AccueilLa UNETunisie-UE : Chahed accepte le marché de dupes de l’ALECA sans broncher

Tunisie-UE : Chahed accepte le marché de dupes de l’ALECA sans broncher

Youssef Chahed est depuis deux jours en tournée européenne et nul ne sait pourquoi, puisqu’il ne l’a pas dévoilé lui-même. Mises à part les photos et les vidéos sur sa page, les annonces politiquement correctes d’un soutien européen qui serait indéfectible, d’un contingent supplémentaire d’huile d’olive à exporter et des Hollandais qui ne seront plus interdits de voyage en Tunisie, on ne comprend toujours pas ce qu’il était allé chercher sur le vieux continent. Et on est tenté de penser qu’il n’y avait pas de quoi faire un plat … tunisien !

  • Ouverture tous azimut à une Europe qui restera fermée

On va donc prendre pour guide les thèmes qu’il a développés lors de son discours, ou séance d’échanges, au Parlement européen. Sur l’ALECA par exemple, le chef du gouvernement tunisien semblait avoir accepté telle quelle, même s’il avait demandé «l’asymétrie et la progressivité», l’ouverture complète du marché tunisien aux produits européens. Il n’a ainsi pas parlé de la mobilité, malgré une question bien précise à ce sujet d’une des députés présents, qui demandait plus de visas pour les Tunisiens. Et c’est justement le silence, aussi bien du chef du gouvernement que des Européens, sur cette question essentielle pour un vrai partenariat, qui fait de l’ALECA un véritable marché de dupes. «Nous avons demandé un quota supplémentaire en huile d’olive, mais nous ne le mettons pas en donnant-donnant contre l’ALECA», avait dit Youssef Chahed devant le Parlement Européen avec le sourire gêné de celui qui savait très bien ce qu’il disait.

La Tunisie s’ouvre complètement et dans tous les secteurs, dont l’agriculture et les services, à l’Europe. Cette dernière restera fermée à tous les Tunisiens qui voudraient prospecter et vendre leurs services ou y exercer un métier de services. Idem pour l’agriculture, où les produits européens restent hautement compensés, en face d’une agriculture tunisienne à peine soutenue et qui a même du mal à vendre localement ses produits à prix convenables. Pour toute réponse, Youssef Chahed se contente de rappeler aux Européens qu’ils doivent nous ménager, procéder progressivement pour ne pas nous faire trop mal, «car nous restons un pays en développement» dit-il. Une députée européenne l’interpelle sur cette question de l’agriculture. Il ne répondra pas.

Comme pour l’ALECA, le chef du gouvernement accepte sans broncher aussi l’Open Sky. «La Tunisie a fait beaucoup d’efforts pour le signer. Je crois que la balle est dans le camp européen», dit-il avec un léger sourire. Il oubliait pourtant que sa compagnie nationale de transport aérien est loin, très loin, d’être prête, surtout que l’Etat propriétaire lui refuse toute assistance et la laisse péricliter, sourd au cri d’alarme d’Elyes Mnakbi qui disait en novembre dernier que «l’Open Sky est la faillite de Tunisair».

  • Il leur parle du FMI, ils lui parlent de Sihem Ben Sedrine

Suivant toujours le guide du discours du chef du gouvernement devant le Parlement européen, on comprendrait qu’il était venu demander l’aide pour un pays obsédé par les augmentations et pas amateur du travail, et commence son discours par les relations FMI-Banque Mondiale. «Nous avons eu une revue très positive en mars dernier. Une autre revue est en cours pour le mois de juin et je pense que nous serons en mesure de confirmer les engagements sur les principales réformes. En cours, celle des Caisses, celle des entreprises publique et celle de la fonction publique et la caisse de compensation ».

Préférant certainement laver son linge sale en famille, Youssef Chahed oublie de parler de l’UGTT et sa campagne anti-réformes et s’attarde encore sur le FMI, avec lequel l’accord conditionne aussi l’aide européenne. «C’est un accord FMI un peu pressant pour la Tunisie, mais nous nous sommes engagés à le faire et nous allons le faire», tente-t-il de les tranquilliser. Se rappelant, peut-être, que même le FMI est pressé de voir son débiteur faire ce qu’il faut pour rester capable de le rembourser, il demande que «il ne faut cependant pas que les contraintes du FMI ralentissent la croissance et cassent le retour de cette croissance que nous sommes en train d’observer».

Et lorsqu’il évoque le manque de communication avec l’Union Européenne, l’ambassadeur qui était à ses côtés, et qui quelques secondes plus tôt se massait l’œil d’un doigt, se penche en avant, pose ses bras sur la table et hoche la tête, comme s’il se sentait concerné par les propos, ou dirions-nous, les reproches indirects du chef du gouvernement, qui ajoute : «nous pouvons valoriser encore plus ce qui est en train d’être fait. On peut trouver des outils pour mieux vulgariser l’aide européenne». Et lorsque Chahed passe à un autre sujet, l’ambassadeur prend un verre d’eau comme pour se dire «Ouf !»

Les députés européens le mettront un peu mal à l’aise sur le sujet de l’IVD, jusqu’à l’obliger à sortir du silence qu’il s’est imposé en tant que chef de gouvernement, sur un dossier entre les mains de son patron BCE. Il dira d’abord que «ce processus [Ndlr : de la justice transitionnelle] a été, je dirais, mal conduit sur les sept dernières années, par plusieurs actions probablement mal coordonnées (…). Ce n’est pas parce que l’IVD s’arrêtera le 31 mai que cela signifierait la fin de la justice transitionnelle en Tunisie». Il ne donnera, à ce sujet, aucune autre explication. Rappelé par une autre question sur le même sujet, il préfère rejeter la patate chaude et précise que «l’arrêt [Ndlr : du mandat de l’IVD] a été décidé par les députés et je pense que s’ils en ont décidé ainsi, c’est parce qu’ils pensent qu’elle a dévié de sa fonction principale». L’ambassadeur lui tend une petite feuille et YC ajoute que «tous les dossiers, les résultats et les recommandations ont été transmis à la justice pour traiter l’ensemble de ces cas».

On s’étonnera enfin que le chef du gouvernement ne connaisse manifestement rien sur la question du Carbonne et donc de l’énergie verte, lorsqu’un député espagnol lui pose une question. «Sur la question du Carbonne, je ne saurais vous répondre, c’est une question très compliquée» dit-il avec un sourire gêné. L’ambassadeur lui souffle alors qu’il va répondre au député. Le président de l’Assemblée européenne lui sauve enfin la mise, lorsqu’on l’entend interpeller le député espagnol en Anglais par un «This Is not the Tunisian Parlement» ou [Ndlr : Traduisez : Ici ce n’est pas le Parlement Tunisien]. Et Chahed, qui ne comprend pas l’allusion du président de la séance aux questions facétieuses et sans respect du temps accordé des députés de l’ARP tunisienne, marque un petit temps d’hésitation par un «Euh …» et passe !

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