AccueilLa UNE« Fakhfakh-Pasqua », coup de Poker ou coup de colère ?

« Fakhfakh-Pasqua », coup de Poker ou coup de colère ?

Le chef du gouvernement tunisien change de tactique de communication, attaque et fait feu de tout bois. Alors que Maher Laroui, (dirigeant d’une des entreprises du chef du gouvernement évoquées dans les accusations de conflit d’intérêts) monte au créneau pour dénoncer une cabale de Chawki Tabib, président de l’Inlucc, qui conduirait une « enquête à charge », Elyes Fakhfakh prend les devants et décide d’opérer un prochain remaniement ministériel qui pourrait emporter tous les ministres d’Ennahdha dans son gouvernement. Une décision qui sonne comme des représailles.

Réagissant, en effet, le lundi 13 juillet 2020, à la conférence de presse d’Ennahdha qui annonçait le mandat donné à Rached Ghannouchi de commencer des négociations pour la formation d’un nouveau gouvernement, et peut-être rassuré par la position du chef de l’Etat qui expliquait qu’il n’y aura pas de négociation tant que Fakhfakh n’a pas démissionné ou a été démis, le chef du gouvernement tunisien publiait son communiqué-représailles.
Il y accuse notamment Ennahdha d’avoir rompu l’accord politique signé lors de la constitution du gouvernement, en appelant à « reconfigurer la scène gouvernementale (…) sous couvert de l’affaire de l’accusation gonflée de conflit d’intérêts pour tromper l’opinion politique (…) et en veillant à meubler une scène politique en crise et une politisation partisane et étroite des faits ». Et c’est par cet argumentaire qu’il finit par annoncer dans son communiqué, sa décision d’opérer un remaniement ministériel qui « corresponde aux intérêts supérieurs du pays, qui sera annoncé dans les prochains jours ».
Le chef du gouvernement ne l’a pas dit clairement, mais tout le monde a compris que ce remaniement devrait emporter tous les ministres d’Ennahdha. Ledit remaniement est annoncé « pour les prochains jours », disait le communiqué d’Elyes Fakhfakh. Réaction irréfléchie de quelqu’un qui n’avait encore aucun nom en tête, ou mûre décision d’un chef qui avait toutes les cartes en main et savait ce qu’il faisait, mais qui se donnait juste le temps de la concrétisation ?

A moins que cette annonce ne soit un poker-menteur, le chef du gouvernement ne pourra faire en tout cas son remaniement que de deux manières :
– Renvoyer les ministres visés, en déléguant leurs prérogatives à d’autres ministres de l’actuel gouvernement. C’est ce que faisait Youssef Chahed pour éviter le passage par le vote de l’ARP. Dans ce cas, il lui sera impossible d’élargir sa coalition par l’entrée d’éventuels nouveaux alliés comme Qalb Tounes ou le PDL d’Abir Moussi. Il ne pourraitpas, non plus, terminer son mandat dans le provisoire qui dure.
Véritable « tête de Turc », on pourrait aussi aisément imaginer qu’il reste ainsi (avec certains ministres par intérim) pour les quatre prochaines années.
– Faire remaniement en bonne et due forme, qui pourrait comprendre de nouvelles têtes, avec ou sans une redistribution de l’actuelle équipe. Il lui faudrait, dans ce cas, s’assurer les 109 voix nécessaires à leur passage à l’Oral de l’ARP.
Véritable tête dure, il pourrait aussi expliquer la Constitution comme il l’avait fait avec la loi sur le conflit d’intérêts, et refuser l’obligation de passer par l’ARP. Une obligation dont on ne trouverait nulle trace, sauf dans le règlement interne de l’ARP, un texte qui ne tiendrait pas la comparaison avec la Constitution, qui n’exige point ce passage en cas de remaniement ministériel. Montant, depuis lundi, haut ses chevaux, Elyes Fakhfakh pourrait en effet passer outre l’accord de l’ARP dont nombre de partis politiques se préparent par ailleurs à déposer le président Rached Ghannouchi. Depuis lundi, Elyes Fakhfakh est en effet en mode défi, et serait capable de tout.

Entretemps, l’affaire du conflit d’intérêts continue de se développer et se complique, avec un document fuité de l’Inlucc qui l’avait envoyé au président de l’ARP. Ce document contiendrait de nouvelles preuves contre les entreprises d’Elyes Fakhfakh qui confirmeraient le délit de conflit d’intérêts.
Maher Laroui fustige ce document en n’en dévoilant qu’une page sur sept, et évoque une « cabale de Chawki Tabib » contre son entreprise. De son côté, la Choura d’Ennahdha se réunit ce soir du mardi 14 juillet 2020, pour statuer sur la menace de remaniement de Fakhfakh [ar].
Et en attendant, le député Fethi Ayadi d’Ennahdha trouve que c’est à Fakhfakh de partir, et Mohamed Goumani annonce une prochaine motion de censure contre Fakhfakh. Qui ira au bout de sa logique sur cette table de Politique-Poker qui joue l’économie de tout un pays ?

Corse, et ancien ministre de l’Intérieur de France, Charles Pasqua aurait dit que « quand on est emmerdé par une affaire, il faut susciter une affaire dans l’affaire, et si nécessaire, une autre affaire dans l’affaire de l’affaire, jusqu’à ce que personne n’y comprenne plus rien ». Cette citation serait connue pour être le théorème de Pasqua. Fakhfakh en serait-il devenu adepte ?
Pour l’instant, c’est le parfait chaos, politique et économique, du Bardo à Carthage, en passant par la Kasbah, avec chacun son diablotin en poche, et chacun sa manière de voir les intérêts supérieurs de l’Etat !

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