AccueilLa UNELe casus belli, de BCE ou de Taboubi ?

Le casus belli, de BCE ou de Taboubi ?

Le syntagme a été prononcé par le chef de l’Etat tunisien Béji Caïed Essebssi (BCE) dans l’allocution qu’il avait prononcée au musée du Bardo où il célébrait la révolution. «Casus belli est une locution latine, signifiant littéralement «occasion de guerre», qui désigne un acte de nature à déclencher les hostilités entre deux États. Dans la plupart des cas, il peut s’agir de querelles de succession (…), d’atteintes physiques à la personne d’un ou de plusieurs ressortissants, d’aide à un mouvement terroriste ou factieux (…), d’attentat terroriste, de remise en cause d’engagements internationaux, etc. (…) Le motif réel d’une guerre, lorsqu’il n’est pas légitime, est souvent dissimulé derrière un casus belli factice. Des incidents de frontières, des événements violents fortuits, comme un assassinat politique ou un attentat, provoqués ou montés de toutes pièces (opérations dites sous fausse bannière) ont souvent été utilisés par les nations pour justifier, par la voie d’une propagande, leur initiative d’un conflit armé ouvert présentée comme une riposte nécessaire à l’encontre d’un pays tiers». Ça, c’est la définition de casus belli par l’encyclopédie Wikipédia. Décryptage :

  • «Et per causam belli dux civitatis»

Révolution, grève et «Jeudi noir» du 26 janvier 1978, ont été mêlés dans l’allocution de BCE. Concours de circonstances, simples paroles d’un chef d’Etat qui ne pouvait parler de révolution, car «j’étais chez moi», ou discours structuré d’un politicien qui savait très bien ce qu’il faisait ?

«La grève générale, pour les leaders d’opinion à l’étranger, est un casus belli. L’Etat n’est pas habitué à cela», disait ainsi BCE. Le chef de l’Etat qui n’oubliait manifestement toujours pas qu’il était toujours en fort différend avec son ex-poulain, ne se garde pas en tout cas de le griffer au passage, d’abord en prétendant que «on va faire un parti du gouvernement. Ceci retardera le processus démocratique» dont il avait dit, quelques secondes plus tôt, qu’il est encore en danger.

Ensuite, en rappelant le bilan de son poulain-ennemi, en le résumant ainsi : «En 2016, l’inflation était de 4,6 %. En 2017, elle est devenue 6,9 % et en 2018 elle est 7,5 % ». Il tempérait certes en ajoutant que «nous en sommes tous responsables», mais sans oublier de relancer l’objet principal de son allocution qu’était la grève du 17 janvier, dont il ne désespérait de faire son propre casus belli pour reprendre la main dans cet épineux dossier socioéconomique, dont il donnait déjà sa propre solution, sous la menace d’un autre «jeudi noir». «Il faut donc l’éviter par tous les moyens. Ils demandent l’augmentation des salaires. Moi je considère cela comme une demande qui n’a pas lieu d’être. Ce qu’il faut, c’est colmater la baisse du pouvoir d’achat (…). Il faut donc faire tout notre possible, pour ne pas nous retrouver dans des situations semblables au 26 janvier 1978, car sa catastrophe est plus grande que ce que nous aurions gagné en cédant à toutes les demandes (…). Il faut certes tenir compte de cela, mais en tenant compte aussi des possibilités du pays». La position de BCE sur la question de l’augmentation des salaires des fonctionnaires est ainsi publiquement annoncée pour ceux qui voudraient l’appeler à la rescousse.

En effet, le 19 janvier 2019, deux jours après la grève que l’UGTT présentait comme réussie, sans pourtant qu’elle ait servie à faire plier la position du chef du gouvernement sur son objet premier qui est l’augmentation salariale, le conseiller politique de BCE, Noureddine Ben Ticha, annonçait officiellement l’offre de médiation de son patron, entre Youssef Chahed et l’UGTT, «si cette dernière le lui demandait», avait précisé Ben Ticha.

  • Casus belli Taboubi

L’UGTT a déjà fait deux grèves générales en 2018. Elle prépare sa 3ème en quelques semaines, en montant d’un cran dans l’affrontement avec Youssef Chahed, par une grève générale de 2 jours successifs les 20 et 21 février 2019. Les des deux premières grèves ont été marquées par la résilience du gouvernement de Youssef Chahed. Et c’est ce qui explique le recours de l’UGTT à une 3ème tentative d’intimidation, ce qui pourrait donner au gouvernement la possibilité de tenir ses prévisions, notamment en matière de budget dans tous ses chapitres. Quelqu’un disait que la grève générale est l’arme ultime, car supposée être aussi l’arme fatale. Avec 37.000 participants à cette grève, sur un total de plus de 650 mille fonctionnaires, la grève du 17 janvier n’aura été qu’une grève de plus dans un pays où le droit de grève est constitutionnalisé et où la liberté d’expression est plus qu’une réalité de tous les jours. Comme la 1ère, elle s’est aussi déroulée dans le calme et sans commune mesure avec celle du 26 janvier 1978 dont menaçaient le SG de l’UGTT et le chef de l’Etat. Mais elle a surtout été, comme l’on dit divers observateurs nationaux et internationaux, une grève hautement politique. D’abord, par les slogans qui y ont été scandés et qui revendiquaient, ni plus ni moins, le départ de l’actuel chef de gouvernement, une cause par ailleurs commune et déclarée, entre Taboubi et BCE.

Ensuite par la multitude des « casus belli » qui ont été évoqués par Noureddine Taboubi pour justifier sa grève. Dans son communiqué du 19 janvier 2019, la Commission administrative de l’UGTT revendiquait pêle-mêle dans ses points 6, 7 et 8 notamment, l’augmentation des salaires, l’application de l’accord général concernant la poursuite des négociations sur les entreprises publiques et la mise sur pied d’une commission pour leur restructuration, la révision des régimes spéciaux, le contrôle des prix, la révision des circuits de distribution et les relations avec le FMI.

Tous ces griefs cachent mal, comme un évident casus belli, les vraies raisons de toutes ces grèves qui ne feront que détruire encore l’économie tunisienne et retarder ses réformes salvatrices par «le Prix Nobel qui tire le pays en arrière», comme disait The Economist de l’UGTT. L’omnipotent syndicat ouvrier tunisien ne cherche par ces grèves qu’à déstabiliser le gouvernement en place et à faire tomber le personnage qui distance déjà dans les sondages, BCE prochain médiateur UGTT/Chahed, et qui prépare une formation politique dans un prochain avenir électoral où l’UGTT ne sera plus que simple observateur. Le casus belli des grèves est ainsi bien établi.

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