L’assurance a toujours été un facteur de développement dans les pays avancés; Henry Ford, fondateur de la célèbre marque automobile Ford, n’avait-il pas dit : « New York n’est pas la création des hommes, mais celle des assureurs« .
Les assurances permettent en effet à l’entrepreneur de partager le risque, donc de mieux pouvoir l’affronter, à l’employé de mieux travailler sachant qu’il est assuré contre les accidents et les maladies, et par conséquent de participer substantiellement à l’effort de développement et de croissance des nations.
Les assurances agricoles ne font pas exception à la règle, une multitude de produits existe et qui ont pour objectif de réduire les risques liés à l’exploitation agricole. Ces risques sont multiples, on peut citer, sans être exhaustifs, la grêle, les incendies, la responsabilité civile, les risques liés au matériel agricole, aux chambres frigorifiques, la mortalité du bétail, sans oublier les assurances des corps de navires de pêche.
Ces types d’assurances, et bien plus, devraient être un moyen de développement du secteur en offrant aux agriculteurs une certaine protection contre les différents risques, protection susceptible d’amener ces agriculteurs à travailler plus, à innover et à oser, condition sine qua non de développement du secteur.
- Qu’en est-il en Tunisie ?
Au début du 20ème siècle et précisément en 1908, la première mutuelle agricole a vu le jour en Tunisie ; créée par les agriculteurs français, cette mutuelle avait pour objectif de couvrir les risques de grêle et de mortalité du bétail. En 1961, l’Etat tunisien a pris en main le système des assurances agricoles en créant la CTAMA (Caisse Tunisienne d’Assurances Mutuelles Agricoles).
Cependant, les assurances agricoles restent en deçà de ce qu’elles devraient être en termes de chiffre d’affaires. En effet, leur part dans le marché global des assurances n’est que de 3‰ (5.6 MD); comparé à la participation du secteur agricole au PIB national de 10%, il en ressort clairement que les réalisations sont très faibles.
Ce chiffre de 5.6 MD est réalisé à 55% par la CTAMA, le restant est partagé par cinq autres compagnies d’assurances. La couverture concerne principalement les céréales à 85%, suivies par les agrumes, 3.1% et les oliviers, 2.49%.
Parmi les 520.000 agriculteurs tunisiens, 8% uniquement sont couverts par les assurances agricoles. Ce faible pourcentage est dû à plusieurs facteurs dont notamment :
– Le morcellement des terres (75% des exploitants disposent de moins de 10hectares);
– Le coût relativement élevé des assurances.
Aussi, les agriculteurs ne sont pas très motivés à cause de la non-couverture de risques importants tels que les inondations et la sècheresse. En outre, une grande partie des agriculteurs ne sont pas très sensibles au rôle des assurances en tant que moyen performant de solidarité et de partage des risques qui sont l’essence même de l’assurance, notamment dans une compagnie mutuelle où les actionnaires sont eux-mêmes les assurés.
- Des solutions en vue ?
Certaines mesures ont déjà été prises depuis 2007, la CTAMA a réduit ses tarifs sur les produits grêle et incendie de récolte de 40% et sur la mortalité de bétail de 30%. Aussi, l’exonération de la taxe unique d’assurance a été généralisée et l’Etat prend en charge désormais les cotisations d’assurances au titre des prêts destinés au financement des campagnes des grandes cultures sur une période de trois ans.
Par ailleurs la loi des finances de 2018 a créé le fonds de garanti des calamités naturelles qui intervient en cas de catastrophes naturelles touchant les agriculteurs et les pêcheurs avec un plafond d’indemnisation de 60%. Ce fonds entrera en application cette année, il sera une solution importante pour la couverture des risques agricoles non encore couverts jusqu’à maintenant et permettre de booster le système d’assurances agricole en Tunisie.
Il est aussi recommandé de subventionner les primes des assurances agricoles classiques, cette subvention est pratiquée dans plusieurs pays. A titre d’exemple, elle est de 65% en France et de 45% en Espagne. Il apparait ainsi que la gestion des risques agricoles connait une intervention importante des pouvoirs publics, même dans les pays extrêmement libéraux.
Par ailleurs un partenariat public-privé peut contribuer à l’essor des assurances agricoles par la mise en place de contrats d’adhésion auprès des structures d’encadrement publiques, privées et syndicales. Les groupements professionnels, l’UTAP et les structures régionales du ministère de l’Agriculture peuvent jouer un rôle important dans ce sens.