En période pré-électorale, l’intox devient une arme de destruction massive utilisée par toutes les parties et tous les partis. Et si l’on tient compte de certaines annonces, faites par le gouvernement à propos de projets qui mettent encore du temps à se réaliser, on pourrait même inclure le gouvernement et son chef dans la liste. L’exemple de la dernière augmentation des prix des carburants, pourrait être un contre-exemple. Cela, dans la mesure où le ministre de l’Industrie a fait une grossière erreur de communication, qui n’aura eu d’effet que celui de mettre son patron dans l’embarras. Pour le député du Front populaire Mongi Rahoui, par ailleurs président de la commission des finances à l’ARP, ainsi que l’UGTT, qui ont fortement critiqué l’augmentation des prix des carburants, les deux étaient au courant depuis décembre, sinon novembre 2018, par le biais du texte de la loi des finances. Ils en avaient pris connaissance, les deux, et avant tout le monde. Les deux ne l’avaient alors pas critiquée. Leurs déclarations, à l’annonce de l’augmentation, deviendrait donc un simple jeu pour des enjeux politiques trop évidents.
- Le comment du pourquoi
L’intox aura quand même son effet en mouvements populaires qui désarçonneront le gouvernement, parce que le citoyen ne retient que le train qui arrive en retard et que le lecteur ne retient que l’intox et oublie facilement le démenti, partant du principe que «il ne peut y avoir de craquèlement, sans un bris». Le tout dans une conjoncture de période pré-électorale et de manque de confiance entre l’Etat et le citoyen. Il faudra ajouter à tout cela la nouvelle gymnastique à laquelle s’adonnent, depuis la révolution, beaucoup de professionnels. Il s’agit des annonces de volonté délibérée et en dehors de toute règlementation de procéder eux-mêmes aux augmentations qui leur conviendraient. On retiendra, par exemple, celle d’une organisation patronale des chauffeurs de Taxis, dont le responsable vociférait dans une vidéo la décision de ses confrères d’augmenter eux-mêmes leurs prix aux compteurs, si le gouvernement ne leur donnait pas compensation de la hausse du prix du gasoil. On serait même tenté de mettre la dernière déclaration des bouchers de le faire, dans le même ordre d’idées. C’est que depuis un certain temps, professionnels et syndicats ont adopté la menace comme outil de revendication. Toutes ces déclarations sont donc, à notre sens, à mettre sur le compte de la surenchère, sur un chef de gouvernement que tout le monde sait en voie de candidater aux présidentielles et sur son parti, Tahia Tounes, qui prendra part aux prochaines législatives.
Il serait donc presqu’idiot de croire que les concernés, chef de gouvernement et son parti politique, ne soient pas conscients de ces enjeux et des jeux médiatiques des uns et des autres. Et c’est justement tout cela qui nous mène à dire qu’il est très peu probable que le chef du gouvernement autorise une autre augmentation, quelle qu’elle soit, après celle des carburants qui avait été déjà prévue depuis la loi de finances 2019, à la fin de 2018.
- Le jeu et ses enjeux où le seul perdant est le citoyen
Tous, partis au pouvoir, l’opposition, le gouvernement et les partis en voie de candidater, savent très bien que toute nouvelle mesure ou décision impopulaire handicaperait fortement les chances de Youssef Chahed et son parti de faire bonne figure aux prochaines élections. Et quand bien même le gouvernement serait-il obligé, ou poussé, à faire des augmentations des produits des matières de base, comme cela a été «faussement fuité», ce serait son propre parti qui le lui interdirait. De là à comprendre aussi que toute l’opposition et même Nidaa Tounes ont compris l’importance de ces «fuites» dans l’enjeu des prochaines élections, le pas pourrait être facilement franchi pour dire qu’ils pourraient tous en user, l’ultime objectif. Pour beaucoup, pour ne pas dire tous, la fin justifie en effet les moyens.
Il nous reste cependant à rappeler l’histoire du berger qui criait au loup, ou fable d’Esope appelée aussi «Le berger mauvais plaisant». Et comme l’effet est aussi réversible, on terminera en citant cet autre adage connu disant «Tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se brise». Et il est évident qu’entre l’un et l’autre, la différence se fera par la communication. L’opposition, tous partis confondus, le sait. Pas encore le chef du gouvernement.