AccueilLa UNETunisie : Des décisions qui auront une grosse incidence sur 2019

Tunisie : Des décisions qui auront une grosse incidence sur 2019

Deux faits politiques majeurs sont passés presque inaperçus ce week-end, même du côté des observateurs les plus avisés : Nidaa Tounes aura enfin son congrès électif (quand précisément ? Mystère pour le moment), pour en finir avec le provisoire qui dure et fait de gros dégâts ; Ennahdha jette l’éponge pour l’élection présidentielle. Ces deux annonces auraient sans doute eu plus de résonance si elles ne disputaient pas la partie avec les joies des retrouvailles autour du café, la chicha, les plats très copieux de la journée, etc. De toute façon à moins d’un grand cataclysme, rien ne pouvait détourner les Tunisiens des festivités de l’Aïd. Pourtant ces annonces portent en elles les germes de la reconfiguration de l’avenir politique du pays après le rendez-vous électoral de 2019. Le Congrès électif de Nidaa était attendu, très attendu même depuis la naissance du parti. Mais le contexte actuel, avec le problème HCE, lequel ne date pas d’aujourd’hui, a imposé cette échéance. 3 ans de direction provisoire, c’est plus que ce que peut s’autoriser un grand parti dans une démocratie qui se respecte. Quant au forfait du leader d’Ennahdha, Rached Ghannouchi (il n’a jamais clairement affiché ses intentions pour la présidentielle, mais personne n’est dupe), il était tout aussi attendu. Personne, à part lui peut-être, ne se faisait d’illusion sur ses chances de s’asseoir sur le fauteuil du palais de Carthage. Ses illusions à lui ont volé en éclats à la vue des sondages d’opinions, presque tous, des certitudes qui ont certainement été confirmées par ses propres enquêtes, mais qu’il se gardera bien d’ébruiter.

La fin d’un cycle ?

On a tout dit et écrit sur la capacité du fils du président de la République à faire le vide autour de lui au sein de la formation politique que son papa a bâtie. La débâcle, car c’en est bien une quoi qu’en disent les illuminés de Nidaa Tounes, des dernières municipales a été la dernière illustration du peu de talent de HCE à fédérer autour de lui, à manager ses troupes et encore plus à porter son parti vers la victoire, comme le fit son papa au scrutin de 2014, même si la majorité qui en découla ne fut pas assez confortable pour éviter au pays les déboires qu’il traine encore. Mais le directeur exécutif fait face à d’autres assauts qui sont plus embêtants pour sa personne, et la musique monte crescendo : Les critiques sur sa légitimité à rester encore à la tête du parti en l’absence d’une élection en bonne et due forme. Déjà que HCE est lourdement handicapé pour son absence de vernis politique, du fait qu’il n’a pas surtout un mandat électif, le ciment de toute carrière politique digne de ce nom. Nidaa Tounes ne pouvait pas prétendre raisonnablement défendre ses chances aux élections de 2019 en débarquant avec un tel schéma, un tel état de déliquescence avancée.

Le fils du chef de l’Etat avait lâché le mot sur l’organisation du tout premier congrès électif de son parti le 21 septembre 2017, mais depuis c’est silence de mort sur cette affaire, jusqu’à cette sortie du week-end dernier. Le plus important maintenant est de savoir ce qui va émaner de cette grand-messe. Si les opposants de HCE, nombreux dans le parti, fuient le combat, comme a pris la poudre d’escampette l’ancien secrétaire général Mohsen Marzouk, il y a des chances que l’actuel directeur exécutif ait son quitus pour cette fois un vrai mandat, le premier de sa petite carrière de politicien. Il serait certes mal élu, mais élu quand même, avec tous les dangers que son impopularité fait peser sur la survie du parti, en plus des dégâts déjà causés. HCE écarté, par une figure qu’on ne voit pas se dessiner pour le moment, il y a des chances que des déserteurs tels que Lazhar Akremi reviennent au bercail et que l’hémorragie de militants soit stoppée, ce que ne bouderait pas un Nidaa Tounes très mal en point.

Echec et mat

Ghannouchi candidat à la présidence de la République, on l’a vu venir avec le ravalement de façade (une dentition refaite de fond en comble, pour un sourire étincelant ; la cravate, même la couleur rose et surtout une nouvelle posture plus universaliste, plus moderniste, beaucoup moins axée sur le logiciel religieux). Ces changements ou virages, même feints, sont loin d’être anecdotiques, c’est au contraire une forte symbolique qui fait parfois la différence dans un rendez-vous où de toute façon il est impossible de mesurer la sincérité des uns et des autres, encore moins évaluer leur capacité réelle à tenir les promesses électorales. Alors c’est le paraître, l’impression qu’on dégage qui l’emportent. Et de ce point de vue Ghannouchi n’était pas mal, à coups de concessions que certains de ses amis, les durs, n’ont certainement pas appréciées. Mais pour le président d’Ennahdha l’essentiel était ailleurs : Il était dans cette mayonnaise qui pouvait donner corps à son rêve de s’asseoir sur le fauteuil de Habib Bourguiba. Mais voilà, la mayonnaise n’a jamais pris, pourtant ce n’est pas faute d’essayer, de se tordre le bras pour des compromis et même compromissions. Le dernier espoir était une entente avec Nidaa Tounes pour briguer la fonction suprême, mais il y a deux hics, qui freinent net : D’abord l’actuel locataire du palais de Carthage a des envies de rempiler en 2019 , en tout cas il ne dit pas clairement Non ; ensuite Abdelaziz Kotti, dirigeant de Nidaa Tounes, a fermé la porte à toute collusion pour installer Ghannouchi à Carthage.

Ennahdha n’a jamais eu de présidentiable, ni hier ni aujourd’hui. L’ancien chef de gouvernement Hamadi Jebali est sorti des bois il y a quelques mois pour tenter de vendre une candidature indépendante, en dehors de son mouvement qu’il sait repoussant pour une bonne partie des citoyens. Mais la ficelle était trop grosse, donc Jebali est vite rentré dans les bois. Alors les islamistes n’auront d’autre choix que d’adouber un autre candidat, vraisemblablement celui de l’allié de circonstance, Nidaa, même du bout des lèvres, cela suffira à faire d’eux des soutiens du futur président tout en étant des partenaires critiques, dans le sens du vent. Cette posture d’équilibriste est très payante pour les islamistes, l’essentiel étant de demeurer au coeur du pouvoir, que ce soit à l’ARP, au gouvernement et dans l’exécutif…

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -