Alors que toute la scène politique tunisienne grouillait de nouveau de palabres au sujet du sort du gouvernement de Youssef Chahed, ce dernier terminait la semaine en audience avec le chef de l’Etat, parlant de «la situation générale dans le pays et les derniers préparatifs pour le mois du Ramadan et la saison estivale touristique», selon le laconique communiqué du palais de Carthage.
Il faut dire que le mauvais résultat de Nidaa Tounes, le parti du chef du gouvernement tunisien, n’a pas contribué à faire taire les critiques quant à sa gestion et à ses résultats, bien au contraire. Ceci, même si les électeurs des Municipales 2018 ont mélangé les enjeux entre législatives et municipales et ont sanctionné tout le monde dans un «ni-ni» résonnant d’abstention.
Toujours est-il que la question du sort de Youssef Chahed et de son gouvernement revient au devant de l’actualité. Dada de Noureddine Taboubi qui n’avait arrêté sa campagne anti-GUN (gouvernement d’union national) que le temps de constater l’amer échec de son bras de fer avec Chahed sur la question des enseignants du secondaire, cette question redevient d’actualité, après les municipales et à une année des législatives et des présidentielles.
- BCE ferait-il d’une pierre deux coups ?
Il semblerait, croit-on savoir, que le chef de l’Etat entre les mains de qui se trouverait désormais le sort du chef du gouvernement, pourrait être tenté de faire d’une pierre deux coups et même plus. D’abord donner le coup d’envoi à la restructuration du parti politique qui l’a propulsé à Carthage. Une restructuration qui devient plus que nécessaire, vitale pour Nidaa Tounes afin de préserver ses chances de résistance à la prochaine vague d’élections, celle des législatives et celle de la présidentielle. Une restructuration qui devrait commencer par le retour en son sein de tous les enfants prodiges qui l’avaient quitté, depuis que Nidaa Tounes a été confié à BCE Jr. L’éloignement de ce dernier pourrait se faire, selon nos sources, à travers la nomination de Youssef Chahed à la tête de Nidaa, d’autant que l’actuel chef de gouvernement aurait gardé de bonnes relations avec tous les enfants prodiges et pourrait les convaincre de retourner au bercail, afin d’éviter que ne sombre le parti-mère, dont les fameuses fissures n’avaient pu donner naissance qu’à des formations politiques sans perspectives, tels qu’en font foi les résultats des municipales 2018.
Faisant ainsi, BCE pourrait contenter tous ceux qui avaient quitté Nidaa, à cause de leurs désaccords avec Hafedh Caïed Essebssi ou BCE Jr dont l’échec aux municipales a démontré le grave déficit de charisme et l’incapacité à rendre à Nidaa le pouvoir fédérateur de tous ceux qui sont contre les visées expansionnistes d’Ennahdha et lui redonner l’éclat des années d’après la révolution de 2011.
Avec Chahed à la tête de Nidaa en lieu et place de BCE Jr, le patriarche de Nidaa et chef de l’Etat qu’il est, contentera aussi tous, chez les partenaires sociaux et les partis politiques de l’opposition notamment, qui demandent le départ de Youssef Chahed et revendiquent un nouveau chef de gouvernement pour le nouveau Pacte, ou Document de Carthage, censé être la nouvelle feuille de route pour tout gouvernement.
- Chahed, entre élagage de son gouvernement et délestage
Un second scénario de sortie de crise politique serait aussi en voie de maturation chez le locataire de Carthage. C’est un scénario qui pourrait assurer la stabilité politique, quoiqu’aléatoire, dont a nécessairement besoin toute la scène politique pour se reconstruire après le tsunami des municipales qui a fait naître la nouvelle force politique des indépendants.
Un scénario aussi, qui pourrait lui permettre de caresser son actuel partenaire politique qu’est Ennahdha, en évitant d’évincer un Youssef Chahed contre le départ duquel s’est récemment prononcé le leader d’Ennahdha. Cela, tout en amadouant le courroux de l’UGTT contre lui, en lui accordant le minimum, c’est-à-dire un remaniement qui pourrait emporter un certain nombre d’actuels ministres, conseillers et secrétaires d’Etat.
L’exercice de délestage, couplé à un élagage, pourrait aussi être de nature à calmer certaines ardeurs et éviter de déstabiliser les relations du pays avec ses bailleurs de fonds et perturber le programme de réformes structurelles, qui reste une nécessité absolue, quels que soient le gouvernement ou le chef du gouvernement.