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Tunisie : Un « ami » très encombrant, mais puisqu’il vient avec plein de cadeaux…

Demain mardi 26 décembre 2017, le président de la République, Béji Caid Essebsi, aura un hôte très spécial : Recep Tayyip Erdoğan. Le président turc, auréolé de son nouveau statut de défenseur de la cause palestinienne, quand les président arabes se terrent dans leurs palais au luxe insolent, débarque en Tunisie à l’invitation, il faut tout de même le souligner, de BCE. L’histoire ne nous dit pas ce que le chef de l’Etat tunisien a fait exactement pour l’attirer au berceau du « printemps arabe », que Erdogan n’a certainement pas dû voir d’un bon oeil, lui dont les moeurs politiques s’éloignent du modèle démocratique tunisien, mais on est à peu près sûr que Essebsi a fait des pieds et des mains pour l’attirer ici. La chose n’a pas dû être aisée car si Erdogan sait que les autorités lui dérouleront le tapis rouge, il sait aussi qu’il ne pourra pas en demander autant à la société civile et aux organisations de défense des droits de l’Homme, qui font feu de tout bois depuis un fameux 14 janvier 2011. Et comme sur ce plan Erdogan est très loin de pouvoir montrer patte blanche – les Kurdes, ses opposants et les journalistes en savent quelque chose -, il y aura des étincelles dans l’air.

Le SNJT (Syndicat national des journalistes tunisiens) a mis ses habits de combat, et a promis de tout faire pour pourrir la visite de l’encombrant « ami » turc. Mais ne nous leurrons pas : Erdogan est un dur, un coriace, de la trempe de Vladimir Poutine, Kim Jong-un. Cette agitation à Tunis n’est pas une première pour lui, il s’y est préparé et y fera face. Et puis les autorités tunisiennes l’y aideront, elles qui tiennent enfin une occasion de converser directement et d’arracher des engagements fermes à l’un des responsables du déficit commercial qui affole le gouvernement, sans qu’il puisse faire quoi ce soit pour l’enrayer. Alors ce ne sont pas quelques cris des défenseurs des droits de l’Homme qui vont gâcher la fête, avec les accords que le président turc a amenés dans ses valises. La Tunisie a beau monter ses muscles devant les autorités émiraties, d’ailleurs de façon un peu puérile et irréfléchie quand on sait tout ce qu’elle a à perdre dans cette affaire, on le sait tous : Elle n’a pas les moyens de s’engager dans la voie que les moralisateurs publics (spécialistes auto-proclamés, pseudo-experts et autres commentateurs plus ou moins avisés) lui suggèrent. Alors oui : La contestation aura tous ses droits, car après tout on n’est pas dans une démocratie pour rien, mais la realpolitik – en l’occurrence l’économique – aussi aura ses droits, in fine.

Ce que Erdogan a laissé chez lui

On commençait à les oublier, l’actualité étant happée par d’autres sujets chauds (Jérusalem, Corée du Nord..), mais les purges d’Erdogan continuent de plus belle, au nom de sa prétendue lutte contre le « terrorisme« . Dans les faits, c’est un combat à mort contre le mouvement de son ennemi historique, Fethullah Gülen, qui aurait, selon Ankara, fomenté le coup d’état du 15 juillet 2016. Hier dimanche 24 décembre 2017, les autorités turques ont encore taillé dans les effectifs de l’enseignement et de l’armée. 2756 fonctionnaires de plus, accusés d’être acquis à la cause de Gülen, ont été limogés. Et bien que faisait Erdogan pendant ce temps ? Et bien il signait des contrats au Soudan, où Omar el-Béchir, un autre personnage peu recommandable qui a sur sa tête plusieurs mandats d’arrêt de la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, a multiplié les honneurs pour son invité.

Au total, près de 50.000 individus ont été placés derrière les barreaux et 150.000 autres éjectés de la fonction publique et du secteur privé depuis le dernier putsch raté. Le Premier ministre turc, Binali Yildirim, a fait savoir que 110.000 fonctionnaires allait être recrutées en 2018 pour résorber le trou créé par ces purges massives. Quelque 36.000 postes sont à prendre dans les services hospitaliers et 20.000 dans l’éducation, a indiqué Yildirim. Mais ce qu’il n’a pas dit c’est que les autorités vont sans nul doute s’assurer de l’allégeance à Erdogan avant toute nouvelle embauche.

Rappelons que le théologien Fethullah Gülen, qui s’est réfugié en Pennsylvanie, aux USA, depuis 1999, dément catégoriquement être derrière le coup d’état raté qui a couté la vie à quelque 240 personnes.

A chaque fois que le président russe, Vladimir Poutine ou le président chinois, Xi Jinping, bougent quelque part dans le monde, ils sont accueillis par un torrent de protestations, au nom de la défense des droits humains qu’ils piétinent au quotidien, il faut tout de même le souligner. Ce fut le cas lors de la dernière visite de Poutine en France, en mai 2017, et avant lui Jinping, en mars 2014. Mais cela n’a jamais empêché quelque signature de contrat que ce soit, après les leçons de morale d’usage des autorités, pour faire plaisir aux journalistes et activistes de la société civile, des tirades d’ailleurs de plus en plus discrètes et courtes. Le monde a changé, hélas, et la raison d’Etat – les contrats pour faire tourner la machine économique et faire manger les populations – a tendance à occulter les élans passionnels et passionnés pour la vertu, la morale, les droits des uns et des autres.

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