L’UTICA- Academy et la fondation Konrad Adenauer Stiftung ont organisé mardi 6 novembre 2018 une journée sur le thème «La participation du secteur privé au dialogue sur les relations Tunisie Europe» qui a vu la participation de plusieurs opérateurs économiques. L’accord ALECA, en négociation entre la Tunisie et l’Union Européenne, a été au centre des discussions qui ont fait suite à des exposés présentés par des experts qui ont présenté l’accord, ses implications et ses impacts sur les différents secteurs économiques et sur les démarches à adopter pour réussir les négociations en prenant en considération les spécificités de l’économie Tunisienne.
A l’ouverture de cette manifestation, M. Chiheb Slama, président de la fédération de l’agroalimentaire et coordinateur du dossier ALECA au sein de l’UTICA, a affirmé que l’Union Européenne, depuis l’accord de 1995, est un partenaire privilégié pour la Tunisie et que l’accord ALECA, en négociation entre les deux parties, revêt une très grande importance pour l’avenir de l’économie tunisienne. Il a rappelé que l’accord de 1995 et notamment le programme de mise à niveau ont rendu l’économie tunisienne plus performante.
L’ALECA est une suite logique de l’accord de 1995 a ajouté M. Slama, affirmant que ce nouvel accord doit notamment avoir pour objectif le renforcement du flux d’investissements vers la Tunisie et une amélioration de l’environnement réglementaire pour l’entreprise. Toutefois, a souligné M. Slama, il faut garantir que les produits qui seront importés dans le cadre de ce nouvel accord ne portent pas préjudice et ne déstabilisent pas la production nationale. Il est donc important de mener des études d’impact et de mettre à niveau notre réglementation.
Pour sa part M. Holger Dix, représentant de la Konrad Adenauer Stifung (KAS) à Tunis, a affirmé qu’après les deux premiers rounds de négociation, la Tunisie et l’Union européenne devront entamer le troisième tour de négociation. Il a ajouté que l’accord ALECA devrait être une opportunité pour la Tunisie et pour les entreprises des deux parties.
M. Jamel Ksibi, président de la fédération des BTP de l’UTICA, a abordé dans son intervention l’importance de mettre à niveau l’administration tunisienne, épine dorsale de l’économie nationale. Il a également mis l’accent sur la résilience du secteur privé tunisien malgré la crise que traverse le pays. Le marché du BTP est déjà libéralisé en Tunisie et représente 17% du PIB et 40% du budget de l’Etat. Il a affirmé que depuis 2014 les marchés publics tunisiens sont ouverts aux entreprises européennes, appelant à ne pas en exclure les entreprises tunisiennes. M. Mezghani a affirmé également que les entreprises tunisiennes dans le secteur TIC sont capables de concurrencer leurs homologues européennes.
Le temps presse!
La Tunisie est appelée à saisir rapidement l’opportunité qu’offre l’ALECA (Accord de libre échange complet et approfondi) avec l’Union européenne avant les élections européennes de 2019. Ces dernières pourraient amener à la commission européenne (CE) des responsables moins favorables à la Tunisie, a affirmé Ghazi Ben Ahmed, directeur du think tank MDI (Mediterranean Développement Initiative).
Pour cet ancien fonctionnaire de la CE, avec la montée de la droite dans plusieurs pays européens, le renouvellement du Parlement européen prévu en 2019 risque d’être préjudiciable à la Tunisie et partant à son prochain accord avec l’UE, lequel représente une opportunité de booster l’économie nationale après l’essoufflement du modèle de développement actuel.
Les négociations sont actuellement au statu quo, alors que l’économie tunisienne s’enfonce dans la morosité, avec la dévaluation du dinar et l’aggravation de la dette publique. Ce statu quo risque de différer les négociations de deux ans, en attendant les nouvelles configurations politiques en Europe et en Tunisie, où des élections sont également prévues en 2019, a souligné Ben Ahmed .
« L’Aleca pourrait apporter à l’économie tunisienne l’électrochoc dont elle a besoin, d’autant qu’il sera accompagné d’une aide budgétaire et au développement et d’une assistance technique« , a-t-il affirmé.
Durant les deux premiers rounds des négociations (2016-2018), la Tunisie s’est contentée de poser des questions à son partenaire sur le projet d’accord « proposé et non pas imposé » , a-t-il tenu à préciser.
La Tunisie, a dit l’ancien fonctionnaire de la CE, n’a pas sur les court et moyen termes une autre alternative, d’autant qu’elle ne dispose pas de stratégie avec d’autres groupements ou d’autres régions telles que l’Asie, ou même l’Afrique et ce contrairement à son concurrent direct, le Maroc, qui a développé sa stratégie africaine depuis 15 ans.
Pour Ben Ahmed, auteur d’un guide sur l’Aleca paru en Février 2018, « les thèses développées contre cet accord, par des acteurs de la société civile, n’ont pas l’intérêt national à cœur« . Il fait certainement allusion, entre autres, au FTDES, qui ne rate jamais une occasion de tirer copieusement sur cet accord, suscitant chez l’opinion publique une trouille bleue de cette affaire dont elle ne comprend pas toutes les ramifications et retombées.
La Tunisie est liée à l’UE, depuis 2012, par un accord de partenariat privilégié, qui est venu remplacer l’accord d’Association conclu en 1995. L’UE est le principal partenaire économique de la Tunisie, avec plus de 70% des échanges commerciaux du pays. La coopération entre les deux parties dans tous les domaines est estimée à environ 10 milliards d’euros (plus de 30 milliards de dinars), selon le commissaire européen à la Politique européenne de voisinage et aux négociations d’élargissement, Johannes Hahn.