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ALECA : ils avaient caché cette note explosive d’un ami de la Tunisie

Ça fait un bail qu’on n’a rien vu ni entendu sur l’ALECA, pas même une once d’annonce sur cette affaire qui engage le devenir de la « petite » Tunisie, en tout cas beaucoup plus que l’autre partie, le mastodonte européen. Bon, on pourrait se dire que les acteurs de cette affaire sont en train de négocier, mais la réalité serait plutôt que l’exécutif tunisien traine les pieds, effrayé par les clameurs des citoyens et organisations nationales abondamment alimentées par les rapports terrifiants des experts, et pas peu. En face le partenaire le partenaire européen s’énerve et le fait savoir par son ambassadeur, Patrice Bergamini et l’émissaire de la France en Tunisie, Olivier Poivre d’Arvor. On en était là aux dernières nouvelles : le statu-quo, rien de concret, quoi qu’en disent les deux partenaires, qui tentent de faire bonne figure, de donner le change, en attendant je ne sais quoi. Par contre la sortie de Jean-Pierre Sueur, sénateur et président du groupe d’amitié Tunisie-France au Sénat français, est une petite bombe pour les Européens, qui ne tenaient pas à ce que certaines choses s’ébruitent, mais c’est une bonne surprise…

On a appris ce jeudi 22 août 2019 que le sénateur français a adressé, en mai 2019, un courrier au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, dans lequel il a exprimé sa crainte que l’ALECA ne se fasse en défaveur de la Tunisie. Poivre d’Arvor et Bergamini se sont bien gardés de nous parler de cette missive explosive, et on les comprend !
Dans un entretien avec l’agence TAP, le sénateur français explicite cette crainte et revient sur les effets néfastes que pourrait avoir l’ALECA, sur la pérennité des secteurs de l’agriculture et de la santé, s’il venait à être adopté sous sa forme actuelle.
Officiellement, les négociations sur l’ALECA sont actuellement gelées pour des raisons électorales. Leurs reprise est annoncée par les négociateurs tunisiens au cours du 1er trimestre 2020, avec les nouvelles équipes issues des élections en Tunisie et en Europe. Mais nul doute qu’entre temps les arguments de Sueur auront fait du chemin dans les têtes et ça ne manquera pas de blinder les positions du gouvernement tunisien.

Quand l’agence officielle tunisienne évoque ce courrier dans lequel le sénateur liste les effets négatifs de l’ALECA sur l’agriculture et l’alimentation en Tunisie, notamment la production céréalière et l’élevage, Sueur rétorque ceci : « Actuellement, la dépendance alimentaire de la Tunisie dépasse déjà les 55 %, et une grande partie des terres agricoles cultivables sont destinées aux marchés extérieurs. Avec l’ALECA, cette dynamique risque d’être renforcée avec la menace de réduction des productions de secteurs stratégiques, tels que les céréales et l’élevage. Pour être compétitive, l’agriculture tunisienne serait amenée à se spécialiser dans des secteurs moins essentiels. Le pays serait alors davantage exposé aux fluctuations des prix agricoles, ce qui entrainerait une instabilité des prix des produits de première nécessité, qui serait très préjudiciable« .

S’agissant des menaces sur le secteur de la santé et l’accès aux soins pour les citoyens tunisiens, le politicien français dit les choses suivantes : « Avec l’ALECA dans sa mouture actuelle, des cliniques européennes pourraient, très facilement, s’installer en Tunisie.
Pour les acteurs de la société civile tunisienne que j’ai pu rencontrer, cela risquerait de se traduire par une baisse de la qualité du secteur public et un renforcement des inégalités face à l’émergence d’un secteur privé, qui serait loin d’être accessible à tous les tunisiens.
Par ailleurs, cet accord prévoit d’allonger au-delà de 20 ans la protection des brevets sur les médicaments, ce qui reviendrait, in fine, à empêcher la commercialisation de génériques. Pourtant, les génériques produits en Tunisie qui sont accessibles à des prix raisonnables couvrent, aujourd’hui, 70 % des besoins de la population.
Freiner la production de génériques risque de se traduire par une forte augmentation des prix des médicaments et donc d’entraver l’accès à la santé pour tous ».

Maintenant l’épineux sujet de la mobilité des personnes et de l’attribution des visas, sur lequel l’Union européenne freine des quatre fers. Voilà ce qu’en pense le sénateur français : « Je suis effectivement, en faveur de la réciprocité en termes d’attribution des visas, en tant que condition nécessaire de partenariat égal. L’absence de visas ou à minima de procédures simples, claires et rapides, en vue de leur obtention pour tous les citoyens, me paraissent constituer des conditions fondamentales ».

Au sujet des recommandations pour éviter que la Tunisie soit vampirisée par l’UE, Jean Pierre Sueur a donné des conseils qui ne tomberont pas dans l’oreille de sourds du côté tunisien : « Les acteurs de la société civile tunisienne m’ont fait part de plusieurs revendications, que je partage. C’est ainsi qu’il est pour moi indispensable que cet accord, en cours de négociation, ne remette pas en cause la souveraineté alimentaire de la Tunisie et protège les petits agriculteurs.
Je pense qu’il faut être, en outre, très vigilant quant à l’introduction de mécanismes d’arbitrage qui permet aux investisseurs européens d’attaquer l’Etat tunisien, afin d’annuler des mesures d’intérêt général alors que l’inverse serait quasiment impossible. Cela pourrait se révéler très déséquilibré, au détriment des intérêts de la Tunisie ».

Il est d’avis par ailleurs que « la signature de l’accord imposerait l’harmonisation de l’agriculture tunisienne aux normes sanitaires et phytosanitaires européennes, alors même qu’elles ne sont pas aujourd’hui atteignables pour la majorité des producteurs tunisiens. Une période de transition serait, dans tous les cas, absolument nécessaire.
Enfin, la société civile tunisienne considère qu’un éventuel accord ne devra pas seulement être un accord commercial, mais qu’il doit constituer un véritable partenariat entre l’Europe et la Tunisie, pour que soit instaurée une solide coopération dans tous les domaines dont il traitera ».

S.L.

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1 COMMENTAIRE

  1. Il est certain que beaucoup d’éléments restent cachés dans ces négociations,et il ne faut pas en vouloir aux ambassadeurs étrangers (France et UE) qui ,eux défendent les intérêts de leurs pays,ils sont nommés pour cette mission,mais se demander que font les « négociateurs  » tunisiens devant cette armada réelle de vrais experts européens en commerce international et en économie ,généralement pour les intérêts de la Tunisie et de sa jeunesse.Tout en restant modeste,je rappellerai que j’ai soulevé et tiré la sonnette d’alarme sur les points développés par la note du Sénateur Sueur(sans en avoir pris connaissance) à savoir les céréales ,l »élevage et les génériques lors de mon passage à l’émission « Tounes Al Youm  » le 2 Mai 2019,avec Meriem Belkadhi et son équipe,émission au cours de laquelle j’ai fortement critiqué l’absence au sein de l’équipe de « négociation » tunisienne ,de compétences économiques nationales reconnues,comme les Professeurs Abdeljabbar Bsaies,
    Moncef Ben Slama, Afif Hendaoui,pour ne citer que ceux là,qui sont d’un calibre très élevé.Il semblerait que le « Décideur » des affaires économiques nationales ait voulu ,encore une fois,faire appel à des copains et des parents: on connait la suite !!!!
    Professeur Skander Ounaies

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