AccueilMondeAffaire Khashoggi : l'enquête de l'ONU accable les autorités saoudiennes

Affaire Khashoggi : l’enquête de l’ONU accable les autorités saoudiennes

L’assassinat de Jamal Khashoggi est la violation la plus grave du plus fondamental de tous les droits, le droit à la vie, a déclaré jeudi la Rapporteure spéciale des Nations Unies à la tête d’une enquête indépendante sur l’assassinat du journaliste saoudien.

Editorialiste au Washington Post, M. Khashoggi a disparu le 2 octobre 2018 après être entré au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, en Turquie. 17 jours plus tard, l’Arabie saoudite a confirmé la mort du journaliste dans son enceinte diplomatique.

« Les preuves réunies au cours de ma mission en Turquie montrent clairement que M. Khashoggi a été victime d’un meurtre brutal et prémédité, planifié et perpétré par des responsables de l’État saoudien », a déclaré Agnès Callamard, la Rapporteure spéciale des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires qui mène une enquête internationale indépendante sur la mort du journaliste.

« L’assassinat de Jamal Khashoggi et sa brutalité ont apporté une tragédie irréversible à ses proches. Cela soulève également un certain nombre de répercussions internationales qui appellent l’attention urgente de la communauté internationale, y compris des Nations Unies », a dit Mme Callamard.

M. Khashoggi a été victime d’un meurtre brutal et prémédité, planifié et perpétré par des responsables de l’État saoudien.
– Agnès Callamard

Agnès Callamard s’est rendue à Ankara et à Istanbul accompagnée de la baronne Helena Kennedy, conseillère de la Reine (Royaume-Uni); du professeur Duarte Nuno Vieira, expert en criminalistique de l’Université de Coimbra (Portugal), et de Paul Johnston, enquêteur sur les homicides et les crimes graves. Les enquêtes de l’équipe se poursuivent.

« L’enquête sur les droits de l’homme que je me suis engagée à entreprendre est une étape nécessaire, parmi un certain nombre d’autres, vers la divulgation cruciale de la vérité et l’établissement de responsabilité formelle », a précisé Mme Callamard.

L’experte précise que, selon le cadre juridique international qui guide sa mission, son équipe se concentre sur les entités qui ont l’obligation d’enquêter sur la mort de M. Khashoggi, sur les entités qui ont participé à l’enquête, ainsi que sur leurs conclusions ou leurs évaluations.

Selon Mme Callamard, les efforts de la Turquie pour mener à bien de façon rapide, efficace, minutieuse, indépendante et impartiale des enquêtes transparentes – conformément au droit international – avaient été sérieusement entravées et sapées par l’Arabie saoudite.

« Un temps et un accès lamentablement insuffisants ont été accordés aux enquêteurs turcs pour mener un examen et une perquisition professionnelle et efficace sur le lieu du crime tel que requis par les normes internationales en matière d’enquête », a-t-elle déclaré.

Les circonstances de l’assassinat et la réaction des représentants de l’État à la suite de celui-ci peuvent être qualifiées ‘d’immunité pour l’impunité’.

Pour Mme Callamard, l’assassinat de M. Khashoggi est une violation du droit international et des règles fondamentales des relations internationales, y compris des exigences relatives à l’utilisation licite des missions diplomatiques. « Les garanties d’immunité n’ont jamais été conçues pour faciliter la commission d’un crime et exonérer ses auteurs de leur responsabilité pénale, ni pour dissimuler une violation du droit à la vie », a affirmé la Rapporteuse. « Les circonstances de l’assassinat et la réaction des représentants de l’État à la suite de celui-ci peuvent être qualifiées ‘d’immunité pour impunité’ », a-t-elle dénoncé.

La Rapporteure spéciale a indiqué que son équipe avait eu accès à certaines informations cruciales sur le meurtre de M. Khashoggi, y compris du matériel audio terrifiant et macabre obtenu et conservé par les services de renseignement turcs. Elle a précisé qu’ils n’étaient pas en mesure d’entreprendre un examen technique approfondi de ce matériel et qu’ils n’avaient pas eu l’occasion d’authentifier de manière indépendante le matériel audio.

Mme Callamard a déclaré que l’équipe n’était pas en mesure de mener d’autres enquêtes cruciales, en grande partie mais pas seulement, en raison des contraintes de temps. « Par exemple, nous n’avons pas pu rencontrer les enquêteurs qui ont travaillé sur l’affaire, tels que l’enquêteur en chef de la police et les spécialistes en criminalistique et du crime », a-t-elle déclaré, appelant les autorités à honorer rapidement leur engagement de fournir un accès aux informations et rapports médico-légaux, scientifiques et de police.

Un meurtre qui s’inscrit dans une d’une série d’assassinats de journalistes, de défenseurs des droits de l’homme et d’opposants

La Rapporteure spéciale a déclaré que l’assassinat de M. Khashoggi s’inscrivait dans le cadre d’une série d’assassinats de journalistes, d’autres défenseurs des droits de l’homme, de militants et d’opposants de divers régimes dans le monde.

« Fuir à l’étranger à la recherche de la sécurité est devenu de moins en moins une forme de protection fiable », a déclaré Agnès Callamard, appelant la communauté internationale à prendre une position forte et collective contre ces pratiques.

« J’ai l’intention de continuer à examiner les preuves dans les semaines à venir et à exhorter tous ceux qui ont une connaissance ou des renseignements sur ce qui s’est passé avant et après le meurtre de M. Khashoggi de nous les communiquer », a déclaré la Rapporteure spéciale.

Mme Callamard a remercié le gouvernement turc de son soutien à la visite et a appelé les autorités compétentes à rester engagées et à continuer de coopérer pleinement avec la mission.

Lors de sa mission en Turquie, l’équipe a rencontré les ministre des affaires étrangères et de la justice, le chef des services de renseignement turcs, le procureur en chef d’Istanbul et un certain nombre d’autres parties prenantes, notamment de la société civile et des médias.

Le rapport final d’Agnès Callamard doit être présenté au Conseil des droits de l’homme en juin 2019.  Il contiendra une série de recommandations, notamment en ce qui concerne la responsabilité pénale formelle, et leurs fondements en droit international.

NOTE :

Les rapporteurs spéciaux font partie de ce que l’on appelle les Procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les Procédures spéciales – qui rassemblent le plus grand groupe d’experts indépendants du système des droits de l’homme de l’ONU – est l’appellation générale donnée aux mécanismes indépendants d’établissement des faits et de surveillance du Conseil, qui traitent soit de la situation particulière de pays, soit de questions thématiques dans le monde entier. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire. Ils ne font pas partie du personnel des Nations Unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et siègent à titre individuel.

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