AccueilLa UNEPourquoi Zargouni les fait tous taire cette fois

Pourquoi Zargouni les fait tous taire cette fois

Il s’est passé 3 jours depuis la dernière livraison de Sigma Conseil, une éternité dans un pays où il se passe et se dit des choses tous les jours, que dis-je, toutes les heures. Nous avons attendu le temps de la maturation, pour ne pas passer à côté d’un commentaire, d’une analyse, bref d’une réaction au dernier baromètre des équipes de Hassen Zargouni. Rien n’est venu. Silence de mort. Rien à voir avec la curée qui a suivi le précédent sondage, où commentateurs et personnel politique étaient tombés à bras raccourci sur Sigma, avec une violence inouïe que rien ne justifiait et sur laquelle nous nous étions interrogés . Cette fois rien, personne ne moufte, pas même celui qui avait crié le plus fort, parce que se disant le plus lésé par l’enquête : Rached Ghannouchi, le président d’Ennahdha. Certes une autre étude, faite par une autre boîte, livre des conclusions différentes de celle de Zargouni, mais ce qu’il est important de souligner ici c’est qu’une enquête de ce type n’est rien d’autre qu’une photographie du moment, et que les choses peuvent muter d’une semaine à une autre. Donc personne n’a tort ou raison dans cette affaire. C’est ce que n’avaient pas compris Ghannouchi et les autres, et c’est pour cela qu’ils râlaient aussi bruyamment. Ils se sont bien gardés de monter au front cette fois…

Les raisons du mutisme

Il y a des facteurs d’explication du silence assourdissant des politiciens face aux récents sondages, rien à voir avec les dernières curées, des explications qu’on peut presque toucher du doigt. Le désenchantement et la défiance populaires sont devenus tellement prégnants que bientôt le travail des sondeurs sera « has been« , pour savoir ce que les Tunisiens pensent de ceux qui les dirigent, de ce qui est fait pour soi-disant faire leur bonheur, il faut juste faire un petit tour dans la rue et tendre l’oreille, d’où que vienne la parole. Plus besoin des recettes alambiquées des sondeurs, de tout ce déploiement logistique, aller au marché ou dans n’importe quel café suffit amplement pour sonder l’humeur des citoyens. Et elle est très mauvaise en ce moment, les politiques le savent très bien…

Certains, notamment les islamistes, s’étaient offusqués de voir certaines formations politiques dégringoler de près de 15 points dans les sondages d’une semaine à une autre. Les dernières enquêtes établissent les mêmes faits, même si l’ordre est différent, mais peu importe in fine, ce qu’il est important de retenir c’est que dans les deux derniers baromètres il y a une tendance lourde : Ceux qu’on appelle les ténors, Ennahdha, Tahya Tounes et Nidaa Tounes, dans une moindre mesure, ne jouent plus les premiers rôles. Et aucun de leurs émissaires si prompts à prendre d’assaut Télés et Radios ne s’en plaint cette fois. La cause semble entendue, et il est très improbable que les dits poids lourds de la scène politique locale puissent inverser la tendance en moins de 4 mois.

Ils l’ont perdu de vue, ça peut leur être fatal

L’amendement de la loi électorale, goupillé par le gouvernement et donc forcément par Tahya Tounes, un projet applaudi par Ennahdha et dont certains disent qu’il est taillé pour briser net Nabil Karoui – c’est surtout lui qui le clame haut et fort -, n’est pas une bonne nouvelle pour la démocratie tunisienne. Quand une affaire de ce type est ébruitée jusqu’en France, c’est qu’il y a un problème. Mais là n’est pas notre propos ici et maintenant, ce qui nous étonne surtout c’est que certains partisans de Youssef Chahed et Ghannouchi puissent penser qu’ils ont quelque chose à gagner dans le fait de couper la tête de Karoui. Si c’est pas le patron de Nessma TV ce sera un autre, finalement peu importe celui que le contexte mettra à la disposition des électeurs, l’important c’est que les citoyens dénichent quelqu’un pour porter leur colère. S’ils sont privés de Karoui, ils se rabattront sur quelqu’un d’autre. Ou au pire des cas resteront à la maison le jour du vote. Une chose est sûre : Ces voix n’iront ni à Ennahdha, ni à Tahya, ni à Nidaa…

A voir la mine radieuse de Chahed lorsqu’il inaugurait la petite merveille de Borj Al Amri, signée par des compétences tunisiennes, on se dit qu’il n’a pas voulu lâcher la Kasbah pour cela. Revendiquer les réalisations, presque jusqu’aux élections, pour étoffer un bilan qui peine à convaincre. Sauf qu’à force de se cramponner à son fauteuil sont venus entre temps les mauvais chiffres de la croissance, qu’il s’est pris en pleine poire. C’est très embêtant, très mauvais pour ses petites affaires, et ce n’est pas le langage très politique et très diplomatique du FMI qui va gommer dans la tête des Tunisiens cette impression, à tort ou à raison, que tout va mal dans le pays. Si la Tunisie allait bien, elle ne se ferait pas distancer par tous ses voisins pour l’investissement direct étranger; certes les choses vont mieux à ce niveau, mais pas suffisamment pour corriger les indicateurs macroéconomiques. C’est à cela que les partisans de Chahed doivent penser, au lieu de miser sur la démolition de Karoui laquelle de toute façon ne réglera aucun des problèmes du chef du gouvernement.

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