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Tunisie : Les dessous du Pacte, pour leurs intérêts et contre la démocratie

« On nous cache tout, on nous dit rien. Plus on apprend plus on ne sait rien« , a dit le chanteur français Jacques Dutronc dans un de ses tubes. Le souci avec ces trois-là, c’est qu’ils ne cachent même plus, gorgés de certitudes, imbus d’eux-mêmes, dans un paysage politique sinistré où les borgnes sont rois et qui attend désespérément son sauveur, que Youssef Chahed n’a pas envie d’être. Ou a peur d’être. N’est pas Emmanuel Macron qui veut ! La dernière fois qu’on avait entendu parler des basses manœuvres de ce qu’il faut bien appeler une Troïka, c’était lors de l’élection du président de l’ISIE (Instance Supérieure Indépendante des Elections), à l’ARP. Le psychodrame avait duré et l’accouchement avait été incroyablement difficile. Mais voilà, il y avait les calculs, les arrière-pensées, chacun des protagonistes de cette triste affaire voulant s’assurer que le boss de l’ISIE serait acquis à sa cause. Mauvais point Nidaa Tounes, Ennahdha et l’UPL, mais ils n’en ont cure. De toutes les  façons, ce n’est pas la première couleuvre qu’ils font avaler à leurs électeurs, et ce ne sera pas la dernière. Ils ont fait leur petite cuisine et nous ont servi un président de l’ISIE. Ce dernier fait ce qu’il peut pour nous garantir sa neutralité et un ciel sans nuage sur son instance. Il devra convaincre. Mais ses mentors viennent de lui compliquer la tâche en tramant une sombre affaire de report des municipales, sans aucune explication qui tienne la route. Encore un coup fourré contre la démocratie…

De tous les partis, c’est sans doute Ennahdha, pour les raisons que l’on sait, qui est le mieux préparé pour le scrutin municipal. Et son chef de file, Rached Ghannouchi, claironnait partout qu’il n’était pas question d’ajourner ces élections une deuxième fois et que c’était même une ligne rouge. Alors que s’est-il passé pour qu’il tourne casaque en si peu de temps ? Il ne faut pas être devin pour comprendre que c’est Nidaa Tounes, ou plutôt son impréparation, qui est la cause de cette requête – le report des municipales – aussi saugrenue que périlleuse pour la transition politique que la Tunisie traîne comme un boulet. De toutes les  façons, cela ne peut pas venir de l’UPL (Union patriotique libre) car Ghannouchi & Co n’ont que faire de Slim Riahi & Co. C’est Nidaa qui compte aux yeux des nahdhaouis, mais attention, pour des raisons objectives, et pas pour les beaux yeux de son fondateur, le chef de l’Etat, Béji Caïd Essebsi, et encore moins ceux de son fils, Hafedh Caïd Essebsi, directeur exécutif du parti. Donc Ennahdha a fait une fleur au locataire du palais de Carthage en demandant, le plus officiellement du monde, le report des municipales, un geste stupéfiant qui provoque beaucoup de remous en ce moment dans les milieux politiques, rendant ce pays encore plus énigmatique et problématique, surtout aux yeux de ses soutiens étrangers. Mais ce n’est pas la seule largesse de Ghannouchi pour son « copain » BCE.

Il y a aussi cette élection législative partielle en Allemagne, laquelle d’ailleurs ne passionne pas les électeurs aux dernières nouvelles, et on les comprend. C’est une affaire cousue de fil blanc et qui a tout ce qu’il faut pour inspirer du dégoût aux citoyens, même ceux qui ont le devoir civique chevillé au corps. Ennahdha, dès le départ, a tué le suspense en faisant savoir qu’il n’allait pas mettre un candidat sur la voie de Nidaa Tounes, lui dégageant ainsi une voie royale. Les islamistes ne s’arrêtent pas là, ils appellent carrément à voter pour le candidat de Nidaa, et même mieux : 3 dirigeants du mouvement auraient battu campagne pour lui dans une mosquée, d’après le post sur Facebook d’une militante de Machrou Tounes ! Situation ubuesque, mais somme toute normale dans un pays où on foule au pied, de plus en plus, les règles élémentaires de la démocratie. Toutefois il ne faut pas s’y leurrer : Le grand gagnant dans cette affaire, c’est Ennahdha.

Chacun sa tambouille, et au diable la bienséance !

Les citoyens avaient fait leur choix aux législatives de 2014 : Exit la Troïka. Mais BCE n’a pas transformé l’essai et a opté pour le compagnonnage avec les islamistes, au motif qu’il lui faut une majorité costaude et fiable pour atteindre les objectifs de la révolution. Et fiables ils le sont les nahdhaouis ! Les députés godillots votent comme un seul homme, suivant scrupuleusement les consignes de leur état-major, les dirigeants ont une discipline quasi militaire, malgré quelques rebuffades par-ci par là, parfois juste pour amuser la galerie ou pour donner l’impression d’un mouvement qui vit, débat, bref un vrai parti démocratique. Et la divine surprise a été cette majorité qu’ils ont raflée au Parlement sans le moindre effort, juste en regardant Nidaa Tounes se vider de son sang (son bloc parlementaire a perdu presque 30 élus depuis 2014). Mais voilà, malgré ces succès, Ennahdha sait qu’il lui sera impossible de gouverner seul ce pays, l’opposition serait trop vive, de la même nature que celle qui les a éjectés du pouvoir après les assassinats politiques et les erreurs d’orientation économique majeures. Alors on se tape Nidaa Tounes, malgré le dégout que ce parti inspire à la frange radicale du mouvement islamiste – il ne faut pas se leurrer, ils sont là, tapis dans l’ombre. Mais Ennahdha sait aussi son chapeau, en attendant des jours meilleurs. Et puis qui sait, s’ils sont sages, BCE aidera peut-être Ghannouchi à s’asseoir sur le fauteuil du palais de Carthage, le rêve, pas secret du tout, du leader des islamistes et pour lequel il a consenti quelques « sacrifices », du genre costards qui brillent de mille feux et les cravates qu’il se farcit.

Quant à la machine de guerre de BCE, elle a perdu de sa superbe, elle est même un champ de ruines sous le brillant magistère du ténébreux HCE, sans doute le plus mystérieux des dirigeants politiques de la place. Celui qui ne sort de sa réserve qu’à de rares occasions, pour nous abreuver de ses lumières et de ses fulgurances intellectuelles, de préférence sur sa page Facebook, boudant ostensiblement les entretiens avec les journalistes de la télévision, et encore plus les débats avec les autres, soi-disant, ténors politiques. C’est pourtant avec eux qu’il aurait le plus de choses à dire, à nous dire. A moins qu’il n’ait pas grand chose à déballer. HCE, on le sait, n’a pas les talents, la verve et les qualités de son papa, alors il exerce là où il est le plus doué : il coupe les fortes têtes, toutes celles qui dépassent. Abdelaziz Kotti est bien revenu, après avoir claqué bruyamment la porte, mais il ne faut rien attendre de celui qui a ajouté le déshonneur au discrédit. Le fils de BCE, qui a une trouille bleue des électeurs, au point d’avoir reculé devant le test de la circonscription d’Allemagne, a in fine fait le vide autour de lui, s’ouvrant un boulevard vers le Congrès électif du parti, qu’il a manifestement réussi à faire reculer, une fois de plus, alors qu’il s’était engagé à l’organiser avant les municipales. Borhen Bsaies était venu, entre autres, pour fignoler ce rendez-vous. Lui aussi n’aura pas tenu parole. Entretemps HCE a fait ses calculs : Il serait dans de bien meilleures dispositions en convoquant le Congrès après les municipales, avec des maires qui lui auront préparé le terrain parce qu’ils lui devront leur désignation sur ses listes.

Enfin l’UPL, la météorite politique de la place, qui doit son installation fulgurante dans le paysage politique aux millions que Riahi a généreusement dégainés. Un pactole d’ailleurs, et c’est le moins… et le plus qu’on puisse en dire, aux origines douteuses et qui lui doivent ses nombreux déboires avec la justice. Hasard du calendrier, coïncidence, etc., le patron de l’UPL a fait un retour fracassant vers le Pacte de Carthage quand il avait tous les juges du pays – j’exagère un peu – à ses trousses. Il est vrai que quand on se drape avec le parti sorti vainqueur des législatives – Nidaa Tounes – et qui de fait a des pions partout, on est en bien meilleure posture pour échapper aux foudes de la justice. Ennahdha en sait quelque chose, lui qui est, pour le moment, à l’abri des grosses tuiles, pourtant les dossiers brûlants ne manquent pas ! Riahi, en faisant corps avec HCE et Ghannouchi, se paye le meilleur blindage contre les missiles des juges. Pour le plus grand malheur de la jeune démocratie.

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