette banque tuniso-nigérienne était de 5,8 milliards de CFA (25.9 MDT) pour un PNB de 21 milliards FCA (93,450 MDT) et un total bilan de 232 milliards de FCFA (1,032 milliard DT). Notons que la Sonibank détient 23 % du marché bancaire nigérien et s’apprête à prendre pied au Bénin.
Rencontré par Africanmanager au Bénin où il était venu assister aux rencontres économiques entre hommes d’affaires tunisiens et béninois organisées par la TABC, le DGA de la STB-Sonibank, a déclaré ceci : «l’intention, pour la STB, d’augmenter sa participation à la Sonibank existe, mais sera faite de manière graduelle, tout en tenant compte de la culture africaine en la matière. Le capital est actuellement fermé entre un nombre restreint d’actionnaires. D’après les statuts, la vente d’actions reste dédiée aux actuels actionnaires. Nous comptons cependant, lorsque l’occasion se présentera, augmenter la part de la STB, jusqu’à 35 % dans une première phase et éventuellement 49% dans une seconde phase». La montée en puissance de la STB semble ainsi être une stratégie avérée selon Abdallah Ben Messaoud.
Mais le Deputy Managing Director de la Sonibank n’a pas parlé que de la stratégie de l’actionnaire tunisien. Selon lui la Sonibank «veut désormais se convertir en banque de groupe et la 1ère implantation, en concrétisation de cette stratégie, sera dans la capitale béninoise, Cotonou. Cette nouvelle agence ouvrira le 25 janvier 2018». Honneur à l’un de ses fondateurs, «la Sonibank aura essentiellement pour cible l’accompagnement des opérateurs tunisiens en Afrique, y compris le Bénin, ainsi que la communauté nigérienne installée au Bénin qui compte déjà 1,2 millions de personnes opérant notamment dans le commerce international, entre le Bénin, le Nigéria et le Niger», indique-t-il.
Ben Messaoud n’en oublie pas pour autant la cible tunisienne, en hommes d’affaires et opérateurs économiques, qui viennent au Niger. «Ils sont bien accueillis et bien financés, comme s’ils étaient à la STB», nous dit-il, avant de préciser que sa «banque finance actuellement des opérateurs tunisiens en Afrique, dans le secteur des BTP, de la santé, les services avec de grands bureaux d’études tunisiens installés au Niger et financés par la Sonibank ainsi que d’autres groupes tunisiens de renommée», que Messaoud ne citera pas pour ne pas éveiller la concurrence.
Le DGA tunisien de la Sonibank, au nom de la STB, se laisse pourtant aller un peu à la confidence, pour nous indiquer : «nous avons actuellement un groupe tunisien qui réalise une route de 127 kilomètres. Un projet qui requiert une caution de marché, des avances sur le marché et tous les besoins de trésorerie, sont accordés par notre banque».
Et lorsque nous lui demandons si la STB-Sonibank serait prête à financer des hommes d’affaires tunisien, en amont, pour des affaires en Afrique, Ben Messaoud assure aussi que «la banque est prête à financer toutes les opportunités commerciales, réelles et effectives», une affirmation qui donne la preuve qu’il existe bien, et depuis de longues années, un véhicule financier proprement tunisien, capable d’accompagner toute présence tunisienne en Afrique. Un véhicule cependant peu médiatisé auprès des milieux d’affaires tunisiens désireux de commercer ou d’investir en Afrique, et qui a jeté nombre d’entre eux dans les bras de la concurrence marocaine.
Rencontré au Bénin, l’un d’eux et pas des moindres nous a d’ailleurs affirmé ne pas connaitre l’existence de la STB en Afrique et s’est montré disposé à y délocaliser toutes ses affaires africaines !
Reste à la STB de mieux communiquer à propos de cette présence financière africaine, à l’heure où commence à prendre forme la stratégie commerciale tunisienne sur l’Afrique. Reste aussi, aux hommes d’affaires, de se doter d’un peu de nationalisme, pour suivre l’exemple de l’homme d’affaires tunisien dont nous parlions et qui a décidé de transférer toutes ses affaires africaines vers la STB-Sonibank.